Agoravox, respect et éthique

par Emile Red
lundi 2 avril 2007

La campagne électorale multiplie les articles et les conflits individuels et factieux se développent comme jamais.

Agoravox a une image de média citoyen bien plus considérable que nous ne pouvons l’imaginer. Certaines instances politiques, juridiques, médiatiques se réfèrent volontiers aux articles et interventions puisées ici, et on peut retrouver sur de nombreux sites officiels ou officieux les pérégrinations des multiples pensées développées grâce à Agoravox.

Alors que nous nous étonnons souvent de l’infantilisation de notre société où le manichéisme primaire régit les actes légaux ou judiciaires, nous offrons un spectacle désastreux du niveau de réflexion qu’il convient d’avoir lorsqu’on se présente en garant de la liberté d’expression et du foisonnement des idéaux civiques.

Un article qui soulève discussions, réactions, querelles ou mésententes n’est en soi nullement condamnable ; il démontre la vivacité de l’implication et des tendances de chacun pour partie de la société. Pourtant quand le fil se transforme en règlement de compte, non pas en contrecoup sporadique ou épidermique, mais en conflit ouvert entre personnes définies, évinçant tout débat d’idée, laissant courir menaces, diffamations et insultes, l’existence d’Agoravox est mise directement en jeu et sa crédibilité intégralement niée.

En cette période où respect et reconnaissance individuelle deviennent un enjeu démocratique, nous laissons, par de tels comportements, toutes latitudes à nos dirigeants politiques à passer outre les conceptions sociétales que nous aimerions voir se dessiner. Il est bien incontestable qu’une populace puérile, incapable de civilité, se complaisant dans une médiocrité frénétique, ne peut détenir, même partiellement, les rênes d’une autorité raisonnable. L’image de conscience critique que représente Agoravox et, par extension, les mouvances de la nation entière est irrémédiablement dégradée par ces stupidités futiles et perverses.

Loin l’idée d’un débat parfait, insipide, sans âme, où humour, ironie et dénonciation seraient absents ; pourtant il faut mesure garder et lorsque le trait d’humour se métamorphose en lynchage inacceptable, il convient de tirer la sonnette d’alarme, il n’y a aucun auteur ou posteur plus à même de détenir la vérité qu’il soit ou non spécialiste d’un domaine précis, chaque "non professionnel" peut développer ses propres théories sans crainte d’une vindicte furieuse et démagogique sous peine de voir Agoravox devenir, ce contre quoi nous luttons tous, un média élitiste dont la pondération excessive nous répugne tant.

Le pari de Carlo Revelli a droit d’être soutenu, encouragé et respecté parce qu’il est novateur, tolérant et libre, et personne ne peut le remettre en cause, la participation n’y étant nullement obligatoire. L’année passée ici nous a prouvé, au long des méandres de l’actualité agitant notre monde, que les gens ordinaires sont aptes à discerner les vraies difficultés de la vie contemporaine et que l’ouverture d’esprit n’est en rien l’apanage du gratin philosophique ou politique. Or, aujourd’hui, la situation se dégrade et le naturel revient au galop, les petites vicissitudes reprennent le pas sur les grandes envolées, les luttes claniques se réapproprient le champs des échanges, les réduisant à des pugilats.

Nous nous devons de revenir à des principes d’éthique où respect et courtoisie ne doivent céder le pas à la violence verbale et au dénigrement virulent. Chacun a sa part dans la détérioration de l’ambiance d’ Agoravox, ne laissons pas le musellement devenir la règle au risque de voir s’installer une vraie censure qui ne saurait être que préjudiciable à tous. La modération doit être le baromètre de la santé des débats, et même si quelques échauffourées sont bénéfiques, elles ne peuvent être le seul moteur régissant la convivialité aspirée par tous.

Agoravox doit vivre parce que dans ce monde de plus en plus bâillonné, il est un souffle d’air qui ne tolère aucune mainmise. Vouloir spéculer sur les limites théoriques attingibles c’est donner des armes à l’oppression latente qui guette le moindre faux pas. Nous nous devons de respecter Agoravox parce que c’est notre propre respect qui est en cause.


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