Appel au président du Pakistan, Mamnoon Hussain : de grâce, la grâce pour Asia Bibi !

par Daniel Salvatore Schiffer
lundi 17 novembre 2014

 

 

Asia Bibi, chrétienne pakistanaise âgée de 43 ans et mère de cinq enfants, est aujourd'hui menacée d'être mise à mort par pendaison, à tout moment, pour un hypothétique blasphème : avoir relativisé, en public, les actions de Mahomet en comparaison du sacrifice de Jésus !

Cela se serait passé, selon des témoignages dont la plupart se sont cependant révélés honteusement faux a posteriori, en juin 2009. Innocente victime de la charia, cette absurde et obscurantiste instrumentalisation politico-idéologique du Coran, et donc arbitrairement condamnée par un tribunal islamiste de Sheikhupura, Asia Bibi croupit à présent, depuis cinq ans déjà, dans une sordide et infecte prison de la province du Punjab. Pis : cette peine capitale vient de se voir confirmée, ce 16 octobre 2014, par un tout aussi expéditif, révoltant et très sommaire procès !

 

GRÂCE POUR ASIA BIBI !

Il y a quatre ans déjà, quant à moi, que je me bats, avec quelques rares amis intellectuels, pour la libération d'Asia Bibi, mais en vain, hélas, jusqu'ici (http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/apres-sakineh-sauvons-asia-bibi-84552).

Telle est la raison pour laquelle, en désespoir de cause, mais face à l'urgence, j'ose m'adresser à présent, comme vient de le faire très courageusement la Maire de la ville de Paris, Anne Hidalgo, à l'actuel président du Pakistan, Mamnoon Hussain, esprit que l'on dit plus éclairé que ses prédécesseurs : de grâce, Monsieur le Président, la grâce, si ce n'est la pitié, pour Asia Bibi !

 

LE MAUVAIS ESPRIT DES LOIS

Certes ne s’agit-il aucunement ici de stigmatiser - j’insiste sur ce point essentiel pour la compréhension comme pour l’enjeu de cet important débat - la culture islamique, ni la foi musulmane, pour lesquelles j’éprouve, comme pour tout autre conviction religieuse, le plus grand respect, mais bien de dénoncer l’indue et abusive exploitation qu’en font, sous couvert d’autorité divine, ces anachroniques fondamentalistes.

Car cette trop littérale lecture de la charia, de la part de la frange la plus radicale de ses exégètes, n’est en fait, lorsqu’elle se voit appliquée de manière aussi stricte et aveugle, que le mauvais esprit des lois, pour paraphraser le titre d’un célèbre traité de Montesquieu, ce philosophe des « Lumières » dont la lucide et docte intelligence, en ces temps de nouvel obscurantisme, nous manque tant.

 

LIBERTE DE CONSCIENCE

Davantage, c’est l’imprescriptible liberté de conscience, plus encore que les droits de l’homme et de la femme, qui est ici bafouée, sinon niée de la façon la plus scandaleuse qui soit : on ne peut brimer indéfiniment la liberté de pensée ; on ne peut bâillonner impunément la liberté de parole. Gare au boomerang : il peut se révéler parfois dévastateur, souvent cruel et toujours fatal, pour les dictateurs !

 

LA BARBARIE A VISAGE ISLAMISTE

C’est là, cette tolérance face à la diversité des croyances, l’un des principes cardinaux, que tout esprit authentiquement laïc (ce qui ne signifie pas nécessairement, la nuance conceptuelle est de taille, athée) souhaiterait universel, de toute véritable démocratie, sans laquelle il n’est point d’humanisme qui vaille, ni même peut-être, plus simplement encore, d’humanité.

La lettre, lorsqu’elle se transforme en dogme, se révèle bien souvent, en matière d’interprétation des saintes écritures comme de tous textes sacrés, la trahison de son esprit. C'est la barbarie à visage, sinon religieux, du moins islamiste : ce qui n’est certes pas là, pour un croyant, le moindre des paradoxes !

L'actuel président du Pakistan, Mamnoon Hussain, sera-t-il assez sage pour entendre, efficacement, cet appel solennel à la libération d'Asia Bibi ?

 

 

DANIEL SALVATORE SCHIFFER*

 

*Philosophe ; auteur de Oscar Wilde - Splendeur et misère d'un dandy (Editions de La Martinière) ; porte-parole, pour les pays francophones, du « Comité International contre la Peine de Mort et la Lapidation » (« One Law For All »), dont le siège est à Londres.


Lire l'article complet, et les commentaires