Benoit XVI : une jeunesse allemande...

par ARMINIUS
mardi 22 décembre 2009

Un livre récent revient encore une fois sur l’appartenance passée de Benoit XVI aux jeunesses Hitlériennes et sur son intention de canoniser Pie XII. Si l’on peut reprocher au pape quelques sympathies réactionnaires, encore faut-il le faire en conséquence de cause. Ce qui suit n’a pour objet que de tempérer ces accusations...

Ces dernières quarante années j’ai essayé de m’entretenir de la période sombre de l’Allemagne avec des témoins directs, apparentés à mon épouse : le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils restent très peu loquaces sur le sujet, en feuilletant le livre des photos de famille, j’ai vu mon beau-père et ses frères en uniforme de la Luftwaffe, ma belle mère en uniforme des BDM avec une « svastika » nazie en guise de bijou, appris que sa mère (née Von Schemde) avait croisé dans sa jeunesse le futur Cardinal Von Galen (dont je parle plus loin) à Dinklage (près d’Oldenburg) dont ils étaient tous deux natifs. J’ai obtenu quelques réponses à mes questions directes et malgré les apparences pu conclure que la famille allemande de mon épouse avait été dans son ensemble plutôt anti-nazi (ouf !). Même si je soupçonne mon deuxième beau-père, ancien de l’Afrikakorps, et ayant connu Rommel, d’avoir eu quelques sympathies pour le régime… Grâce à la faculté offerte par Internet de parfaire mes informations, je suis arrivé à une idée assez précise de l’Allemagne d’après Weimar.

Ma conclusion : Il n’est pas possible de reprocher au pape actuel d’avoir appartenu aux jeunesses hitlériennes pas plus d’ailleurs que de vouloir canoniser Pie XII, sans qui le nombre de victimes juives eut été encore beaucoup plus important.

Les Hitlerjugend, mouvement, fondé par Baldur von Schirach, était à l’origine une sorte de scoutisme volontaire totalement soumis à la cause nazie. Il deviendra obligatoire d’y adhérer avec la montée en puissance du régime (Gesetz über die Hitlerjugend 1936), et ce tant pour les garçons que pour le filles qui devront participer aux BDM ( Bund Deutsche Mädel*). Cela concernait les jeunes de 10 à 18 ans et la loi sera véritablement appliquée avec toute sa rigueur à partir de 1939 : ne pas s’y soumettre vous privait de tout enseignement et de toute autre activité dépendants de l’état et vous livrait à la vindicte des organisations territoriales nazis (gau, untergau) qui de longtemps avaient doublées et supplantées les organisations administratives classiques.

Donc toujours toujours en essayant de replacer l’histoire dans son contexte : l’Allemagne de 1937, ne ressemble pas à celle de 1942 et encore moins à celle de 1945 : en 1937, le régime nazi n’est pas encore frappé du sceau de l’infamie, même si les premiers camps se remplissent d’opposants (communistes, spartakistes, socialistes) le bruit des bottes inquiète, certes, mais pas au point d’empêcher les « bonnes affaires » surtout pour les Ford, Bush père et autres Kennedy etc… A l’ été 39 on voit d’ailleurs le fiston Kennedy (John) se faire dorer au soleil du Cap d’Antibes avec Marlène Dietrich et Erich Maria Remarque -coté people, les deux Kennedy font, comme E.M Remarque partie de la longue liste de ses amants

Dès 1937, pourtant, le pape Pie XI , inquiet de la montée du nazisme et de ses premiers excès, publie son encyclique :« Mit Brennender Sorge » (« Avec une brûlante inquiétude ») , le cardinal Pacelli, nonce apostolique à Berlin(le futur Pie XII) a considérablement aidé à sa rédaction . L’encyclique est lue en chaire dans toutes les églises catholiques du pays, résultat : une vive réaction de la Gestapo qui ordonne la chasse aux « curetons » ordonnée par son chef de l’époque, le sinistre Reinhard Heydrich .Devenu Pape, en 1939 , dans son encyclique « Summi Pontificatus » Pie XII récidive et condamne l’invasion de la Pologne : les persécutions redoublent et les évêques allemands le supplient d’arrêter d’attaquer le régime de front …ils savent déjà trop bien qu’on ne peut s’opposer à Hitler sans graves conséquences : dès cet instant fini les provocations et approche plus diplomatique d’un chef d’état, dont l’on découvre peu à peu l’incontrôlable monstruosité. Seul quelques évêques allemands se permettront encore quelques critiques dont, von Galen, évêque de Münster, à la popularité bien trop grande pour qu’il soit attaqué , mais comme souvent, seuls les sous-fifre( prêtres de terrain) paieront de leur vie.

Bilan : à la fin de la guerre le Pape et l’église catholique seront vivement remerciés par les autorités juives pour avoir sauvé tant de vies (beaucoup plus que toutes les autres religions réunies). Golda Meir renouvellera quelques années après ces élogieux remerciements.

En fait la polémique sur la « collaboration »du pape vient essentiellement de la publication du roman de Rolf Hochhut : « Le Vicaire »(1960) et de l’adaptation en pièce de théâtre qui la suivit (1963)

On oublie vite que ce fût une fiction, s’appuyant sur certaines réalités pour lui donner un air d’authenticité, une recette qui fait encore florès. De plus, une théorie récente- et intéressante- suppose qu’il s’agirait de riens moins que d’une commande du KGB, qui avait, en pleine guerre froide aurait eu intérêt à tempérer les tentations de soulèvement dans les pays satellites où le catholicisme était entré en résistance…on arrive ainsi à considérer un élément ayant contribué à entretenir le doute sur certains comportements de Pie XII durant la guerre : une haine viscérale du communisme… qui le lui a bien rendu !

 

*« Bund Deutscher Mädel » ( les demoiselles de la Nation)ou BDM deviendra par dérision « Bund Deutsche Matratzen » ( les matelas de la nation) ou les « Bubbi Druck Mich » (Serre-moi fort, mec) lorsqu’au cœur de la guerre certaines d’entre elles devront remonter le moral des troupes…

 

Sources : Vanity Fair Mars 2009 “Its happened at the Hotel du Cap”pour l’été 39 des Kennedy

Wikipédia Allemagne, Wikipédia Angleterre

Mémoires de famille :Von Schemde-Husmann-Uhr-Stöhr


Lire l'article complet, et les commentaires