Mondial : on refait la liste, ou le petit jeu du sélectionneur

C’est parti : Raymond Domenech a dévoilé la liste des 23 sélectionnés pour le Mondial allemand, et chacun des amateurs de football dans notre pays, sélectionneur en puissance, va y aller de son analyse et de ses critiques. Néanmoins, au-delà d’un certain nombre de commentaires lénifiants déjà entendus - « Il fallait bien faire un choix  », « Il faudra juger plus tard  » - et des tentatives de désamorçage anticipé du sélectionneur qui a fait cette déclaration étrange : "Aller porter toute critique, toute remarque, sur l’un ou sur l’autre se fera au détriment de ceux qui sont pris et qui doivent partir sereins en se disant : on a une vraie responsabilité, c’est d’aller le plus loin possible" - cette liste appelle un certain nombre de remarques

Le choix du gardien

Finalement Barthez a été retenu au détriment de Coupet au poste de numéro 1, or tout le monde s’accorde à dire que sur la saison écoulée il n’y a pas photo entre les deux et que le Lyonnais a un meilleur niveau actuellement. De façon récurrente, pour justifier le choix de Barthez, on parle de son expérience au plus haut niveau et de ses compétitions réussies (Coupe du Monde 1998, Euro 2000), mais tout cela est bien loin, et en termes de pratique du très haut niveau, Coupet, lors du parcours européen de Lyon et des matchs de qualification pour la Coupe du Monde, a montré qu’il avait largement l’étoffe d’un grand gardien international. La seule explication plausible, mais évidemment un peu difficile à avouer, est celle de l’influence des grands anciens (Zidane, Makelele, Thuram) qui auraient sans doute fait du non-choix de Barthez en gardien numéro 1 un casus belli.

Se taire, ou ne pas y aller

Malgré les dénégations répétées de Domenech sur le mode « Je ne suis pas rancunier » et « Je n’exclurai personne en raison de ses critiques à mon égard », on peut simplement constater que tous les joueurs potentiellement dans cette situation (Micoud, Pires, Anelka) vont finalement rester à la maison. Or, les deux premiers, notamment, ont largement leur place dans cette sélection, surtout quand on voit dans la liste des 23 un Diarra ou un Dhorasso, bons joueurs de clubs français mais clairement pas au niveau mondial. Ces joueurs ont à l’évidence payé leur franc-parler... C’est dommage pour l’équipe.

Une pincée de nouveauté

Domenech a apporté deux nouveautés importantes dans sa liste : Ribéry et Chimbonda. Pour Ribéry, au-delà des qualités indéniables du joueur, on peut penser que sa très forte médiatisation a joué en sa faveur. En outre, ne pas le sélectionner, c’était se mettre à dos tous les supporters marseillais, et ils sont très nombreux. Alors quand le choix sportif rejoint le choix du consensus... La sélection de Chimbonda est en revanche une vraie et potentiellement bonne surprise. On jugera donc sur pièces.

De nombreux joueurs en difficulté

Une des principales bizarreries de cette liste est la sélection de nombreux joueurs qui ont fait des saisons moyennes, dans des clubs sans grand relief, le tout loin de leur meilleur niveau : Boumsong, Givet, Dhorasso, Diarra, et à un moindre degré, Cissé, sont dans ce cas.On pourrait même ajouter à la liste des joueurs « en dedans », et ceci au risque de choquer la France footballistique, les icônes Vieira et Zidane. Dans le cas de ce dernier, on peut même s’interroger sur sa capacité à enchaîner de nombreux matchs à ce niveau, et dès lors s’interroger encore plus sur l’absence d’une vraie doublure de type Micoud ou Pires pour le suppléer.

Le mystère Giuly

Là, on a beau retourner la question dans tous les sens, il est difficile de trouver une explication ; Giuly joue dans une des deux ou trois meilleures équipes du monde, il est en pleine forme actuellement, possède une excellente technique, une réelle capacité de percussion et en outre une vraie abnégation (voir son travail lors du match aller Milan AC - Barcelone), a déjà été sélectionné et connaît donc bien l’équipe... Le mystère est donc entier. Ceux qui auraient une explication sont priés de la donner.

Au bout du compte, cette liste laisse une impression étrange ; on n’a pas le sentiment qu’elle ait été principalement établie sur des critères sportifs, mais a contrario que les facteurs personnels (relations entre les joueurs, manque de poids réel du sélectionneur, susceptibilités...) ont été prépondérants. Maintenant, aux joueurs et au sélectionneur de nous montrer que, malgré cela, ces choix étaient les bons.