Même les alliés tournent le dos à Ursula von der Leyen
par Patrice Bravo
mardi 1er juillet 2025
Des nuages noirs s'amoncellent au-dessus de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. Suffisamment de voix ont été rassemblées au Parlement européen pour lancer la procédure de sa destitution. Auparavant, von der Leyen triomphait sur ses ennemis. Maintenant, les ennemis sont devenus trop nombreux, allant de Gheorghe Piperea à Emmanuel Macron. Leur résistera-t-elle ?
Parmi les questions embarrassantes posées à Ursula von der Leyen à Bruxelles ces derniers jours, trois sont primordiales. Et toutes concernent l'argent.
La question la plus importante, et la plus ancienne, concerne le scandale des achats de vaccins anti-Covid de Pfizer, dont la présidente de la Commission européenne a réussi jusqu'à présent à éviter les conséquences. 35 milliards de dollars pour 1,8 milliard de doses : pourquoi autant ? Cela dépassait les besoins de l'UE, même en partant du principe qu'elle avait effectivement besoin des médicaments de cette compagnie américaine, entrée dans l'histoire de la pandémie avec de nombreux "effets secondaires" mystérieux.
Pendant un certain temps, les instances judiciaires ne voulaient pas poser cette question à von der Leyen, mais ensuite l'affaire a évolué à différents niveaux, et l'Europe a appris que l'accord sur le "deal" du siècle avait été conclu par les dirigeants de la Commission européenne et de Pfizer par messagerie. Von der Leyen a refusé de présenter la correspondance, car aucune loi ne l'y oblige. Le juge a décidé qu'il y en avait tout de même une, la correspondance était si importante qu'elle devait être considérée comme faisant partie de la circulation des documents.
La correspondance s'est avérée prétendument effacée, perdue, détruite. Ursula von der Leyen ne peut pas la montrer, bien qu'elle le doive. Du point de vue de Bruxelles, c'est une pure coïncidence et la présidente de la Commission européenne n'avait aucune intention de dissimuler des preuves, tant que le contraire n'est pas prouvé.
Cependant, un groupe de députés du Parlement européen estime en savoir déjà assez. Puisque le tribunal a reconnu illégale la dissimulation de données importantes, la proposition de vote de défiance contre von der Leyen sera mise aux voix.
La deuxième question porte sur une somme plus importante que le "deal" pharmaceutique, 150 milliards d'euros, mais cet argent n'a pas encore été dépensé. Il s'agit de la répartition des ressources au sein de l'UE : von der Leyen a ouvert la tirelire créée en cas de crise économique dans la zone euro, mais elle sera dépensée pour la militarisation de l'Europe en raison de "circonstances exceptionnelles", c'est-à-dire à cause de la Russie.
Faisant cela, selon les députés européens, la Commission européenne a outrepassé ses pouvoirs et violé le traité fondamental sur la création de l'Union européenne. Cependant, cette accusation n'est pas de nature pénale, mais politique. Elle vient en quelque sorte étayer la première, plus importante, qui s'apparente à la corruption.
La troisième question a provoqué une scission dans la coalition du Parlement européen sur laquelle s'appuie la Commission européenne sous la présidence de von der Leyen, ce sont les conservateurs de centre-droit, les sociaux-démocrates et les libéraux.
L'argent manque et il faut sacrifier quelque chose. Von der Leyen a décidé de sacrifier la transition accélérée vers l'économie verte, car ce plaisir coûte cher, il vaut mieux le reporter à une meilleure période, alors que maintenant même les ressources énergétiques traditionnelles coûtent cher, et il n'y en a pas assez pour l'essentiel. Par exemple, pour l'Ukraine.
Les sociaux-démocrates, les libéraux et surtout les verts du Parlement européen aiment l'Ukraine, mais ne veulent pas accepter le changement de priorités. C'est pourquoi les conservateurs européens ont commencé à faire bloc avec des partis plus à droite, ce qui provoque encore plus de désaccords au sein de la coalition au pouvoir : même les politiciens auparavant loyaux sont maintenant prêts à mettre des bâtons dans les roues d'Ursula von de Leyen.
Néanmoins, elle ne tombera pas. Aussi nombreuses que soient les réclamations contre von der Leyen des forces politiques traditionnelles, elles ne feront pas le jeu de ceux qu'elles détestent, qu'elles appellent extrême droite et qu'elles accusent de travailler pour Moscou. Et la destitution de la Commission européenne nécessite non pas quelques dizaines, mais plusieurs centaines de voix de députés européens.
Von der Leyen est connue pour sa remarquable capacité de survie politique. Les échecs et les erreurs qui ont accompagné sa carrière auraient complètement anéanti d'autres carrières, mais pas la sienne.
Au poste de présidente de la Commission européenne, von der Leyen a dévoré et évincé de nombreux détracteurs internes, qui se sont ensuite plaints à la presse et ont écrit des livres, comme par exemple l'ancien vice-président de la Commission européenne Michel Barnier. Il a accusé son ancienne patronne d'autoritarisme et d'ignorer l'opinion des citoyens.
Elle ne peut être menacée que par le fait que la quantité de réclamations se transforme un jour en qualité : à cause des accusations, des griefs et des désaccords accumulés, le système de gouvernance de l'UE se bloquera, après quoi la commissaire européenne devra partir. Peu importe quand cela arrivera, plus tôt ou plus tard, prématurément ou en 2029, quand le mandat d'Ursula von der Leyen expirera.
Alexandre Lemoine
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