Alain Soral - Un pitbull dans un musée
par Zentropia
mardi 30 août 2011
La première fois que j'ai entendu parler d'Alain Soral, ça devait être à la télévision, chez son ex-pote Ardisson, à l'époque où il y était le bienvenu, à la sortie de son livre « Sociologie du dragueur », que j'ai pris à la va-vite pour une blague potache élaborée, puis pour « Jusqu'où va t-on descendre ? » que j'ai considéré comme un listing rageur et provocateur à l'encontre des années 90. Aujourd'hui c'est différent, le temps a passé, les évènements se sont bousculés depuis dix ans et le sieur a trempé au sein du brutal et fielleux, mal nommé, Front National. Là, ça y est, les mots sont lâchés, l'étiquette infâmante est sortie, la messe est dite. Pas si sûr. En tant qu'enfant de socialistes et adolescent de la mitterandie, j'ai été dressé contre ce parti depuis des années pour de bonnes et de mauvaises raisons. Un regard honnête mérite d'y regarder à deux fois.
Certes il est peut-être juste de défendre une nation, un peuple, dans le sens de sa destinée, si le but est son bien-être, mais les méthodes sont douteuses si le diagnostic est faux, insuffisant et biaisé. D'accord pour dénoncer les outrances indéfendables de la République (détournements de fonds, abus de pouvoir, perversions) mais pas pour une solution simpliste et de courte vue. Je me fous des raisons qui ont amené AS à entrer au FN et à en sortir. Pour en avoir rencontré, il est clair que ce parti a dans ses rangs des brutes et des êtres imbuvables. Les images, les mots, les vidéos en témoignent. Ce que je vois en lui aujourd'hui, c'est un combattant du peuple, grossier parfois, emporté souvent, intransigeant toujours. Parce qu'il a été seul, blessé et en péril. Comme un chien d'attaque, qui a pris des coups mais qui a encore la rage et le pouvoir d'en donner à son tour. C'est le cas de beaucoup, de tous profils en France, d'où le succès de son livre. Cerné par les pressions, les abus de langage, les postures définitives, la bête traquée se rebiffe. « Comprendre l'Empire » est cet opus sorti récemment qui détaille l'origine des peurs et des rages contemporaines, au mépris des codes habituels, des ruses de sioux et des ménagements de rigueur. Plus qu'un éléphant dans un magasin de porcelaine, Alain Soral est un pitbull dans un musée de la pensée. Les dents acérées, l'oeil rougi, les pattes nerveuses ; il ne voit pas la poussière sur les tableaux ni les piédestals sous les statues. Il mords de tous côtés. Quand il sent l'arnaque, il jaillit devant une stèle et il aboie sans faillir quand il découvre un forfait honteux.
Quand j'ai vu la vidéo de sa conférence de Marseille, je me suis dis qu'il avait encore franchi une frontière après avoir fraternisé avec Dieudonné et créé son association. Quand j'ai vu la vidéo de Vaulx-en-Velin, je me suis dis : quel « dégoiseur », il va au charbon, le sac à la main, envoie toutes ses cartouches à ceux qui voudraient en découdre, les prends au col et les abreuve d'uppercuts avant même qu'ils aient formulé leurs arguments. Quand j'ai vu la vidéo de Rennes, je me suis dis qu'il précisait ses concepts et qu'il était grand temps de pointer le ridicule et l'innocuité des militants du SCALP. Quand j'ai vu la vidéo de Nantes, je me suis dis : enfin quelqu'un se moque un peu des érudits compassés si prompts à humilier et rabaisser qui n'a pas bac+10 et 15 livres à son actif. Urgent et salvateur. Quand j'ai vu l'interview de Fluctuat, je me suis dit qu'il envoyait ses derniers coups à des victimes choisies, poussées dans les cordes et réduites en pièces. Victoire par KO.
Comme tout homme, Alain Soral a peut-être des leçons à recevoir, mais une chose est sûre, il en a beaucoup à donner. Peu importe l'auditoire, jeune ou vieux, riche ou pauvre, son parcours mérite analyse et enseignement. Je suis sûr que, dans le secret de leur conscience, dans celui de leurs alcôves, de nombreuses personnes redoutent de croiser sa route et d'être confronté à ses accusations. Le pitbull a grandi, forci et continue sa visite infernale dans le musée de la pensée. Et bien d'autres de son espèce ont entendu ses aboiements. L'animal, blessé mais prêt à l'assaut, montre ses failles lui-même et transforme ses blessures en fioul de combat.
Ajout du 27/08/11 : Depuis la publication de « Comprendre l'Empire », Alain Soral est un boxeur sans combat. De son livre, je n'ai observé que des critiques détournées, des attaques ad-hominem et surtout, un silence...étonnant. Coupable ? Eloquent ? Méprisant ? Désinvolte ? Difficile à dire. S'il s'attache aujourd'hui à prolonger pacifiquement son œuvre émancipatrice par des analyses et interviews solo, c'est peut-être parce qu'il n'y a rien à répondre à la vérité nue.
Thomas Zenegg
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