Abaya aucun doute, c’est de l’islamophobie !

par Caleb Irri
mercredi 6 septembre 2023

L’abaya, vêtement dont j’ignorais jusqu’à l’existence il y a peu, est désormais interdit dans les collèges et lycées de France, car considéré par le gouvernement français comme une atteinte au principe de laïcité.

Avec cette interdiction, ce gouvernement franchit un nouveau cap dans la guerre qu’il mène avec les macro-lepénistes contre la religion musulmane : non seulement ils dévoient pour cela le concept de laïcité (qui finit elle-même par ressembler à une religion au lieu d’en garantir le libre exercice), mais en plus l’absurdité d’une telle mesure conduit à faire le funeste choix ou de la police du vêtement (ce qui est déjà une sacrée victoire pour tous les obscurantistes contre qui ils disent vouloir lutter), ou de l’uniforme généralisé, ce qui n’est en définitive rien d’autre que la solution d’uniformisation promue par ceux-là mêmes qui imposent l’uniforme de la burqa dans leurs pays.

Cette stigmatisation d’une communauté, mal cachée derrière cette notion dévoyée de laïcité (d’ailleurs la Loi de 1905 n’a empêché ni l’antisémitisme ni la collaboration), ne concerne pas cette fois les juifs ni les protestants, mais les seuls musulmans, devenus pour l’Etat Français d’extrême-droite et -la plupart des Français qui mangent cette propagande depuis des années- un ennemi intérieur bien pratique puisqu’il amalgame Arabes, Noirs, immigrés ou pas, islamistes radicalisés ou musulmans non-pratiquants, au gré des affaires et des faits divers qui permettent de masquer le bilan -et le projet- désastreux de ce gouvernement.

J’imagine parfaitement comment cet engrenage malsain doit être le même que celui qui a fait prospérer l’antisémitisme jusqu’à la collaboration. Taper sur les juifs accusés de tous les maux de la Terre arrangeait bien les gouvernants de l’époque, trop heureux dès qu’on ne regarde pas ce qu’ils trafiquent de leur côté. Avec un slogan résumant toute leur politique sociale autant qu’économique, hier comme aujourd’hui : plutôt Hitler que le Front Populaire !

Maintenant, que reproche-t-on à ces jeunes filles qui s’habillent en abaya : d’être rebelles ou d’être soumises ? d’être une menace pour la République ? Comme si un vêtement allait convaincre les autres élèves de se convertir à l’Islam, ou son absence empêcher de le faire… Comme si pour lutter contre l’uniformisation des corps par des obscurantistes religieux, la République Laïque Française n’avait rien de mieux à faire que la police du vêtement, organisée par des « Gardiens de la Sainte Laïcité » protégeant le sanctuaire Laïc de l’Ecole Laïque Républicaine…
Ils doivent bien se marrer en Iran. Mais c’est quoi la suite, des camps de re-éducation, l’interdiction des musulmans/Noirs/Arabes dans les écoles ?

Toute cette histoire pourrait être risible si elle ne soutenait pas un fondement idéologique réellement malsain et que certains voudraient nous empêcher de dénoncer, de la même manière qu’il était mal vu de dénoncer publiquement l’antisémitisme quand il est devenu majoritaire en France (merci la propagande, en tous points semblable à celle actuelle) : je pense bien sûr à l’islamophobie, qui est malheureusement devenu le miroir historique et religieux de l’antisémitisme des années 1930.

En réalité derrière toute cette mascarade se cache la même haine raciste, portée contre l’islam amalgamé au terrorisme, à la charia, au Grand Remplacement et à tout ce qui peut permettre de faire détester tous ceux qui sont associés à ce simple terme « musulman ». Exactement de la même manière que s’est propagée la haine contre les juifs, accusés de tous les maux… dont un complot juif mondial destiné à dominer le monde ! -comme par hasard ;-)

Bien évidemment, et comme à l’époque, la gauche qui dénonce cette islamophobie et les conséquences contre-productives de cette stigmatisation se voit taxée d’islamo-gauchiste, de la même manière qu’on traitait de judeo-bolchevik celui qui dénonçait l’antisémitisme des années 30. Pourtant défendre le Droit des musulmans à l’être n’est pas soutenir l’islam ; et je ne défends pas les musulmans parce qu’ils sont musulmans mais juste parce qu’on les attaque. Moi qui déteste les religions, toutes les religions, je suis contraint par la virulence des Français à l’égard des Noirs/Arabes/musulmans tous mélangés dans une soupe raciste immonde et imbuvable, de défendre, au nom de la République et des Valeurs qu’elle est censée promouvoir, des gens stigmatisés en raison de leur couleur de peau, de leur origine ou de leur religion. Comme j’ai appris à le faire à l’école laïque de la République Française, et non pas à l’école de la République Laïque Française.

Ceux qui ne veulent pas voir ça, ou ceux qui le voient mais qui ne disent rien, sont les complices de ce qui va nécessairement suivre, car c’est un engrenage dans lequel nous sommes tous pris. La théorie complotiste du Grand Remplacement, qui postule que la France, voire l’Europe, doit être blanche et catholique, ou judeo-chrétienne, (ce qu’elle ne peuvent être sans déportation [remigration], enfermement [CRA/Angleterre/Lybie], mort [méditerrannée/manche]) est un outil pratique pour faire accepter n’importe quelle loi sécuritaire ou raciste : il faut comprendre que derrière cette idéologie suprémaciste blanche se trouve le postulat que se mélanger les uns avec les autres fera perdre une sorte de « supériorité » qui rappelle les heures sombres du délire impérial des nazis. Et qu’attiser les haines finit toujours par engendrer le pire.

Voilà où j’en suis de ma réflexion : personne ne veut ce qui va suivre mais personne ne fera rien, ou ne pourra rien faire, qui puisse empêcher cela. Pourtant la situation est grave, car ce n’est rien de moins que le fascisme qui revient.

Alors je reste là, impuissant, condamné à le regarder faire sans pouvoir agir.

Caleb Irri
http://calebirri.unblog.fr

PS : cette période si étrange me permet de comprendre bien des choses qui m’échappaient, notamment les mécanismes sociétaux qui ont rendue possible l’abomination de la Shoah, et sans doute de bien d’autres monstruosités humaines : juste et tout bêtement par petits pas, par accomodements, par slogans, par faits divers et propagande, par lâcheté, en préférant diviser et attiser les haines au jour le jour, juste pour continuer de régner. Et puis les gens se sont soumis, comme ils l’ont toujours fait, de la Saint-Barthélemy à la collaboration…

Pourtant ils n’étaient ni plus ni moins cons qu’aujourd’hui ! Alors pourquoi ne recommenceraient-ils pas les mêmes erreurs ?


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