De la culpabilité morale du peuple français

par Jules Seyes
lundi 2 juin 2025

Nos dirigeants aiment à dire que nous défendons des valeurs et placer les combats politiques du jours sous l’angle moral. Alors, certes, bon marxiste, financier, praticien de l’économie, je descends d’assez mauvais grès dans l’arène philosophique, mais la propagande dont nous subissons au quotidien le bombardement étant argumentativement devenue ce que le discours de Robert du PMU est à la philosophie de Platon, je vais m’accorder cette permission tant l’heure est grave.

Dans le monde multipolaire à naître, la problématique de la responsabilité ne pourra plus être esquivée. Finis les tribunaux de complaisance pour condamner les adversaires de l’occident. Désormais, le monde risque de nous demander des comptes pour nos crimes. Y sommes-nous prêts ?

 

Un travail introspectif s’impose, d’autant plus important que la fin de la seconde guerre mondiale vit un tel effort d’analyse s’effectuer sur la reconnaissance de la culpabilité du peuple allemand. Il faut se méfier des précédents, car parfois, ils deviennent une norme inconfortable ! Il nous revient de le revisiter pour nous le rappeler avant de passer aux travaux pratiques : à l’heure, où les bombes pleuvent sur Gaza, où la guerre en Ukraine se poursuit, où les mines de Coltane du Congo et le M23 se portent merveilleusement bien, où que nous portions le regard, nous sommes confrontés à la mort et à la destruction. Pouvons-nous nous exonérer de notre responsabilité ?

Face à tant d’horreurs, il conviendra de se poser la question sans attendre la fin de la tragédie : Sommes-nous réellement innocents, n’aurions-nous pas dû accomplir davantage et par quelles stratégies mentales, certains de nos concitoyens parviennent-ils à éviter de se confronter à leur propre responsabilité morale ?

 

Entre 1933 et 1945 les Allemands ont pour la plupart évité de se confronter aux horreurs et à la nature criminelle du régime nazi. Il y eut des résistants, et les premiers camps de concentrations leurs furent d’ailleurs réservés, mais ils furent en nombre modérés. En ce sens, Paul Tillich (1886-1965) théologien et philosophe déclarait  : « je n’ai jamais manqué d’expliquer à mes amis en Amérique que je me sentais coupable au sens de responsable de ce qui est arrivé. Pourquoi ? Parce que durant les années où ont été commis ces crimes ..., nous n’avons pas été assez forts pour les empêcher. Et nous ne nous sommes pas assez sacrifiés nous-mêmes, même quand nous avons protesté et sommes donc devenus émigrants ou victimes ». Politiquement, aucun allemand n’est totalement innocent de ce qui s’est passéi

Que voila une bonne mesure de la culpabilité d’un peuple ! Politiquement, nous payons des impôts, permettons le bon fonctionnement de l’État et comme tel, même si nous n’appuyons pas sur la détente, nous sommes en sommes aussi responsables.

Avant 1945, on pouvait l’ignorer en toute bonne foi, mais, aujourd’hui, les principes du verdict de Nuremberg s’imposent encore à nous : « en ce qui concerne les crimes contre la paix, que d’une part la non-rétroactivité n’est pas une règle de droit international, que d’autre part les accusés ne peuvent prétendre qu’ils ignoraient l’illégalité de leurs actions. Enfin, l’état de nécessité justifierait (si besoin était) que le Tribunal soit obligé de violer cette règle généralement suivie »

Voilà le cadre moral et juridique dans lequel nous sommes nés. Au contraire des époques précédentes, il s’impose à nous et nous confère une responsabilité particulière. Il nous est impossible de prétendre à la même candeur que les Allemands sous le nazisme.

D’ailleurs, nous sommes en ″démocratie″, malgré de nombreuses réserves sur le sujet, il est encore possible de tenter de s’exprimer, de manifester. Encore davantage, vu l’état lamentable des forces de sécurité en France, le gouvernement ne pourrait résister si deux ou trois millions de personnes descendaient dans la rue pour faire valoir leurs objections à notre politique étrangère ou intérieure. Enfin, il reste les votes, si les citoyens apprennent à ne plus accorder leur confiance à des partis gangrenés de l’intérieur.

En ce sens, l’abstention à agir peut nous être reprochée bien davantage qu’envers un Allemand de 1945. Aggravons encore la situation : Karl Jasper (1883-1969), Annah Arendt (1906-1975) et Paul Tillich (1886-1965), trois des grands philosophes ayant contribué à l’analyse philosophique de la culpabilité allemande sont tous morts avant internet et les réseaux sociaux.

Ils ne connaissaient donc pas les joies de la mémoire d’internet et s’il est toujours possible de déclarer : Non, je n’étais pas là pour saluer le dictateur il y a dix ans. Désormais, les allégeances demeurent gravées dans les archives et les messages tweeter/discord, facebook pourraient soudain se muer en terribles dossiers d’accusation pour certains un peu trop enthousiastes de la propagande médiatique. En 1945 ce n’était pas possible, en 2025, cela le devient.

 

Voilà le cadre, celui d’un immense procés à venir de l’occident soudain appellé à venir à la barre pour expliquer ses crimes. L’état de nécessité serait-il alors justifié. Pour les crimes nazis, il fut invoqué et reconnu et la démonstration est acceptée par tous.

Reste à vérifier le dossier d’accusation contre l’homme occidental : sa bonne conscience le mérite-t-il ? A entendre nos médias, jamais on n’a tant défendu la morale ! Après tout, ce brave garçon, si respectueux du discours médiatique condamne le 7 Octobre, l’invasion russe non provoquée de l’Ukraine et il a poussé ses compatriotes à devenir des modèles vaccinaux sans même leur demander s’ils souhaitaient être sauvés ou non. Avec un tel brevet de respectabilité, il n’a rien à craindre ? Ou bien ?

Question difficile, certes, remarquons que l’argent de ses impôts n’a pas servi au 7 Octobre, ni aux opérations russes en Ukraine. Cette dénonciation, ce brevet de vertu auto proclamé, sont donc faciles et sans conséquences, car le protestataire use son énergie sur des sujets hors de sa portée.

Sur les contraintes pour l’inoculât Pfizzer, il risque d’avoir de méchantes surprises. L’un des camps demandait des libertés reconnues par la loi, notre brave garçon si moral a lui plaidé pour la coercition et le chantage, doit-on longtemps s’interroger ? La peur n’est pas un argument, sinon, la théorie Nazie sur la menace juive eut été utilisée comme argument de défense à Nuremberg, remarquons qu’aucun des accusés n’osa.

Premier cas, où notre concitoyen doit se demander : Et si demain, on demande à nos apôtres de la piqure imposée : Vous ne pouviez pas ignorer que c’était illégal, pourquoi l’avez-vous soutenue ? Comment répondront-ils ? Je ne savais pas ? De quoi, les arguments étaient dans le débat public, refuser de les écouter n’était pas une réponse à Nuremberg, il n’en sera pas une demain.

De même, pour la condamnation des opérations russes en Ukraine. Que voila un étrange morale, car qui ignore le statut de garant des accords de Minsk accepté par la France ? Qu’elle n’a pas essayé la moindre pression pour empêcher les kieviens de concentrer leurs bataillons de représailles dans le Donbass fin 2021 ? L’état Français, avait l’OBLIGATION, de porter le fer dans la plaie, d’arrêter ces dangereux mouvements de troupes. Vu les dettes de l’Ukraine, nous avions les moyens de pressions idoines et notre diplomatie n’a même pas essayée. Chaque français a pu voir notre président renier les accords de Minsk devant les caméras pendant que personnes détachées par le quai d’Orsay gloussaient en commettant ce qu’un tribunal exigeant pourrait nommer un crime contre la paix. Grâce à notre président cette pièce accusatrice fut portée à la connaissance de chaque français, qui pourra s’en dédouaner ?

Enfin, il reste les crimes silencieux, mais dont chacun connaît l’existence : Qui ignore le scandaleux soutien apporté par notre diplomatie aux crimes du régime de Kigali ? Un soutien à l’odeur puante du coltane issu des mines congolaises dont la production est ensuite transférée via le Rwanda pour le plus grand profit des multinationnales occidentale. Des enfants ont trouvé ces informations pour des travaux de groupe au collége, les adultes l’ignoreraient ? Ça sera dur à plaider, tout comme les habitants de Dachau ont eu du mal à prouver avoir tout ignoré des camps. Vu le nombre de morts causés par le M23, si une justice internationale sérieuse passe, nous peinerons à plaider non coupable et la CPI nous est applicable, même si, avec un certain racisme, trop de nos concitoyens la considèrent comme une justice pour dictateurs africains. C’est la pratique, pas le droit et l’acte d’accusation contre Netanayahu le démontre, le monde change, les rapports de force aussi. Les immunités d’hier risquent de ne plus être valables, comme celles d’Himmler et des dirigeants nazis ont cessé du jour au lendemain.

Certains refuserons d’y croire, persisteront à se croire immunisés, alors, passons aux travaux pratiques : une terrible facture pèse sur nos consciences, celle de la Libye dont monsieur Macron a déclaréii : « Nous avons une dette envers la Libye, très claire : une décennie de désordre ».

Nous ? Monsieur Sarkozy m’a-t-il consulté avant d’envoyer l’aviation française ? Non, et pourtant nous voici affligés d’une dette morale et pas seulement envers ce pays détruit, car un de nos dirigeants et une camarilla de visiteurs du soir a souhaité faire la guerre voulue par le Quatar. Là aussi, la responsabilité s’applique et les crimes de nos dirigeants deviennent nos crimes, surtout à l’heure de la facture. Si la culpabilité fonctionne dans ce cas, elle fonctionnera pour le reste. Oserais-je rappeller que le tribunal de Nuremberg condamna Julius Streicher, jugé malade mental et seulement coupable d’écrits antisémites. S’il était coupable, qui parmi nous peut espérer échapper à une telle attention judiciaire ? En tout cas, pas ceux qui ont multiplié les messages russophobes ou d’autres haines validées par nos médias.

Par faiblesse, nous avons laissé nos institutions dériver, tout comme chaque Français a laissé Laurent Fabius, malgré sa phrase sur ses amis qui faisaient du bon travail en Syrie. Les gamines Yézidis ont pu apprécier, désormais les alaouites profitent des attentions des amis de monsieur Ahmed al-Charaa . Rassurez-vous, il y a plus d’Alaouites que de Yézidis, le crime sera encore plus grave, mais pour que nous l’assumions bien notre président à reçu le patron des Djihadistes en grande pompe à l’Elysée. Qui pourra dire : Je ne savais pas ?

Bien sur, la soi-disant opposition, forte dans ses discours, mais incapable de voter la destitution du fauteur de trouble sera en première ligne et j’attends le moment où la CPI citera à comparaître l’ENSEMBLE de nos députés des dix dernières années pour crime contre la paix. (Certes, les traités ne le prévoient pas, mais rappelez-vous la nécessité de Nuremberg !)

Il eut été moralement plus recommandable que nos manifestations fassent tomber ces assemblées moralement corrompues, dont l’impuissance volontaire le dispute à la veulerie.

Alors, bien sûr, comprenons-nous bien, le système politique a été verrouillé et nos chances de peser sont faibles. Si les députés se tiennent tranquille, la raison est simple : Ils dépendent du pouvoir pour les frais de fonctionnement de leurs partis. Les syndicats ont besoin de l’aide de la confédération Européenne des syndicats pour les fins de carrières de leurs dirigeants et ses fonds proviennent de l’UEiii. Là encore, l’argent crée une zone trouble et on constate la neutralité d’organismes prévus pour être des oppositions.

Donc, le citoyen est seul, reconnaissons la difficulté de l’action dans ces conditions. À peine de rares mouvements placés sous l’étouffoir organisent-ils des protestations ignorée ou niées par les médias, mais il nous revient de les soutenir. Par l’engagement, la participation à leur manifestation, ou en créant de nouveaux mouvements, mais il est bien tard, car nous approchons de la présidentielle. Peu importe lesquels, tant que tous, nous nous dirigeons vers eux pour proclamer : Pas avec nous, pas avec notre argent et nous refusons la bestialité de nos dirigeants qui sèment la mort aux quatre coins du monde.

Au moins, nous pourrons partiellement nous exonérer de leurs crimes et tels les membres de la rose blanche, sauver l’honneur de notre nation !

 

i EHRWEIN Céline « Forces et faiblesses de la réflexion politique de Paul Tillich. Evaluation critique du socialisme religieux à partir de Hannah Arendt » in M. Boss, D. Lax, J. Richard (éd.), Ethique sociale et socialisme religieux. Actes du 15ème colloque international Paul Tillich, Toulouse 2003 . Lit, 2005.
[10, p. 37, p. 179, p. 181-182, p. 189, p. 190-191, p. 210, p. 227, p. 246-247].

ii L'implication de la France dans la déstabilisation de l'Afrique

iii #CES : Confedération Européenne de Syndicats : la Commission Européenne dépense des millions d'euros pour financer ses syndicats pro UE ! - INITIATIVE COMMUNISTE


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