Bicarbonate : quand les pionniers du 19e et du 21e siècle se rejoignent
par Nicolas Palangié
lundi 30 août 2010
On peut s’inspirer du 19e siècle et être furieusement tendance... l’esprit pionnier est intemporel, preuve par le bicarbonate.
Qu’est ce qui a bien pu faire la différence ? Vous l’aurez deviné, c’est le bicarbonate, la petite poudre blanche magique qui accompagnait les pionniers les plus avisés dans leur voyage vers le Grand Ouest.
La création de la première société américaine fabricant et commercialisant le fameux « baking soda », qui jouit aujourd’hui d’une grande popularité avec sa marque « Arm and Hammer », date de 1846, c’est-à-dire à peine quelques années après les premiers convois de 1842 et 1843 qui ont franchis les Rocheuses par le « South pass », et au moment de la guerre avec le Mexique en de 1846 à 1848 qui permit aux Etats-Unis d’établir leur souveraineté sur les principaux états du Sud-Ouest. Auparavant, la précieuse poudre était importée d’Europe, souvent sous le nom un peu hermétique de « Saleratus ». Le bicarbonate est encore parfois appelé « la petite vache » au Québec, allusion à la marque « the Cow Brand Baking Soda » de John Dwight, qui a finalement fusionné avec Church and Co en 1896. Le nom commercial « Cow Brand » a finalement été abandonné en 1960 pour concentrer les efforts de communication sur la célèbre marque « Arm and Hammer » (voir illustration). Et nos pionniers, dans tout ça ? Les plus avisés d’entre eux ne manquaient pas de charger quelques kilos de la précieuse poudre blanche dans leurs chariots bâchés. L’installation d’une antenne de Church and Dwight à Chicago a vite permis de mieux distribuer le produit plus à l’Ouest du pays, et il n’était pas rare de voir des chariots aux couleurs de la firme, tirés par des mules protégées par des couverture figurant les logos « Cow Brand baking Soda » et « Arm and Hammer » sillonner la campagne et ravitailler les convois de pionniers sur leur route vers le grand Ouest. Et en quoi le « Baking soda » aidait-il les pionniers ?- Les soins bucco-dentaires. Nul doute que le bicarbonate – pour les pionniers américains au moins – a été l’ancêtre du dentifrice. Sur le doigt, puis sur une petite brosse, en bains de bouche, il a sans doute permis de préserver – certainement seulement en partie - la dentition de nombre d’entre eux. Et on sait qu’une infection buccale peut rapidement s’envenimer et provoquer une septicémie. C’est sans doute dans ce domaine que le bicarbonate a préservé le plus de vies au 19e siècle.
- Les soins des pieds. Les frottements et la macération des pieds dans d’épaisses bottes de cuir provoquaient de multiples plaies et sans doute autant de mycoses (dont le tristement célèbre « athlete foot » moderne). Les bains de pieds au bicarbonate on aussi probablement évité l’infection des ongles et de la peau des pieds à de nombreux pionniers… autre principale source potentielle d’invalidité et de décès.
- La neutralisation des odeurs… Même si, à cette époque, la tolérance olfactive devait – nécessairement !- être plus élevée qu’aujourd’hui, le fait que le bicarbonate, en plus de bloquer le développement des bactéries et de « tamponner » les milieux fortement acides ou basique, neutralise les odeurs devait être apprécié. Et ce n’est pas un hasard, puisque les odeurs de pieds sont souvent liées aux mycoses et qu’une haleine chargée est presque toujours due à des bactéries profitant des déchets alimentaires piégés entre les dents et à la base des gencives.
La polyvalence du bicarbonate, favorisée par son absence de toxicité et son caractère anallergique, a encouragé la diffusion progressive de centaines d’utilisation différentes. Certaines de ces applications sont moins pertinentes que d’autres, et si l’efficacité de certaines d’entre elles peut paraître discutable, la magie du bicarbonate réside dans la sécurité de son utilisation. Et même si son l’appellation de bicarbonate « de soude » peut parfois impressionner – les jeunes consommateurs en particuliers - il s’agit incontestablement d’une molécule au profil toxicologique et éco-toxicologique exceptionnel. Et elle est aujourd’hui redécouverte avec une rigueur scientifique qui a parfois fait défaut par le passé. Et on n’a pas fini de lui trouver de nouvelles vertus, dans le domaine dermatologique en particulier.
Sans aller si loin, de nombreux internautes se relayent sur des blogs – avec plus ou moins de sérieux, il faut bien l’avouer – pour exposer leurs approches parfois originales de « l’ami bicarbonate ». Et autour de ces discussions se crée une communauté d’intérêt pour un mode de vie plus sûr, plus simple et plus sensé. Car il faut bien reconnaître que le bicarbonate s’inscrit parfaitement dans les défis les plus urgents de notre civilisation moderne :
- Défi écologique : un unique produit pour de multiples usages, pas de mélanges de produits transportés d’un bout à l’autre de notre planète, une molécule simple, universelle et rapidement dégradable… Le bicarbonate est d’ailleurs aujourd’hui utilisé dans de nombreuses applications environnementales, qu’il s’agisse de l’épuration des fumées ou des eaux, ou même de la fixation du CO2 lié à l’activité industrielle (d’ambitieux projets très novateurs sont en cours de développement aux Etats-Unis et au Canada) !
- Défi sanitaire : l’innocuité du bicarbonate est établie sur plus de 150 ans d’utilisation domestique et pour de multiples usages. L’ion bicarbonate, et son « véhicule » le plus répandu – le bicarbonate de sodium – sont universellement et naturellement présents dans tous les grands mécanismes de la planète et de notre corps – qu’il s’agisse des interactions entre les océans et l’atmosphère ou des échanges de notre corps avec l’air ambiant via le sang et les poumons. Du fait de sa présence naturelle dans notre organisme, il n’induit pas de réactions allergiques… c’est déjà un énorme atout en soi.
- Défi économique : le pouvoir d’achat du consommateur européen – et particulièrement celui du consommateur français – a le plus grand mal à se maintenir face à des nations dont la croissance – même si l’on sait à quel point elle n’est pas toujours synonyme de qualité de vie – est incomparablement plus forte. Une alternative simple et d’un coût modique (comme l’auraient dit nos grands-parents) ne peut pas laisser indifférent dans ce contexte.
- Défi social : le leader mondial du bicarbonate est européen, Belge plus précisément – et c’est une excellente nouvelle ! Même s’il s’agit aujourd’hui d’une multinationale qui fabrique sur tous les continents, le bicarbonate consommé en Europe est en grande majorité fabriqué en Europe. Et le bicarbonate de la meilleure qualité est fabriqué en Lorraine, à côté de Nancy, où se trouve aussi son centre de recherche. Emplois locaux, activité locale, une certaine forme de solidarité sociale… !
Les plus jeunes, qui font souvent preuve d’une curiosité très active concernant le bicarbonate – l’intensité des consultations des moteurs de recherche sur les mots-clés « bicarbonate », « bicarbonate de soude », « bicarbonate de soude » en attestent – méritent qu’on leur donne des conseils pour se réapproprier cet allié écologique et économique. Et comme l’auraient peut-être dit les courageux pionniers américains il est grand temps, à nouveau, de « faire parler la poudre » !
Sources :
Le blog animé du bicarbonate : www.monbicarbonate.fr
Historique de Church and Dwight (Arm and Hammer) : http://www.churchdwight.com/contact/downloads/cd150.pdf
Site de Solvay, premier fabricant mondial de Bicarbonate : http://www.solvaybicar.com/