49-3 : lettre ouverte aux députés (LREM surtout)

par Caleb Irri
dimanche 1er mars 2020

Voilà, nous y sommes : la 5ème République face à ses contradictions : face à l’incohérence constitutionnelle du quinquennat et l’élection automatique d’un parlement « godillot », le droit légal à l’obstruction par amendements a précédé à l’inévitable et tout aussi légal « 49-3 ».

La première réflexion devrait aboutir à la nécessité de refonder nos institutions, mais je crains que ce ne soit pas encore le moment, car pour l’instant la situation est trop grave : le parlement s’apprête à voter sa confiance à un gouvernement qui n’est représenté que par une part minoritaire de la population. Pas parce qu’elle est mal ou pas informée mais au contraire parce qu’au fur et à mesure que le projet s’éclaircit les citoyens comprennent ce qu’ils ont à y perdre : on leur refuse un référendum pourtant prévu par la Constitution et on lui préfère l’article 49-3.

Je ne vais pas ici commencer à évoquer la réforme en elle-même ni les interminables querelles concernant la plus grande légitimité de l’obstruction ou du 49-3. Je voudrais juste vous parler à vous, députés qui représentez plus ou moins, tant bien que mal, la population française. Vous avez aujourd’hui une responsabilité devant l’Histoire, et encore plus important devant le peuple, et même face à vous-même.

Peut-être vous êtes sincèrement convaincu en votre for intérieur que cette réforme est bonne et juste, que le président est légitime et qu’il travaille autant qu’il le peut dans l’intérêt général. Vous avez le droit de le penser, mais vous n’y êtes obligés par rien : regardez dehors, pour l’amour des Hommes ou au moins des Français, regardez et réfléchissez… est-ce qu’une fois dans l’Histoire de l’Humanité on peut avoir raison contre le peuple ? Si le peuple se trompe et ne voit pas les bienfaits d’une réforme qui lui serait bénéfique, faut-il lui imposer son application de force ?

Dans les jours qui viennent se présentera au moins une motion de censure contre le gouvernement, sur la base de cet article 49-3. Ce vote laissera une trace indélébile sur l’Histoire, et vos noms seront inscrits à jamais sur ce qui sonnerait comme une défaite pour tous, car le peuple dans sa majorité ne veut pas de cette loi. En tous les cas pas maintenant et pas comme ça. Vous n’avez pas le droit de passer outre, au risque de provoquer de graves troubles demain, ou après-demain, ou bien plus tard…
Mais ainsi vous allez certainement affaiblir encore un peu plus notre démocratie, comme en 2005 : car même si le peuple a tort (ce que je ne pense pas), il est le souverain.

Je sais que nombreux parmi les députés « en marche » sont eux qui n’y croient plus, ou qui ont compris que tout cela n’était que « de la com ». Vous êtes près de 30 pourcents des députés paraît-il. Et 100 députés, cela retourne la majorité.

Alors voilà, je ne demande pas à ce que les députés « en marche » trahissent ou rejettent la politique menée par le président et ses ministres, il ne s’agit même pas de ça en réalité. Mais de grâce écoutez votre coeur, écoutez votre raison, et vous verrez que sans ce projet les deux s’accordent très bien… Alors si ceux qui n’y croient plus, ou ceux qui y croient mais pensent que la démocratie et la France valent mieux que ça votent, ou au moins s’abstiennent (si c’est possible ?) lors de la(ou des) motion(s) de censure qui sera(ont) proposée(s) par les oppositions.

Il faut que quelque chose de fort -mais de démocratique et pacifique- se passe. Car autrement cela va mal finir, il faut en être certain. Ce n’est certainement pas un souhait mais l’aléa statistique est presque absolu : si vous ne voulez pas que la violence remplace les manifs et les jetés de robes, les chorégraphies ou les happening en tous genres (mais presque toujours « bon-enfant »), alors tournez-vous donc du bon côté de l’Histoire et mettez-vous du côté du peuple, vous ne le regretterez pas : on se remettra tous rapidement, et avec joie, au travail, et sans avoir rien gagné d’autre que la conservation des droits minimums que nos anciens se sont battus pour obtenir pour nous…. Rappelez-vous toujours : nous ne voulons pas de mal aux riches, nous voulons juste vivre (et mourir) décemment, sans être contraints de réclamer, tricher ou mentir pour s’en sortir… C’est si incroyable comme demande ?

Ne craignez-pas les représailles macronistes, et ne vous laissez-pas impressionner : en réalité ils ne sont que très peu, et protégés par de trop grandes armures. Dessous ils ne sont que de faibles êtres humains… comme vous et moi. Pas plus, pas moins.

Liberté. Egalité. Fraternité. Une belle devise ou un beau slogan ?

Caleb Irri


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