Bayrou gifle Chazal, comme un symbole...

par Stassin
lundi 4 décembre 2006

Bayrou est candidat, Bayrou ne s’est pas fait mollement mettre dehors sur TF1. Il a répondu à Chazal, plus que répondu, il a dit toutes les vérités, il a parlé franc, il a « giflé » Chazal avec ses mots, il a « giflé » TF1, les médias, la pensée unique, celle d’hommes et de femmes politiques qui se disent nouveaux, il a cogné le système. Il a aplati l’essai, il a construit un peu plus son statut d’homme d’Etat, en parlant au-delà des intérêts, en regardant les Français dans les yeux...

Bayrou s’est déclaré samedi matin dans la terre de ses origines. Au moment de commencer, il cherche sa femme : "Où est Babeth ?". Elle doit être là pour ce moment important, celui où il déclarera son amour à la France à qui il a voué sa personne. Cet homme a risqué de tout perdre en gagnant sa liberté de pensée, de parole, d’agir, de fréquenter... Il a résisté à la machinerie lourde, l’arme fatale UMP. Beaucoup d’UDF aux responsabilités sont partis à l’UMP, certains par sensibilité politique, d’autres, majoritaires, pour conserver leurs sièges et assises au pouvoir. Est restée, autour de cet homme, une équipe d’hommes et de femmes solidaires, un commando, comme il aime à le rappeler. Une équipe pas comme les autres, mais aussi un cheminement. Il concède avoir mis du temps à comprendre qu’on ne pouvait pas réformer le système dans le système, il confie avoir été naïf. C’est le seul.

Alors Bayrou n’a plus rien à perdre, il est libre, il pense librement, il parle librement, il expose librement sa réflexion humaniste qui s’est construite au fur à mesure de l’année. Il ne dit pas, comme Royal ou Sarkozy, qu’il est nouveau. Il assume. Il fait comme eux de la politique depuis vingt-cinq ans, parfois plus. Il ne revendique pas un visage neuf mais une nouvelle manière de concevoir les choses. Pas si nouvelle puisque l’homme qu’il admire, Henri IV, l’avait pratiquée, comme de Gaulle, Barre, Rocard, Delors... Tous ceux-là avaient compris que la France est la meilleure quand elle est rassemblée. Henri IV l’avait compris en devenant catholique pour rassembler protestants et catholiques, pour que la France reste la France, rassemblée, ensemble. Elle n’est pas pour rien, la phrase écrite sur le pupitre du candidat : "La France de toutes les forces". Elle n’est ni tranquille, ni en rupture. Il s’agit de retrouver les bases, de reconstruire, comme après une longue maladie. On revient à ses origines, à la fondation pour reconstruire, de meilleure façon et encore plus largement. François Bayrou déclare son amour à la France, dit ce qui ne va pas, ce qu’il faudrait, ce qu’il veut : il veut tout le monde, sans oublier quiconque, pour reconstruire, il veut arrêter cet affrontement, cette fausse guerre civile qui détruit pourtant si efficacement. Il a décidé de se déclarer candidat, pour rassembler en regardant les Français dans les yeux, comme l’avait proposé Giscard en 1974. On ressent une émotion, différente de celle d’un fax à la Jospin, ou d’une déclaration par journal comme Chirac ou Sarkozy. On voit les montagnes derrière, on est sur une place de la République, une place de la mairie. On le sent ému, et tous les autres aussi. On se sent loin des choses éphémères et inutiles qu’aiment les télés et les journaux nationaux. On est loin du tout-Paris, d’un certain microcosme parisien. D’ailleurs, un provincial avait écrit un commentaire à propos d’un édito-fiction d’ Arrête ton cinéma : quelque chose du genre, "c’est bien parisien, tout ça". J’ai compris bien plus tard qu’il avait raison quand j’ai entendu des gens dire leur déception, leur haine envers l’UMP et le PS entre autres, quand ces gens avaient du mal à vivre en trimant comme des fous ! Là, à l’origine, sans fard ni paillettes, sans gué-guerre, on sent le candidat, l’homme politique qui prend son envol, qui sent un destin commun, la France et le sien. Mais la France d’abord !

Ça y est, il a fini, François, et il retrouve Babeth, qui n’aime pas se montrer devant les caméras, qui ne veut pas de politique spectacle, celle qui mélange France et intimité de quelques personnes pas plus extraordinaires que les autres Français, leurs concitoyens.

.....................................................................................................................................................


On est samedi, il est vingt heures, huit heures après sa déclaration. Bayrou est au journal de TF1, venu parler au plus grand nombre. Claire Chazal présente. Il s’était déjà accroché avec elle quand il avait critiqué les accointances entre propriétaires de médias et hommes de l’Etat, qui passent ou exécutent des commandes. Dassault, qui possède Le Figaro, par exemple, vit en grande partie des commandes de l’Etat. Bouygues, qui possède TF1, également. Lagardère, idem. Et Lagardère, ami de Sarkozy, et Dassault, de Chirac. Des amitiés, pourquoi pas, des commandes avec l’Etat, pourquoi pas, mais alors pas la mainmise sur les médias pour favoriser les liens avec les anciens, actuels ou futurs gouvernants. Voilà ce que disait Bayrou, à ce propos. Chazal avait défendu comme elle le pouvait sa chaîne.

Cette fois-ci, elle commence à lui parler de Sarkozy, puis de Royal et encore de Royal. Il en a assez : parle-t-elle de Bayrou ou d’autres candidats à Sarkozy ou à Royal ? Il dit que TF1, sans citer la chaîne mais en la visant directement parmi d’autres grands médias, veut orienter les choix des Français, qu’il en a assez. Chazal rétorque que ce sont tout de même l’UMP et le PS les plus grands partis. Il répond que c’est faux, qu’aux dernières présidentielles, ils n’ont fait que 40% à peine à eux deux. Il dit qu’il ne veut plus de cette France coupée en deux par les gué-guerres de ces deux partis qui s’accusent mutuellement de la chute de la France. Chazal dit que c’e sont quand même eux qui sont toujours au second tour, et que la France a toujours été en quelque sorte divisée en deux. Il répond que la dernière fois, c’était droite contre droite. Elle dit que c’est rare. Il dit que c’est un symptôme, que c’est à ces problèmes, graves et complexes, qu’il propose une solution exceptionnelle, que ne connaît plus la France depuis de Gaulle. Il a tapé du poing sur la table, il ne s’est pas tu quand elle voulait le couper, il s’est affirmé, il a dit tout haut ce que beaucoup pensaient, loin de Paris, de la politique politicienne, il a parlé franc, honnêtement.

Il a pris aujourd’hui, en grande partie, la stature qu’il n’avait pas encore : celle d’un homme d’Etat.


Bayrou Chazale : le clash du 2 décembre 20h
(léger décalage entre le son et l’image)

Déclaration de candidature de F. Bayrou
(son très bas, augmenter le volume)

Lire l'article complet, et les commentaires