Bayrou 2012 (3/3) : a-t-il une chance d’être élu ?

par Imhotep
samedi 10 décembre 2011

Si on se fie à cette anecdotique déclaration de Gisbert hier lors de l'émission de France 2 (Bayrou avait une tête de vainqueur et qu'il pouvait gagner) on peut être optimiste. Si on se fie à son score d'aujourd'hui, entre 7 et 9 %, on pourrait l'être si la courbe suivait celle de 2007 qui commençait à 6 % en janvier. Cependant il n'y a strictement aucune règle mathématique en politique et il reste 5 mois environ avec un pouvoir qui use et abuse de celui-ci tant financièrement qu'en matière de temps d'antenne, de cadeaux à venir et de nombre d'élus et de ministres qui vont faire autre chose que leur boulot et augmenter la vitesse des rotatives à propagande. De l'autre il y a le PS avec une puissance de feu qui n'a rien à envier à l'UMP ayant outrageusement bénéficié des media pour les primaires et ayant un nombre considérable de relais par leurs élus tant députés que sénateurs qu'élus municipaux et maires et conseillers généraux et régionaux et leur président.

La situation de la France est pour le moins dégradée et il y a une certaine lassitude d'une partie des Français de cette guerre clan contre clan qui nous épuise et qui nous divise. On voit en Italie par exemple qu'une volonté d'union nationale se fait jour.

Bayrou va avoir un obstacle majeur qui est la presse. Elle nous rabâche toujours la même litanie, Bayrou seul et, on l'a vu hier, au programme flou. Cette presse et ses ennemis font les sourds et aussi les aveugles car ce que je vais écrire ils n'en tiendront pas compte. Bayrou lance une grande consultation qui doit se terminer fin février, début mars afin de réfléchir avec d'autres comment trouver les 100 milliards de réduction du déficit. Contrairement à ce qu'écrivent ici certains (soit par mensonge volontaire soit par ignorance) Bayrou par exemple est pour la taxation des transactions financières qui aurait pu être votée au parlement européen mais que les ancêtres politique de Mélenchon ont refusé de voter. Ce qui est une belle pierre dans leur jardin, ceux qui crient plus fort qu'un paon qui fait la roue. Ainsi quand on leur dit trois fois : ce soir je donne les grandes lignes ce sera fin février que vous aurez les détails, ces journalistes continuent à dire : c'est flou. Ils pourront le dire après février aujourd'hui c'est une attaque sous la ceinture et malhonnête qui laisse des traces. C'est-à-dire qu'au lieu d'être respectueux d'un processus commun de décision et d'en approuver la démarche ils restent figés sur une idée qu'ils aiment bien car elle est simple et correspond tant à l'image du centriste mou qui bafouille qu'ils ne veulent surtout pas la gâcher.

Bayrou part avec cet avantage d'avoir eu raison dans son analyse. Et d'avoir raison, nos bons journalistes s'en servent en fait comme d'un coin pour l'attaquer en reconnaissant du bout des lèvres qu'il avait effectivement raison. C serait un bon diagnosticien mais un mauvais thérapeute. Avant, pourtant, en 2007 c'était un imbécile qui avait tort.

Bayrou part d'un socle de 9 % et de ce constat, que plus personne ne peut lui enlever, qu'il a bien vu les choses et ce non seulement en 2007 mais aussi en 2008 et jusqu'en 2011. On le présente come ayant la tête dure et opiniâtre. Dans la situation actuelle sa traversée du désert et cette image seront, selon moi, plutôt des atouts. Il est évident que l'élection c'est aussi un comparatif avec les autres.

Sarkozy d'un côté qui a son bilan sur les épaules et des affaires au cul, de l'autre Hollande et son emportement dans des accords de coin de table et un projet assez irréaliste, et la gestion de son département dont on ne peut pas dire que ce soit une réussite. Mais ce n'est pas ici que je veux parler de ces deux candidats. Ce sera le débat de la campagne. En revanche on vient de le voir que ce soit les grands caciques de l'UMP (à mourir de rire) qui veulent Bayrou dans leur camp, Guéant, vous imaginez Guéant qui y va de son violon ? !, puis Bertrand, puis juppé, puis Le Maire et autres ministricules du centre nouveau(le Morin doit être vert de rage), que ce soit Hollande qui offre (comme s'il était déjà élu) un poste à Bayrou, on voit qu'on le considère comme indispensable à la victoire de l'un ou de l'autre. Je trouve, en revanche, beaucoup plus intéressante, humainement parlant, la déclaration d'Eva Joly qui a appuyé fortement sur la valeur qu'elle trouvait à Bayrou dans son honnêteté, sa sincérité, ses combats.

Tout ceci est loin d'être négligeable. En fait le clan Hollande et le clan Sarkozy considère Bayrou, non comme un candidat crédible pour le second tour, mais comme un supplétif pour les aider l'un et l'autre à gagner. Bayrtou est un peu de carburant pour l'une ou l'autre des fusées magistrales de ces élections. Négligeable mais indispensable. En revanche ce qu'a dit Joly est d'un impact souterrain plus fort.

Revenons à nos deux leaders. Ils ne voient Bayrou que comme le faiseur de roi qu'il faut acheter. Je ne crois pas qu'ils se rendent compte qu'en faisant cela il lui donne un élan qui pourrait les surprendre pour diverses raisons : ils coupent sioux leurs pieds à l'avance l'herbe de leurs futures critiques à son encontre ou alors cela paraîtra étrange ou faux ou ces câlineries passées comme hypocrites, en plus cela le met au centre du débat, cela le valorise non seulement parce qu'il est au centre mais parce qu'on lui donne une importance positive, à force d'être flatté par la droite, la gauche et l'écologie, certains électeurs vont quand même finir par se dire que cela vaudrait peut-être la peine de s'intéresser à lui. Si j'avais une image à donner, je dirais que l'un et l'autre sont au bord d'une fosse au fond de laquelle ils imaginent Bayrou et chacun d'un bras tente de le remonter à lui avec une corde. Et de l'autre main, laissée libre, ils se mettent des baffes avec violence. Ce que j'imagine c'est qu'ils vont se neutraliser, se diminuer, considérant Bayrou comme négligeable et plus le temps va avancer plus ils font tout à la fois se mettre des marrons et tirer sur la corde pour attirer chacun Bayrou à lui. Il arrivera un moment où les coups auront porté sur l'un et l'autre, la fatigue sur chacun et alors Bayrou se retrouvera suffisamment haut non pour dépasser les deux peut-être mais l'un des deux. Ce serait parfait si Bayrou passait devant Sarkozy.

Bayrou a-t-il donc une chance ? La vérité est que seule la mort empêche la victoire politique et que pour 2012 il n'y a d'après l'histoire vécue des dernières élections, le contexte actuel que quatre candidats (par ordre alphabétique, Bayrou, Hollande, Le Pen Sarkozy si c'était l'ordre d'arrivée ce serait une belle histoire) qui pourraient atteindre le second tour et seulement trois qui pourraient l'emporter (Bayrou, Hollande et Sarkozy), Sarkozy ne le pouvant que si c'est Marine Le Pen présente au second tour. Effectivement Bayrou a une chance de l'emporter. Alors puisque j'ai commencé par une anecdote, je vais terminer par une autre qui n'a évidemment aucun caractère scientifique ni de prédiction mais qui m'amuse. Avant-hier je suis allé au cinéma avec deux amis voir Time Out, film assez intéressant sur la notion du temps qui remplace l'argent et le fameux combat entre les possédant et les dépossédés. L'un avait voté Sarkozy au premier tour et l'autre a voté Royal. Il y a deux mois tous deux ricanaient quand on parlait de Bayrou. Avant hier soir tous deux pensaient que Bayrou pouvait gagner et disaient qu'ils voteraient pour lui. Bon allez, vous pouvez jeter vos boulets. Cette historiette m'amuse et n'a pas grande valeur statistique ni politique, mais qui sait ?

 

 
Il nous reste un peu moins de six mois pour nous débarrasser de ce pouvoir. Faisons notre Révolution en 2012, et avant si possible.
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