Le ban et l’arrière ban

par C’est Nabum
lundi 24 février 2025

 

Changement d'orthographe.

 

C'est dans l'adversité jadis que les suzerains convoquaient le ban et l'arrière ban, c'est à dire tous les vassaux qui lui avaient fait allégeance. Ce terme vient du franc, dérivé de l'indo-européen : « bha » qui signifie parler. Voilà bien une expression qui risque fort de faire gloser dans l'univers vérolé du football professionnel tricolore.

Cette fois, nuls vassaux dans ces vaisseaux fantômes que sont les arènes sportives mais des dirigeants de haute volée qui pour défendre leur étendard, pardon leurs couleurs, sont disposés à agonir de noms d'oiseaux l'homme chargé d'arbitrer les débats. La moindre décision hostile déclenche le courroux de ces porteurs de cravates et par-dessus qui brillent par leur incapacité à se contenir dès qu'une caméra pointe le bout de son œilleton.

Si la convocation du Suzerain était autrefois implicitement un appel à la guerre pour défendre le royaume, cette fois nul besoin de convocation pour qui fondent sur le quatrième arbitre ces nobles porte-flingue de leur équipe, belliqueux et vitupérant dans une indignité sans borne. Quelle absurdité de s'en prendre ainsi à un tiers dans le plus total mépris des règles de courtoisie qui devraient prévaloir dans le sport.

Mais ici, plus d'esprit chevaleresque. Les sommes en jeu sont telles que tout est prétexte au moindre dérapage par des gens qui osent se qualifier de dirigeants. Que la plus grande sottise soit consubstantielle à ce jeu qui parait-il est le premier de tous, cela semble un phénomène que rien ne peut enrayer. Il n'est qu'à entendre les multiples cris d’orfraies que poussent les parents quand leurs rejetons endossent un short et des chaussures à crampons.

Mais dans le monde professionnel, il devrait y avoir une vertu éducative, une nécessité d'exemplarité d'autant plus de la part de personnages confortablement installés dans des loges avec tout ce qu'il faut pour passer du bon temps. Il se peut alors que les bulles de champagne finissent par leur éclater dans des cerveaux que la pratique de ce sport n'a guère habitué à la réflexion ni à la modération.

Alors dans ce petit microcosme d’irascibilité chronique et de vulgarité congénitale, il est déjà bien compliqué de maîtriser le ban : ce vaste ensemble tout confort où il y a une flopée d'entraîneurs et un nombre conséquent de remplaçants. Il y a toujours le premier d'entre-eux : l'entraîneur en chef qui finit par perdre la tête en vociférant sur le bord de la pelouse, tout en arpentant son rectangle de pelouse dans lequel il peut tout juste se contenir.

L'effet d'entraînement si j'ose dire peut alors provoquer une réaction en chaîne avec les très nombreux adjoints prêts à surenchérir ou les supplétifs qui n'attendent qu'une chose, se faire remarquer pour entrer en lice. Tout ceci est naturel à défaut d'être normal. Les effets cumulés de la pression, du stress et de l'enjeu pourraient expliquer de tels dérapages que les lois du jeu devraient systématiquement châtier même si grande est la complaisance en ce domaine puisque même les dirigeants fédéraux sont coutumiers des faits.

Mais que dire du surgissement du haut de leurs loges de ces porte-voix de la colère populaire, qui jaillissent de l'arrière ban, même pas en char à ban, pour s'en prendre à un quidam qui ni peux rien et ce, sous les yeux des caméras. Merveilleux fantoches d'une société du fric, ils méprisent du haut de leur statut et du budget de leur club et s'en prennent à des tiers pour défendre l'indéfendable de manière pendable.

Et quand le carton rouge vient récompenser justement leurs insupportables esclandres, ils s'étouffent d'indignation, évoquent une cabale contre leur club, en appelle à leurs supporters qui sont quant à eux des parangons de vertus. Ce système délirant constitue hélas un modèle pour notre jeunesse, c'est dire dans quel état se trouve notre nation.

 


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