Afrique : Pékin boit du petit lait, Paris trinque (Chine Chine) !

par Abdelkarim Chankou
vendredi 1er décembre 2017

Bref la France est quasiment hors piste après des années de marche-arrière. Elle compte sur le Maroc de la tirer d’affaire ou plutôt du bourbier où elle s’est engluée. Jugez-en ! L’Algérie, ex département français a tellement viré chinois que le caricaturiste Dilem a résumé la situation avec un dessin où il souhaite une bonne fête du 1er Mai aux Chinois !

Liberia

« Quand la Chine s'éveillera… le monde tremblera. » L’essai qu'Alain Peyrefitte a écrit après un voyage officiel en Chine en 1971, et qui est paru en 1973 chez Fayard a été durant des années sur toutes les lèvres. On le sortait chaque fois que l’on voulait résumer en un mot la fin inéluctable du capitalisme mondial de l’après seconde guerre et aussi pour prédire le dérapage de la nouvelle économie globale sortie de sous les décombres du mur de Berlin et de la place Tienanmen au lendemain de 1989. La crise dite des subprimes qui a ravagé le secteur des prêts hypothécaires aux États-Unis à partir de juillet 2007 a été le point d’orgue de ce méga dérapage programmé. Depuis ces 30 dernières années l’essai de Peyrefitte n’a jamais été autant d’actualité. Et pour cause ! Pendant que la planète politico-médiatique pérorait sur les raisons et les conséquences de ces dérapages, pendant que la France avait le regard tournée vers l’Europe centrale, pendant que les nouveaux riches et les petits boursicoteurs d’Occident et d’ailleurs, fraîchement nés des boums immobilier et minier - des paysans s’étant enrichies grâce à la vente de leurs terres arables à des promoteurs du béton et des métaux-, les Chinois qui ont retenu la leçon du 4 juin 1989, tels une grande colonie de fourmis, travaillaient en silence et méthodiquement. Le continent qu’ils ont colonisé comme la moisissure colonise le Bleu d'Auvergne s’appelle Afrique. Pendant que les Tout va très bien madame la marquise dormaient sur les deux oreilles en rêvant d’une Europe élargie de 500 millions de consommateurs qui dansent, téléchargent des films et de la musique sur internet à portée du clic, échangent, s’échangent, se payent des bagnoles, voyagent etc., des investisseurs chinois enveloppés en costard cravate 3 pièces, arborant des montres Rolex à 5000 euros et berlines de luxe mais avec des bleus et cols Mao dans la tête s’insinuaient silencieusement, insidieusement et progressivement sous le continent noir comme l’eau s’insinue sous la porte du voisin. Et soudain patatras ! Le réveil brutal de qui de droit avec l’atroce mal de tête et gueule de bois. Trop tard. Même pour pleurnicher ou se mordre la langue. La nature ayant horreur du vide, la vacuité laissée par la France depuis le Sommet de la Baule, le 20 juin 1990, à l’occasion de la 16e conférence des chefs d'État d'Afrique et de France qui enterra la Françafrique a été vite rempli par la Chine qui ne s’est pas contentée des anciennes colonies françaises en étendant sa présence même aux pays anglophones et lusophones.

LE MAROC PLATE-FORME

Pour ne citer que ce cas la Chine et la Guinée-Conakry ont signé, mercredi 6 septembre 2017, « un accord cadre prévoyant l'octroi de ressources minières guinéennes à des sociétés chinoises contre le financement d'infrastructures, à hauteur de 20 milliards de dollars. » Un véritable camouflet pour la France dont le seul espoir est que le Maroc, pays allié et ami, très présent politiquement et économiquement en Guinée notamment dans le secteur minier amortisse par intercession les pertes hexagonales, d’autant que Rabat et Pékin sont également engagés dans un ambitieux partenariat win win depuis la visite historique du roi Mohammed VI à Pékin en mai 2016. D’ailleurs, la France ne cache plus qu’elle attend de son allié marocain qu’il joue le rôle de pont entre elle et une Afrique où 70 % des habitants sont des jeunes qui n’ont pas connu la colonisation française et qui de plus en plus font preuve d’une défiance et méfiance sans précédent vis-à-vis de l’ancien colonisateur. A l’occasion d’un forum économique franco-marocain, le premier ministre français Edouard Philippe, en première visite de travail de travail les 15 et 16 novembre derniers au Maroc a notamment appelé à développer les échanges pour faire du Maroc une « plate-forme » de développement commun vers l’Afrique, « terre d’opportunité ». Bref la France est quasiment hors piste après des années de marche-arrière. Elle compte sur le Maroc de la tirer d’affaire ou plutôt du bourbier où elle s’est engluée. Jugez-en ! L’Algérie, ex département français a tellement viré chinois que le caricaturiste Dilem a résumé la situation avec un dessin où il souhaite une bonne fête du 1er Mai aux Chinois ! Et puis Djibouti . Depuis des années une base française en Corne d’Afrique, ce pays a aussi viré chinois ! En janvier 2016, 12 accords ont été signés entre Pékin et Djibouti. Le deuxième est colossal. Il concerne « le lancement par la Chine de la Nouvelle Route de la Soie, un projet dont l'investissement total s'élève à 48 milliards USD. Cet accord va renforcer davantage les ambitions djiboutiennes de devenir une plateforme de transbordement et de redistribution du commerce mondial et celui impliquant surtout les échanges avec la Chine. » La messe est dite.

http://chankou.over-blog.com/2017/12/afrique-pekin-boit-du-petit-lait-paris-trinque-chine-chine.html


Lire l'article complet, et les commentaires