Aurélien Barrau, L’Hypothèse K

par marko
samedi 23 novembre 2024

Voici un livre à mettre entre toutes les mains ! Il est salvateur pour les esprits enfermés dans un scientisme funeste, mais aussi pour les poètes et rêveurs qui se détournent de la science au nom des excès de notre civilisation technicienne. En somme, cet essai vif, inspiré, et remarquablement écrit nous invite à concilier nos dimensions analytiques et nos dimensions poétiques… ‘’Réenchanter la science’’ et pas seulement par poésie ou pour ‘’réenchanter le monde’’, mais bien parce qu’il s’agit d’une question de survie.

Non seulement, Aurélien Barreau parvient magistralement à mettre en relief les sources de notre crise civilisationnelle, mais il parvient par ailleurs à dresser des perspectives réjouissantes… Alors que notre aveuglement technicien nous mène tout droit vers l’autodestruction, il demeure possible de poser la question de nos finalités et de réorienter notre trajectoire collective…

Comme de nombreux penseurs, artistes, philosophes et esprits éclairés le mettent en avant depuis plusieurs décennies, nous traversons une crise civilisationnelle. On confond trop souvent l’usage de la raison avec une croyance conditionnée dans le dogme technicien… Combien de fois nous est-il donné d’entendre ou de lire des injonctions telles que « la science trouvera », « il faut avoir confiance en la science » … sans même questionner ce qu’est la science, et plus profondément, sans questionner les tenants et les aboutissants de notre expérience humaine… Comme le répète souvent Aurélien Barreau, il faut ‘’questionner les questions’’…

La science est un outil merveilleux pour l’Odyssée humaine, mais la science n’a rien à dire sur les questions ontologiques, sur nos joies, nos tristesses, notre condition d’humains. Les lecteurs de ce blog seront familiers avec les thèmes abordés, bien que sous un autre angle… Voici quelques notes prises au cours de ma lecture capturant l’essence de ce livre court qui mérite d’être dégusté dans son intégralité :

Le rôle que la science peut et doit jouer dans cette situation sans précédent est immense. À la démesure de sa responsabilité.

La confusion du pouvoir, du devoir et du vouloir – sous couvert d’une « avancée des sciences » dont la direction n’a jamais été sérieusement définie – relève d’une redoutable méprise conceptuelle.

Parce qu’elle est à la fois, sans doute, le joyau et le fléau de l’Occident, la science ne peut être interrogée qu’avec inquiétude et gravité. Sans oublier un soupçon d’insolence sans lequel la pensée, toujours, s’englue dans ses révérences.

 

 

Novalis l’écrivait déjà : « La poésie est la base de la société. » Le pari de la modernité occidentale, la dépoétisation du monde, ne peut donc pas être gagné. Ce qui est à la fois terrible et heureux.

Si, à l’inverse, elle ouvre – à partir du même matériau, appréhendé différemment – des lignes de fuite et des plans de fugue, elle participe à une dynamique d’extraction et d’enchantement.

Un coup d’arrêt aux ardeurs systémiques mais une impulse pour le foisonnement épistémique.

L’enjeu, c’est en tout cas l’hypothèse ici défendue, ne peut que se révéler fondamentalement poétique s’il est considéré avec sérieux et dans toute son étendue. Non pas accessoirement ou métaphoriquement mais principiellement et littéralement.

En vie.

Habiter poétiquement le monde, c’est aussi, nécessairement, être poétiquement habité par le monde. Bi-perméabilité.

Devenir poreux à l’infime. Ouvert à la déterritorialisation. Gorgé de là et de loin.

Savoir et sentir que toute chose est plus qu’elle-même. Ne pas effondrer l’être dans la mesure. N’avoir plus à craindre de frôler le disséminé. Jouer avec l’inconfort et composer avec la finitude.


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