Bilan de l’élection présidentielle

par Jean Dugenêt
lundi 23 mai 2022

Macron, le candidat des milliardaires, vient d’être réélu alors que seulement 1 électeur sur 5 avait voté pour lui au premier tour (20,07 % des inscrits). Au second tour, il perd près de 2 millions de voix par rapport aux élections de 2017 où il était aussi confronté à Marine Le Pen. C’est une bien morne réussite car la vraie victoire fut celle de l’abstention qui bat tous les records à part le match Pompidou-Poher de 1969 qui était un choix entre « bonnet blanc » et « blanc bonnet ».

Au second tour, la victoire fut en effet celle du camp des « Ni Le Pen ni Macron ». L’abstention, les votes blancs et les votes nuls représentent 34,20 % des inscrits. Ce fut d’ailleurs un thème de mobilisation largement suivi notamment chez les étudiants. L’essentiel était en effet joué à l’issue du premier tour. Tous les candidats du mouvement ouvrier étaient éliminés parce que les traitres l’ont voulu ainsi. Ils étaient tous d’accord pour qu’il n’y ait pas d’unité des partis de la classe ouvrière. Pourtant, Mélenchon pouvait facilement être au deuxième tour et donc probablement être élu Président de la République. A l’évidence, il ne le voulait pas. Regardons les résultats du premier tour en donnant le pourcentage des bulletins exprimés :

L’AGIMO a fait campagne pour qu’il y ait un candidat unique du mouvement ouvrier mais nous voyons qu’il n’en fallait pas tant que cela pour que Mélenchon soit élu. D’un point de vue uniquement arithmétique, c’est-à-dire sans tenir compte de la dynamique de l’unité, nous voyons qu’une simple alliance avec le PCF comme en 2017 aurait suffi (21,95 + 2,28 = 24,23). Une alliance avec le seul PS aurait également été suffisante (21,95 + 1,75 = 2,70). Une alliance avec le NPA et LO aurait aussi été suffisante (21,95 + 0,77 + 0,56 = 23,28).

Les milliardaires avaient besoin de la division des rangs ouvrier pour remettre leur poulain en selle. La corruption des élites est certainement leur principale méthode. Nous nous souvenons de la rencontre entre Macron et Mélenchon sur les quais de Marseille. « Mélenchon n’est pas mon ennemi » avait dit Macron. En effet, ils savent qu’ils sont fondamentalement dans le même camp. Mais la corruption de l’opposition ne se limite pas à cela. Nous avons vu que le NPA ne pouvait pas, avec ses propres forces, rassembler les 500 parrainages nécessaires pour présenter Poutou. Les milliardaires ont décidé, via Bayrou et Macron, de lui faire cadeau des parrainages manquants. De fait Poutou a assumé son rôle de diviseur des rangs ouvriers. Il a accepté ce cadeau et n’a pas dit un mot au cours de sa campagne en faveur de l’unité. Aucun appel à un désistement en faveur de Mélenchon, ou d’un quelconque candidat unique du mouvement ouvrier, et il n’a surtout pas donné l’exemple.

Les milliardaires ont préféré privilégier la candidature de Poutou plutôt que celle d’Anasse Kazib. Celui-ci n’a pas obtenu son quota de parrainages et n’a donc pas pu être candidat. Je lui avais envoyé une lettre ouverte au nom de l’AGIMO. Il n’a pas répondu. Il nous prend sans doute pour quantité négligeable. Peu importe. La question posée est celle de l’orientation que doit avoir une organisation révolutionnaire lors de cette élection. J’avais proposé aux militants de Révolution Permanente de leur apporter notre soutien s’ils se prononçaient pour un candidat unique des organisations ouvrières. Ils auraient pu ainsi avoir les parrainages nécessaires sans être compromis, comme Poutou, avec les réactionnaires. De nombreux maires de petites villes et de villages étaient favorables à cette ligne d’un candidat unique « de gauche » comme disent les journalistes. Nous étions disposés à laisser momentanément de côté l’importante question de l’UE sur laquelle nous ne sommes pas d’accord. Imaginez l’impact qu’aurait pu avoir le désistement d’Anasse Kazib interpelant en direct à la télévision les autres candidats du mouvement ouvrier pour leur demander de se désister avec lui en faveur de Mélenchon ou d’un autre candidat unique. Les milliardaires n’ont pas pris ce risque.

Maintenant la campagne est lancée pour les législatives. Mélenchon qui ne voulait pas être président de la République est candidat pour être premier ministre. En d’autres termes, dans une grande quantité de circonscriptions, des accords sont passés pour avoir un unique candidat de « la gauche ». Ce qui n’était pas possible pour les présidentielles est maintenant possible pour les législatives. Ne nous y trompons pas, c’est une politique parfaitement cohérente pour Mélenchon. Il se prépare à mener la politique réactionnaire de l’UE avec tous les plans d’austérité car maintenant il pourra expliquer que c’est de la faute à Macron s’il est contraint par l’UE. Il ne sera pas question de quitter l’UE. Il a déjà repris tous ses discours ambigus sur ce sujet. Il nous prépare déjà la politique que Tsipras a appliquée en Grèce.


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