Barack Obama en Afrique : échappera-t-il au syndrome Sarkozy de Dakar ?

par Allain Jules
vendredi 10 juillet 2009

C’est l’évènement du jour. L’effervescence gagne l’Afrique. C’est le branle-bas de combat avant l’arrivée du fils prodige. Barack Hussein Obama le président américain, pour sa première visite en Afrique subsaharienne en tant que chef de l’Etat américain, a donc choisi le Ghana, ex colonie britannique sous le nom de Gold Coast (Côte de l’Or). Pays peuplé d’environ 24 millions d’âmes, c’est la terre de l’illustre panafricaniste Nkwame NKrumah, premier leader africain à réclamer la création des Etats-Unis d’Afrique. Une émotion particulière traverse donc l’ambiance sur place. Accra, capitale du Ghana, s’est habillée de ses plus beaux habits et s’est même purifiée dans les fonts baptismaux des illustres Eglises sur place, pour faire honneur à cet homme-là. Le Ghana est décidément le pays d’illustres personnages et fait le plein de jaloux à travers toute l’Afrique, notamment le Kenya, pays natal d’Obama père. Pêle-mêle, on peut citer Kofi Annan, l’ancien secrétaire général de l’ONU, le footballeur Marcel Desailly, ancien capitaine des bleus, ou encore Abedi Pelé, qui fit des merveilles avec l’OM (Olympique de Marseille)…

L’Afrique tremble, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie. Barack Obama va-t-il enfin laver l’affront des guainorinades et des sarkorinades de Dakar, sorte de nihilisme pervers ? Qui plus est, dans l’enceinte même de l’Université qui porte le nom du savant africain [Cheick Anta Diop->http://fr.wikipedia.org/wiki/Cheikh_Anta_Diop], égyptologue le plus accompli. La déclaration à l’emporte-pièce de Tartempion avait déstabilisé l’intelligentsia africaine, finalement ridiculisée par le fameux « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire ». Hélas, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et, voilà que l’homme africain, Barack Hussein Obama déboula, pour faire mentir ces allégations tendancieuses, puériles et hypocrites. Pourquoi pas racistes comme le disait à juste titre Bernard-Henri Levy ? En France, sur le terrain, il y a ce prolongement du mépris des minorités qui ne restent que des faire-valoir du pouvoir. Passons. Il n’est surtout pas question ici de demander la prohibition de la critique envers l’Afrique au travers de ses élites, ses intellectuels ou ses dirigeants à cheval d’une part, entre la dictature, la gabegie et le népotisme, et d’autre part, par ce qu’on peut résumer en mauvaise gouvernance caractéristique et généralisée. Quand on prône le respect mutuel face à ses interlocuteurs comme le fait le nouveau locataire de la Maison Blanche, on ne peut que s’attendre à des critiques constructives en lieu et place des pavés burlesques dans la marre et les truculences ignobles hérités de la colonisation… Aujourd’hui à Accra, tout le monde s’accorde à dire que le discours que Barack Obama prononcera au Parlement ghanéen ne sera pas aussi mortifère que celui de Sarkozy à Dakar. Qui peut oublier ce speech rabougri, rapiécé et condescendant du chef de l’Etat français ? Ah, si le leader américain qui sera accompagné de son épouse avait eu la bonne idée d’inviter en terre africaine, berceau de l’humanité, ces quelques personnalités qui aiment l’Afrique de tout cœur, ça aurait eu de la gueule. Oui, notamment la sublimissime Angelina Jolie, le charismatique George Clooney ou encore l’incontournable Paul David Hewson a.k.a. Bono, le boss du groupe mythique irlandais, U2. Qu’à cela ne tienne, et on peut lui faire confiance, Barack Obama, lui, cicatrisera les blessures béantes ouvertes par Sarkozy qui fustigea cette Afrique meurtrie. Au lieu de retourner ses talonnettes dans la plaie, au temps pour moi, le couteau dans la plaie comme le fit l’autre, les africains s’attendent à un propos du président américain, plus apaisé, serein et pragmatique. Néanmoins, il n’y a pas de doute possible, la fermeté sera de mise. L’actuel président américain prône le dialogue, certes, mais il faut faire très attention avec un homme vif et très à cheval sur certains principes. Beaucoup de chefs d’Etats africains tremblent déjà de peur. Le précurseur d’une nouvelle idéologie dépourvue de manichéisme, aux antipodes même des pratiques marginales du passé, désormais caduques, préfigure de la nouvelle donne à venir. Ce new-deal se soldera-t-il par un plan Marshall pour cette Afrique martyrisée, écrasée et exploitée ? Il est enfin grand temps d’agir, au lieu de faire des reproches à la Sarkozy, opinions assorties surtout de ce sempiternel titre-pillon « Moi Je » qu’on assène machinalement. Regarder l’Afrique à travers les hublots de leurs palais des mille et une nuits volants, à 6000 lieues, n’est pas la solution. Et puis, si la grandeur d’un homme se mesurait par l’entremise de ses talonnettes –suivez mon regard-, ça se saurait. Le président américain qui retrouve le sol d’une partie de ses ancêtres est probablement en terrain conquis. C’est indéniable. En terre promise aussi, mais, va-t-il pour autant faire des cadeaux à ses hôtes ? C’est moins sûr. Au Ghana, exemple de pays vraiment démocratique qui vient d’élire son nouveau président, John Atta-Mills, au pouvoir depuis le mois de janvier 2009 comme Barack Obama, le dialogue avec une Afrique libérée de ce joug dictatorial commencera. En période de crise, même du côté de chez l’oncle Sam, que peut-on réellement attendre du chef de l’Etat américain ? Pas grand chose disent les observateurs les plus avertis. Néanmoins, au-delà du symbole fort de ses origines africaines, Barack Hussein Obama est perçu simplement comme un américain, d’après la majorité des Africains. Sa venue dans l’antre politique par la grande porte, a simplement fait entrer l’homme africain dans l’histoire. Et pour cause. L’Afrique, c’est une population jeune. C’est même l’avenir du monde par toutes ses potentialités. Ici, se joue à la limite, le devenir de la planète terre toute entière. Pour paraphraser feu, le président gabonais décédé le mois dernier, Omar bongo Ondimba, « l’Afrique sans l’Occident est une voiture sans essence, et l’Occident sans l’Afrique, une voiture sans chauffeur ». C’est un constat, pas le fruit d’une imagination débordante sortie de derrière les fagots. Sans doute, Barack Obama doit avoir à cœur de sortir ce continent africain de l’ornière dans lequel il se trouve depuis les indépendances. Pour cela, il doit convaincre ses partenaires, pour que la dette des pays africains étranglés par la crise, soit annulée. Le président libyen, Mouammar Kadhafi qui préside actuellement l’UA (Union africaine) a rencontré (photo) Barack Obama et lui a probablement soufflé ces quelques mots pour résorber les maux dont souffre l’Afrique, avant son grand rush vers le Ghana. [ Allain Jules->http://allainjulesblog.blogspot.com/]

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