#balancetonporc : Sandra Muller condamnée en première instance

par Imhotep
lundi 30 septembre 2019

Début octobre 2018 je revenais sur ce site pour parler d'un livre : #chassealhomme écrit par Néandertal (éditions des Sans-voix) à la suite des mouvements #balancetonporc et #MeToo. Le cas de Sandra Muller, à l'origine de #balancetonporc, avait été évoqué. Elle vient d'être condamnée en première instance pour diffamation à l'encontre d'Eric Brion.

Qui a entendu parler de #balancetonporc ? Tout le monde. Qui a entendu parler de la condamnation en première instance de Sandra Muller pour diffamation ? Peu de monde. Tous les organes de presse qui ont démultiplié les articles parlant de cette affaire ont à peine ébauché cette condamnation.

 

L'histoire est la suivante. Lors d'une soirée festive, Eric Brion, quelque peu éméché a déclaré à Sandra Muller « sa flamme ». Extrait du livre : 

« Le 13 octobre 2017 la journaliste Sandra Muller a écrit, alors qu’elle est à Manhattan, sur son compte Twitter : " Tu as des gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit" Eric Brion ex patron de Équidia #balancetonporc
Elle ne s’est pas contenté de ce message elle a lancé le mouvement en appelant tout simplement à la délation publique : à travers le hashtag #Balancetonporc. « 
Toi aussi raconte en donnant le nom et les détails un harcèlement sexuel que tu as connu dans ton boulot. Je vous attends »
Eric Brion s’est expliqué dans une tribune du
Monde le 30 décembre dernier dont je reproduis ici la seule partie disponible au grand public - Le Monde dans sa croisade pour la justice ne donne la parole aux accusés que lors de tribunes accessibles uniquement aux abonnés alors que les attaques comme #Balancetonporc, sont diffusées largement, juste des accusations, sans contextes, sans explications, comme seule vérité factuelle - : Tribune. Il y a deux mois et demi, mon nom a été le premier associé à une campagne de dénonciation sur les réseaux sociaux consacrée au harcèlement sexuel. Dans un premier temps, j’ai délibérément choisi de garder le silence, toute parole à chaud pour tenter de rétablir la vérité ou corriger les inexactitudes étant laminée par les réseaux sociaux.
Quel rapport entre mon comportement et l’affaire Harvey Weinstein, accusé de viols et de harcèlement sexuel par plusieurs femmes ?
Mais ce silence laisse planer trop de doutes et de questions auxquels je souhaite ici répondre. J’ai effectivement tenu des propos déplacés envers Sandra Muller [la journaliste à l’origine du hashtag #balancetonporc], lors d’un cocktail arrosé très tard dans une soirée, mais à une seule reprise. Elle me plaisait. Je le lui ai dit, lourdement. Et une seule fois, je tiens à le préciser. Je ne veux certainement pas me disculper de ma goujaterie d’alors. Je lui réitère ici mes excuses.
Néanmoins, quel rapport entre mon comportement et l’affaire concernant Harvey Weinstein, accusé de viols et de harcèlement sexuel par plusieurs femmes ? Les deux premiers tweets quasi simultanés de Sandra Muller laissent pourtant volontairement planer une ambiguïté sur ce qui s’est passé ce soir-là, en me « balançant » après avoir appelé les femmes à donner les noms d’hommes qui les ont harcelés « au boulot » et en plaçant cela dans le prolongement des attaques contre le producteur américain.
La machine, inarrêtable, était lancée
Or, je n’ai jamais travaillé avec Sandra Muller. Je n’ai jamais été son collaborateur ou son supérieur hiérarchique, comme j’ai pu le lire ici ou là.... Cela est aisé à vérifier, mais, une fois que la machine infernale est lancée, on ne peut pas l’arrêter. Les conséquences personnelles et professionnelles de cet amalgame entre drague lourde et harcèlement sexuel « au boulot » ont été extrêmement importantes et pénalisantes. »

 

Eric Brion s'est comporté grossièrement envers Sandra Muller mais a présenté des excuses le lendemain par SMS, ce qui n'a pas ému Sandra Muller. Cet homme dont la vie a été broyée à cause d'une grossièreté a décidé de porter de plainte pour diffamation. Sandra Muller qui n'a pas hésité à une vengeance publique totalement disproportionnée, a, elle, de son côté, fait appel à la générosité publique pour financer son procès. Elle a dû trouver un grand nombre de bonnes âmes pour lui donner assez d'argent pour sa défense. Elle a pu avoir Francis Szpiner comme avocat. Sandra Muller a été désignée comme femme de l'année, avec d'autres, par le magazine Time. Elle est devenue le symbole et la héroïne de la libération de la parole, comme si la parole n'avait jamais été libérée avant (souvenez-nous de l'affaire de Tristane Banon).

 

Le jugement est clair et sévère : « Dans la mesure où Sandra MULLER n’écrit pas qu’Eric BRION était son supérieur hiérarchique (…) et où il est notoire que Sandra MULLER est une journaliste indépendante, l’imputation pour ce tweet n’est pas celle d’un harcèlement sexuel au travail au sens de l’article L1153 du code du travail ». Le tribunal note aussi l’absence de preuve de répétition induite par la notion de « harcèlement ». « Quel qu’ait pu être le ressenti subjectif de Sandra MULLER à la suite de paroles d’Eric BRION (…), la base factuelle dont elle disposait était insuffisante pour tenir les propos litigieux accusant publiquement le demandeur d’un fait aussi grave que celui du délit de harcèlement sexuel et elle a manqué de prudence dans son tweet, notamment en employant des termes virulents tels que “porc” pour qualifier le demandeur, l’assimilant dans ce contexte à Harvey WEINSTEIN, et “balance”, indiquant qu’il doit être dénoncé et en le nommant, précisant même ses anciennes fonctions, l’exposant ainsi à la réprobation sociale ».

 

La justice est passée, mais bien trop tardivement et avec un écho infime en regard de celui qui avait été fait aux deux Tweets de Sandra Muller. Sandra Muller a fait deux amalgames honteux et destructeurs : le premier, en pleine affaire Weinstein, a été celui de laisser croire qu'il y avait un rapport de subordination professionnelle entre elle et Brion. Ce qui est moralement et judiciairement aggravant. Mettre à profit son pouvoir hiérarchique pour abuser d'une femme. Le second concerne celui d'une parole déplacée avec la notion de harcèlement. Ne parlons même pas de l'extraordinaire distorsion qu'il peut y avoir entre un propos déplacé (et aviné) et une agression sexuelle violente. Il faut aussi noter que l'accusation contre Eric Brion a suivi son premier message #ballancetonporc de 4 heures ne laissant aucun doute quant au lien à faire entre Brion et les porcs qui harcèlent des femmes en étant leur supérieur hiérarchique ou leur collègue au travail, sens du premier message (Toi aussi raconte en donnant le nom et les détails un harcèlement sexuel que tu as connu dans ton boulot).

 

On peut remarquer que la base originelle de ce mouvement est donc vicié. Mais surtout c'est le principe même de cette démarche qui est à mettre en cause. En toute théorie la justice est là pour régler les conflits, les délits, les crimes. La vindicte populaire non. La délation non. On a vu ensuite que nombre d'accusations publiques, et mêmes de plaintes se sont révélées fausses, même si le mal était fait. Cette histoire nous plonge dans la société actuelle où l'émotion, la volonté de paraître pour un héros, un lanceur d'alerte, où l'immédiateté répondent à tout et bloquent toute réflexion, toute vérification, tout droit à la présomption d'innocence. On est condamné parce qu'accusé. Les dégâts causés par Sandra Muller ne s'arrêtent pas à Eric Brion (et ils furent considérables : amis enfuis, compagne disparue, enfants blessés, travail évanoui, dépression pendant que Sandra Muller se pavanait de plateau en plateau, marthyre médiatique et héroïne des temps modernes féministes), mais ont touché nombreux soi disant porcs en dehors de toute justice et du simple droit à pouvoir se défendre. Le simple fait que non seulement on donne peu de place à la condamnation de Sandra Muller en regard de la marée offerte à son #ballanbcertonporc, mais que cette condamnation est remise en cause par nombreux qui vont avoir cet argument facile, honteux et biaisié : on veut nous faire taire, démontre une société affolée et irraisonée, et donc dangereuse. Bien évidemment ce jugement n'a aucun objectif de faire taire qui que ce soit mais rétablit un peu la balance quand une femme diffame un homme par deux amalgames destructeurs et totalement faux : la relation hierarchique professionnelle et le harcèlement et en mettant sur le même pied d'égalité un abus sexuel avec une phrase grossière et déplacée, sans conséquence. Elle veut nous faire croire que cette phrase l'aurait profondément meurtrie et déstabilisée psychologiquement. Si c'était le cas elle ne pourrait être journaliste indépendante dans le monde de l'audiovisuel où elle officie et où les paroles sont, on peut le dire, très libres et violentes, et les hommes politiques se suicideraient dès le premier mois de leur carrière.

 

Cette histoire est révélatrice de la société du spectacle où dominent la colère, l'indignation éruptive, sélective et sans réfexion, l'immédiateté, et des conséquences sans communes mesures avec les faits.

 

 Rappel : ce livre, dont ce jugement prouve la justesse de son analyse déjà en octobre 2018, se conclut par cette phrase :

Un mot pour terminer : la femme est supérieure à l’homme en ce qu’elle donne la vie.

 

Voici des liens pour ce livre :

Livre broché

KIndle

FNAC

iTunes

 

Préambule

 

 Toute personne qui a croisé un jour la route d’une victime d’agression sexuelle a été confronté à sa douleur, sa sidération, sa dévastation parfois, sa colère ou sa tristesse, son mutisme, son dégoût d’elle-même et ou des autres, sa peur, sa difficulté plus ou moins grande à s’en sortir et parfois n’y arrivant pas, parfois y arrivant. Sauf à manquer totalement d’humanité, personne ne peut rester indifférent et ne peut qu’avoir tout à la fois un minimum de compassion pour la victime et la volonté farouche que son agresseur soit condamné, et ce sans remords. Toute personne ne peut que souhaiter, non d’éradiquer les agressions comme le promettent des politiques qu’il n’y aura plus jamais de sans abris dans la rue, mais de tout mettre en œuvre pour en diminuer de façon drastique le nombre par tous les moyens les plus efficaces qui soient, et d’aider au mieux les victimes. Personne, personne ne peut rester indifférent à la victime dans son individualité, et dans la somme des individualités meurtries et c’est avec tout ceci constamment à l’esprit que ce livre a été écrit. On se doit, aussi, absolument de regarder la société française telle qu’elle est pour être le plus efficient possible, car à mauvais diagnostic, mauvaise solution, et non de la présenter sous le pinceau modernisé de Jérome Bosch.

 

 L’auteur de ce livre est du côté des victimes et non des agresseurs qu’il exècre.

 

Résumé :

Après l'apparition des #MeToo et autres #balancetonporc, et dans une ambiance parfois de guerre civile, il était important d'analyser les faits d'agressions faites aux femmes, des contextes, du climat général de violence. Une juste cause doit être justement défendue. Un mauvais diagnostic entraîne de mauvaises solutions. La stigmatisation d'un ensemble en lieu et place d'une minorité n'est pas une solution. Ce livre, avec la conscience aiguë des traumatismes engendrés par les violences, sans la moindre indulgence pour les agresseurs, veut regarder en face la réalité sans ni la minorer, ni l'exagérer. Il a pour vocation par l'apaisement, sans oubli ni compromission, à ce que la confiance mutuelle entre les hommes et les femmes permettent de diminuer drastiquement toutes les violences en s'affrontant aux dogmatiques d'un féminisme outré et agressif tout en étant parfaitement inefficace sauf à dresser les femmes contre les hommes et inversement.

 

Néandertal :

Finalement un de ces hommes qui prennent la parole au nom de ceux qui sont fatigués d’être accusés à tort, et en masse, par des idéologues et dogmatiques d’une cause à laquelle ils nuisent en utilisant des biais, des statiques déformées, et une analyse orientée, souvent de l’aveuglement et de l’agressivité maladive.


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