Bibracte, une grave erreur de localisation ?

par Emile Mourey
lundi 23 novembre 2009

Mon histoire commence le 30 octobre 1981. Le général commandant la division de Dijon que j’avais connu en Algérie et qui me tenait en estime avait demandé à ce que je participe à une réunion organisée par le professeur Le Gall sur le site d’Alise-Sainte-Reine. C’était l’époque où ce site était abondamment contesté au profit d’une Alésia en Franche-Comté. Et même les deux revues militaires « Le Casoar » et « La revue historique des Armées » avaient très imprudemment publié des articles qui le mettaient en cause. Désavouant ces deux revues militaires, j’avais alors pris publiquement position en faveur d’Alise-Sainte-Reine. Le journal Le Monde l’avait mentionné dans son édition du 11.11.1981 en citant mon nom et mon grade de lieutenant-colonel.

Pourquoi le professeur Le Gall ne m’a-t-il pas écouté quand, en particulier, j’ai tenté de lui expliquer que l’armée de secours gauloise ne pouvait avoir attaqué le mont Rhéa mais la montagne de Bussy ; qu’il n’y a que cette montagne qui présente une pente légèrement défavorable pour l’installation des camps romains comme le spécifie César ? Pourquoi n’a-t-on pas prêté attention à mes propos quand, dans le repas qui a suivi, j’ai mis en doute l’identification de Bibracte au mont Beuvray ? Pourquoi, après une conférence où j’ai présenté mes travaux à ma société d’Histoire et d’Archéologie - où j’ai été d’ailleurs très applaudi - pourquoi, dis-je, le comité directeur m’a-t-il désavoué en m’envoyant une lettre personnelle ? Pourquoi m’a-t-on écarté par la suite du débat ?
 
 En janvier 85, par décision du ministre de la Culture Jack Lang, était créé le conseil scientifique du mont Beuvray, conseil réunissant les plus éminents spécialistes européens de l’époque celtique… On écrit : Les fouilles laissent augurer d’importantes découvertes (extraits du journal de Saône et Loire. Idem pour les extraits et résumés suivants).
 
18.9.85. Le Président de la République sur les traces de Vercingétorix. "Vive l’Histoire et vive l’union”. Appel à la cohésion nationale. Le Mont-Beuvray est érigé en site national. L’Etat consacrera pour les fouilles du Mont-Beuvray une centaine de millions de centimes par an pendant une dizaine d’années. Inauguration par le Président de la République d’une plaque commémorative “Ici s’est faite l’union des chefs gaulois autour de Vercingétorix”. En présence de J. Lang, P. Joxe, M. Carraz, M.Bérégovoy, Mme Edwige Avice et de très nombreuses personnalités. Repas de 700 couverts. Sur chaque bouteille, étiquette-parchemin en lettres celtes : « La cuvée du Père François ».
 
1.12.89. Emile Biasini, secrétaire d’Etat aux grands travaux sur le site du Mont-Beuvray. Le budget est estimé à 200 millions dont 80% pris en charge par l’Etat.
 
6.6.91. Dans un réflexe civique, pressentant que le Président de la République veut lancer un message à la jeunesse européenne depuis le mont Beuvray où il est annoncé, j’écris au ministre de la Culture (sous-direction de l’Archéologie) pour le mettre en garde. Je propose que le Président de la République, s’il se rend au mont Beuvray, se contente d’y observer une minute de silence jusqu’à ce que l’horizon s’éclaire. Je rends compte que j’ai découvert le véritable site de Gergovie. Cette sous-direction me répondra le 4/3/93 que mon dossier a bien été transmis aux autorités compétentes.
 
15.12.92. Après de très nombreuses difficultés, je suis arrivé enfin à publier mon premier ouvrage en auto-édition, sans obtenir aucun des soutiens que j’avais sollicités. Je ne vois pas d’autres solutions pour me faire entendre. Cela coute cher mais tant pis. A partir de cette date-là, je vais distribuer gratuitement mes ouvrages en grande quantité, à la presse, à de nombreuses personnalités, députés et autres. Le journal de Saône-et-Loire, probablement à la suite d’une réunion de son conseil de rédaction, décidera de ne pas ouvrir le débat.
 
1.3.93. J’envoie mon "Histoire de Bibracte, le bouclier éduen" au ministre de l’Education Nationale (C.N.R.S.), M. J. Lang, ainsi qu’au ministre de la Culture (sous-direction de l’Archéologie), également M. J. Lang. On me répond que mon ouvrage a été placé dans la bibliothèque de ce service.
 
3.3.94. Bibracte : dernière bataille d’historiens. « Malgré le désir du lieutenant-colonel Mourey d’organiser une causerie à Autun, la société éduenne n’entend pas l’inviter, préférant des historiens au profil scientifiquement plus rigoureux à l’image de MM. Goudineau et Peyre... » Je suis réduit au silence, on ne veut pas m’entendre.
 
A partir de cette date jusqu’à ce jour, je n’aurais de cesse d’envoyer des courriers argumentés et explicatifs - ce que mes adversaires me reprochent aujourd’hui - faisant intervenir une dizaine de députés de la droite à la gauche, suscitant des réponses des ministres de la Culture en personne, personnelles et publiques, encourageantes ou langue de bois, jusque dans le Journal officiel. Le Progrès de Lyon et le Bien public de Dijon publieront, pleine page, des articles qui me sont très favorables mais sans suite. En revanche, FR 3 Bourgogne me désavouera et le CSA me refusera le droit de réponse que je sollicitais.http://www.bibracte.com/ et http://mobile.agoravox.fr/tribune-libre/article/bibracte-au-mont-beuvray-mme-la-33531
 
20.04.95. J’envoie mon deuxième ouvrage "Histoire de Bibracte, l’épée flamboyante" au président de la République, François Mitterrand , qui me remerciera (j’ignore si on lui a remis le premier que je lui avais adressé par la voie hiérarchique. C’est pourquoi j’envoie celui-ci directement à son adresse personnelle).
 
15.05.95. Le président de la République accorde au Monde une interview (édition du 29 août), dans laquelle il met en exergue l’importance de l’Histoire, véritable culture de l’homme politique, mais il rejette sur l’historien la responsabilité de l’interprétation.
 
Voilà ! Je n’ai fait ici qu’un très très bref résumé de l’affaire. Vouloir tout dire ne tiendrait, ni dans un simple article, ni même dans un livre. Jusqu’à son dernier jour, mon épouse sera mon principal soutien, ma collaboratrice dévouée et irremplaçable.
 
Quels sont les principaux responsables de l’erreur de localisation, selon moi, de Bibracte ? Responsables surtout d’avoir égaré un président de la République sur un site qui n’est pas le bon. C’est tout de même quelque chose de particulièrement grave.
 
Je vois deux responsables. Le premier est M. Christian Goudineau, professeur au Collège de France, titulaire de la chaire des Antiquités Nationales. Il n’ignore pas ma contestation. Dans ses nombreux ouvrages et articles, il ne cesse de fustiger l’historien amateur. Il ne me nomme pas mais c’est tout comme. Le deuxième grand responsable est M. Michel Clément, l’actuel directeur du service du patrimoine sous la coupe duquel se trouve la sous-direction de l’archéologie. M. Michel Clément était directeur de la direction régionale des affaires culturelles en Bourgogne en même temps que M. Goudineau était président du conseil scientifique du mont Beuvray, et cela, au moment où l’opération mont Beuvray montait en puissance. Comment se fait-il que ces hauts responsables n’aient fait appel nommément, ni à des traducteurs qualifiés pour revisiter le texte de César, ni à des militaires compétents pour retrouver le champ de bataille des Helvètes, puisque c’est à partir de ce champ de bataille qu’on peut déterminer la position de Bibracte en tenant compte des distances que donne César ? http://www.bibracte.com/articles_multipage/piece_jointe_1.html
 
Comment se fait-il qu’ils n’aient pas hésité un seul instant, qu’ils n’aient pas été traversé par le moindre doute alors que déjà, sous Napoléon III, des latinistes confirmés avaient prouvé en citant les textes antiques qu’il était impossible que Bibracte se trouve au mont Beuvray (Bibracte et le mont Beuvray par C. Rossigneux) ? Comment se fait-il que ces hauts responsables, malgré tous mes courriers, n’aient pas reconsidéré leur position, entrainant à leur suite les meilleures spécialistes du monde celtique, diffusant dans le monde entier ce qu’il faudra bien reconnaitre un jour comme une erreur de localisation ?
 
En 2003, à ma demande, M. Perben, ministre, est intervenu auprès de M. Aillagon, ministre de la Culture, lequel a demandé à M. Michel Clément d’étudier avec la plus grande attention le problème de la localisation de nos anciennes capitales gauloises. A ce jour, à ma connaissance, M. Michel Clément n’a toujours pas répondu.
 

 

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