Blanchiment de la peau pour ressembler aux occidentaux ?

par gruni
lundi 22 janvier 2018

 

Irrésistible attirance vers la blanchitude, comme un modèle qu'il faudrait copier coûte que coûte, malgré les risques de cette pratique. Avec le blanchiment de peau ou son éclaircissement, jusqu'à la dépigmentation, la beauté de la femme noire qui foudroyait Léopold Sédar Senghor semble s'effacer pour se rapprocher des critères occidentaux de la beauté . Mais les femmes noires ne sont pas les seules touchées par ce besoin obsédant de gommer leur couleur naturelle, les hommes noirs, mais aussi la femme asiatique, voudraient également changer de couleur de peau.

Effet de mode, complexe, motivation sociologique ou seulement esthétique, le phénomène du blanchiment de peau en Afrique date des années 60. 

"tchatcho" au Mali ; « bojou » au Bénin, « xeesal » au Sénégal et « kobwakana » ou « kopakola » dans les deux Congo."

L'avis de Ferdinand Ezembe, psychologue à Paris spécialisé dans la psychologie des communautés africaines - 

« Cette attitude des noires par rapport à la couleur de leur peau, procède d'un profond traumatisme post-colonial. Le blanc, symbolisé par sa carnation, reste inconsciemment un modèle supérieur. Pas étonnant dans ces conditions qu'un teint clair s'inscrive effectivement comme un puissant critère de valeur dans la majeure partie des sociétés africaines. D'ailleurs, ce sont les pays aux passés coloniaux les plus brutaux qui affichent le plus une attirance pour les peaux claires. Dans les deux actuels Congo, même les hommes s'y mettent et travaillent, comme leurs compagnes, à parfaire leur teint. Il faut même rajouter à cela, l'influence majeure du christianisme en Afrique. La représentation exclusivement blanche des grandes figures de la bible a forcément affecté les peuples noirs dans leur inconscient. Cette idée est renforcée par l'allégorie des couleurs dans l'univers chrétien, basée sur des oppositions entre le clair et l'obscur, les ténèbres et les cieux, où le noir s'oppose toujours à la pureté du blanc. Ce phénomène est si profond qu'il va même plus loin que le simple blanchiment de la peau. On remarque beaucoup de femmes Africaines qui se défrisent les cheveux, qui portent des perruques pour avoir les cheveux lisses comme les occidentaux. Le complexe est là. C'est un peu facile de dire qu'un noir qui se teint les cheveux en blond n'ait agi que par une simple mode. Ce qu'il y a, c'est que les africains n'assument pas des attitudes qui sont souvent inconscientes. Toutes les sociétés noires subissent le joug d'un culte de la blancheur. Les Africains ne se sont pas". 

Pour lui apporter la contradiction, un homme noir qui se fait blanchir la peau et pour qui le traumatisme post-colonial n'est pas l'explication...

« Il ne s'agit pas de ressembler aux Blancs, de me sentir supérieur. Je fais ça parce que ce teint me plaît. Quand un Blanc se rend dans des centres de bronzage, ce n'est pas pour ressembler à un Noir ni pour prendre la place du colonisé ! »

« Je veux que l'on me laisse tranquille. Je connais les risques mais pour l'instant je n'ai pas envie de stopper la dépigmentation. Inutile de m'infantiliser. Cette décision m'appartient »

Après tout, qui sommes-nous pour condamner ces gens qui se sentent mal dans leur peau, et qui peut-être un jour soigneront leurs cicatrices et autres éruptions cutanées, voire même un cancer, au frais de la collectivité. Idem pour les visages pâles brûlés par les rayons UV. Tout cela pour le plus grand profit des industries cosmétiques et autres magazines ou publicistes qui vendent sur papier glacé la clarté en tube, pilules ou pommades. Jusqu'où irons-nous dans cette recherche d'une beauté calibrée, imposée par des gourous de la mode ou du culte du corps, ou encore par des idées reçues.

« Femme nue, femme noire Vêtue de ta couleur qui est vie, De ta forme qui est beauté J'ai grandi à ton ombre ; Et voilà qu'au cœur de l'Eté et de Midi, Je te découvre, Terre promise, du haut d'un haut col calciné Et ta beauté me foudroie en plein coeur, comme l'éclair d'un aigle Femme nue, femme noire Je chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l'éternel Avant que le destin jaloux Ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie ».
 

Léopold Sédar Senghor 

 

http://www.grioo.com/info3019.html

http://www.slate.fr/story/156601/depigmentation-peau-hommes

 


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