Accusé M’ Bala, qu’avez-vous à dire ?

par Grégoire Duhamel
lundi 20 octobre 2014

Ai-je le droit d'être antisémite pour "faire marrer" ? Ben non.

Dieudonné a été mis en examen le 10 juillet pour fraude fiscale, blanchiment et abus de biens sociaux, a-t-on appris ce vendredi dernier de sources proches du dossier. Les enquêteurs s’interrogent sur plus de 400 000 euros expédiés au Cameroun, quand en outre fin janvier, à l'occasion de l'enquête préliminaire, les policiers de l'Office anticorruption avaient découvert 650 000 euros en liquide à son domicile. Par delà ces péripéties fiscales, qui n’ont rien à voir en réalité avec l’objet des controverses que l’humoriste suscite, il y a le reste.

Quelles sont les condamnations dont M’Bala a fait déjà l’objet ?

En 2000, il est condamné pour injure envers l'animateur Patrick Sébastien (qu’il a traité de « con »). Ce diagnostic méritait-il une condamnation ? Le lecteur jugera.

En 2007, il est condamné pour diffamation envers l'animateur de télévision et comédien Arthur, dont il affirme qu’il finance l’armée israëlienne.

En février 2007, la cour de cassation réunie en assemblée plénière casse et annule de manière définitive sa relaxe pour injure antisémite et juge que ses propos, « Pour moi, les juifs, c’est une secte, une escroquerie », tenus en février 2002 dans une interview pour le magazine Lyon Capitale, sont en effet constitutifs du délit d'injure antisémite. Bien qu’idiote et peu ragoutante, cette opinion est-elle antisémite ? Affichée comme une opinion personnelle ("pour moi"), il semble que cela puisse se discuter en droit.

S’ensuivent alors d’autres condamnations du même type, elles sans ambiguïté : la cour d'appel le condamne le 15 novembre 2007 pour provocation à la haine envers les juifs à 5 000 € d'amende pour avoir comparé en 2004 les juifs à des « négriers » et trafiquants d'esclaves. La cour d'appel de Paris confirme le 26 juin 2008 sa condamnation à 7 000 € d'amende pour avoir assimilé en 2005 la mémoire de la Shoah à de la « pornographie mémorielle ».

Le 27 octobre 2009, Dieudonné franchit un nouveau cap en accueillant chaleureusement le négationniste Robert Faurisson : il est condamné à 10 000 € d'amende pour l’avoir fait acclamer lors d'une de ses représentations et lui avoir fait remettre le « prix de l'infréquentabilité » par un comédien grimé en prisonnier juif, portant l'étoile jaune, des camps d'extermination nazis. Le caractère antisémite de cette mise en scène atroce parait difficile à réfuter, même si "on se marre", selon les Dieudonnistes.

Le parquet de Paris ouvre le 4 juin 2009 une enquête préliminaire à l'encontre de l'humoriste pour injure antisémite dans une vidéo sur Internet où il dénonce « le puissant lobby de youpins sionistes ». Une enquête de la justice le concernant, au motif d'antisémitisme, est également en cours en Belgique.

En 2009, il est condamné au Québec pour diffamation envers le comédien et chanteur Patrick Bruel, qu’il qualifie de « militaire israëlien ».

Il est condamné en 2009 à une amende de 3 000 € pour diffamation envers la journaliste Elisabeth Schemla du site Proche-Orient info (fermé depuis).

En 2010, il est condamné à 5 000 € d'amende plus 10 000 € de dommages et intérêts pour diffamation envers la Licra qu'il avait qualifiée « d'officine israélienne », en la rangeant parmi les « associations mafieuses qui organisent la censure  » et « nient tous les concepts du racisme à part celui qui concerne les Juifs  »

En novembre 2012 Dieudonné est condamné à 28 000 € d'amende pour « diffamation, injure et provocation à la haine raciale » dans deux vidéos publiées sur Internet. L'une concerne la chanson à caractère à prétention drôlatique Shoananas, l'autre la déclaration suivante : « les gros escrocs de la planète, ce sont des Juifs  ». Ici on notera le caractère indubitablement antisémite, c’est à dire prêter un comportement sournois et négatif à un groupe d’individus indistincts, au seul motif de leur origine.

Enfin en 2014 il est condamné pour contestation de crimes contre l'humanité, diffamation raciale, provocation à la haine raciale et injure publique », à retirer deux passages de la vidéo 2014 sera l'année de la quenelle, qu'il avait postée sur Utube.

 

On le voit, les défenseurs à tout crin de Dieudonné, qui en appelle à la légitime liberté d’expression, non sans raisons parfois, peuvent néanmoins remarquer le caractère étrangement récurrent et unilatéral de cette « liberté ». Reste donc à son auteur à s'expliquer sur ses incessantes obsessions.


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