Base élèves : le doute !
par lhuitre
lundi 28 mai 2007
En septembre prochain, toutes les écoles de France vont être dotées d’un système de fichage informatisé des élèves du primaire au secondaire. Théoriquement, ce fichage a pour but de repérer les enfants non scolarisés et de coordonner les services. En réalité ?
Lorsqu’en novembre 2006, le directeur de notre école primaire présente le fichier Base élèves en conseil de classe, quelques questions fusent mais sans gravité, rien qui mérite en tout cas de brandir l’étendard de nos droits bafoués, une broutille, un détail technique sans nulle importance. Notre commune est l’une des communes pilotes de la nation, le système est en rodage ; il ne sera étendu à l’ensemble des communes françaises qu’en septembre 2007. Soit ! Puis suscité par les mouvements syndicaux enseignants, le doute s’installe. Quelles informations contient réellement ce fichier, qui va l’utiliser, pour en faire quoi ?
Sur le premier point, à savoir le contenu du fichier, les champs standards sont présents, nom, prénom, adresse, nom des responsables légaux, derniers établissements fréquentés. Ce qui est moins "standard" par contre, c’est l’apparition de champs sans rapport direct avec le système éducatif, à savoir le pays d’origine, la langue d’origine, la date d’entrée en France, les suivis spécialisés. Interrogés sur la question, les services de l’académie nous informent que ces champs alimentent des études statistiques. Le fichier est donc partageable, consultable par d’autres intervenants que l’IA, les écoles, et les données vont être archivées par d’autres services que ceux de l’Education nationale.
Nous en arrivons donc au second point : qui va utiliser ces informations "annexes" et pour quoi faire ? Pour répondre à cette question il faut remonter à la demande même, à la création de cette base de données. L’éducation nationale fonctionne depuis de nombreuses années sur informatique afin de gérer plus facilement les dossiers des élèves. Le système fonctionne bien. Y ont accès les personnels de l’Education nationale. Lorsque le projet de loi pour la prévention de la délinquance a été mis en route, l’idée d’assurer une prévention de proximité a émergé. Pour rappel, à la même période un rapport du député Benisti et un rapport de l’INSERM proposaient d’aborder la prévention de la délinquance dès la petite enfance à l’instar de ce qui se faisait en Grande-Bretagne d’ailleurs. D’après le rapport Benisti, l’essentiel des délinquants proviennent des familles issues de l’immigration avec une nette préférence pour les Maghrébins et les Noirs africains qui présentent visiblement à ses yeux des tares irréversibles. Ces familles qui parlent un "patois" chez eux n’offrent pas un contexte de développement humain "sain" à l’enfant et doivent pour contrebalancer ce handicap originel s’engager à ne parler que français chez eux ?... Viennent ensuite les enfants présentant des troubles comportementaux et suivis par conséquent par des spécialistes, et enfin ceux qui, non contents de cumuler ces divers handicap, ne participent à aucune activité extrascolaire. Bien, ce rapport a été remis à Dominique de Villepin et transmis, semble-t-il mais à vérifier, à monsieur notre président Nicolas Sarkozy.
Et puis voilà donc nos zélés maires de France réunis en assemblée et déterminés à lutter vaille que vaille contre la délinquance. Mais comment faire ? Surtout, comment faire plus, comment faire mieux ? Il faudra bien qu’un esprit particulièrement bien informé ait glissé ce jour-là l’idée de s’attaquer à la source même du mal... à savoir ? Je me réfère à nouveau à ces champs apparus par magie (noire) dans le fichier Base élèves et , je le répète, partageable avec les services de mairie : pays d’origine, langue parlée, activités extrascolaires, suivis spécialisés.
Aujourd’hui, chers internautes je m’interroge. Si vous me lisez, vous me donnerez je l’espère votre sentiment sur la question : le fichage des enfants de la maternelle à la fin du primaire doit-il servir à repérer au mieux les jeunes en difficulté ou à servir les desseins douteux d’apprentis spécialistes du développement humain ? Faut-il renier ses racines, sa culture d’origine pour accéder au statut de bon citoyen français ? A-t-on le droit de faire peser sur une frange de population déjà fragile la responsabilité de l’échec de l’intégration ? Ma réponse personnelle est et sera "non" ! Je ne souhaite qu’une chose, c’est que le fichier Base élèves disparaisse comme il est venu, sans tambours ni trompettes.