Un journaliste en chaque citoyen ?

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lundi 13 avril 2009

Ces derniers jours, plusieurs vidéos filmées ou relayées par de simples citoyens, apparues sur Internet et reprises par l’ensemble de la presse, ont crée la polémique. Grâce à Internet, chacun peut aujourd’hui se faire acteur, relais et commentateur de l’information, pour le meilleur et pour le pire.

Depuis le début du mois, plusieurs vidéos publiées sur Internet et reprises par l’ensemble de la presse ont créé la polémique. Certaines ont mis en évidence des violences de la part de policiers envers des manifestants à Bastia, à l’occasion du sommet de l’OTAN à Strasbourg et du sommet du G20 à Londres. Dans ces trois cas, les images ont été filmées par des témoins des scènes. Une autre vidéo, filmée par une caméra de surveillance de la RATP, montrant l’agression d’un homme dans un bus parisien, a entraîné l’arrestation du policier qui l’avait publiée. Ces affaires, au-delà des polémiques qu’elles ont généré, ont relancé le débat sur l’essor des "médias participatifs", et autres "journaux citoyens".

Internet la nouvelle pierre angulaire de l’information
Avec le développement massif du numérique - photos et vidéo - en particulier sur les téléphones portables, chacun peut se transformer en reporter. La plupart des photographies ou vidéos du tsunami en Asie du Sud ou des attentats de Londres, par exemple, proviennent d’amateurs, témoins des événements. Dans ce processus, c’est la plupart du temps Internet qui sert de relais entre les citoyens et les grands médias. C’est un véritable "journalisme citoyen" qui se développe, notamment par le biais des blogs, de plateformes d’information participatives comme Indymedia ou Agoravox, ou de sites d’hébergement de vidéos comme Dailymotion ou Youtube. A travers ces nouveaux médias participatifs, Internet est devenu l’un des principaux lieux d’information, mais aussi un formidable laboratoire à polémique


"Journalisme citoyen" et médias traditionnels
La participation du public à l’information est une tendance que les médias traditionnels ont tout d’abord subie puis intégrée. Ce "journalisme citoyen" vient parfois se substituer aux médias traditionnels, symbole d’une crise de confiance dans les relais d’information classiques. Et, de plus en plus, les médias traditionnels sollicitent photos et témoignages de la part de leur public, afin de les intégrer à leurs publications, ou mettent en place des plateformes participatives. Pour beaucoup, cette "récupération" est une preuve de la légitimité de la participation citoyenne à l’information.

Contre-pouvoir …
Le "journalisme citoyen" permet incontestablement une grande réactivité, une information proche du terrain, et une grande diversité des sujets abordés et des points de vue exprimés. Il peut permettre de révéler des informations ignorées ou dissimulées par d’autres médias, de donner un nouvel éclairage à une situation, de lutter contre la censure, agissant en véritable contre-pouvoir. Récemment, les trois vidéos mettant en cause les forces de l’ordre, sont venues contredire la version officielle du gouvernement, et la publication des films a entraîné l’ouverture d’enquêtes et l’application de sanctions contre leurs protagonistes.

… ou instrument de militantisme ?
La souplesse des médias participatifs est aussi leur plus grande faiblesse. Craig Newman, fondateur de la plateforme Craigslist reconnaît que "l’avantage, c’est qu’un citoyen journaliste sera capable de publier quelque chose qu’un journal aura peur d’imprimer ; l’inconvénient, c’est que la vérification des faits se fait après publication". Des observateurs de la presse ont souvent souligné le fait que les "journalistes citoyens" agissent fréquemment en tant que militants : il s’agit d’appuyer une opinion, plus que de transmettre une information. L’absence de vérification à priori laisse également la porte ouverte à la publication d’images ou de vidéos manipulées. En 2004, par exemple, Benjamin Vanderford, un jeune américain, avait diffusé sur Internet une vidéo montrant la supposée décapitation d’un soldat américain en Irak, qui fut reprise par un grand nombre de médias, avant de révéler qu’il s’agissait d’un montage. But de l’opération : "montrer combien il est facile de manipuler les images".
Il faut toutefois relativiser l’influence d’Internet : la masse d’information disponible y est tellement importante qu’il est rare, hormis quelques "buzz" occasionnels, que l’une d’entre elles se détache réellement. Pour preuve, la vidéo filmée dans le bus de la RATP était en ligne depuis décembre 2008…

Audrey Vassalli (www.lepetitjournal.com)

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