C’est qui, l’patron ?

par Jules Elysard
mercredi 18 avril 2018

Le petit Macron a voulu montrer qu’il était grand. Le pauvre ! Bourdin n’a pas hésité à lui montrer qui était le taulier en lui demandant en fin de soirée : «  N’êtes-vous pas dans une illusion puérile de toute puissance  ?  »

https://www.huffingtonpost.fr/2018/04/16/jean-jacques-bourdin-et-edwy-plenel-racontent-lapres-interview-avec-emmanuel-macron_a_23412010/

Pris au dépourvu, le souverain crut s’en sortir en lançant un : «  Je ne crois pas à la toute-puissance, je crois à la démocratie pleine et entière  ». Mais il n’aura trompé personne.

Là comme ailleurs au cours de cette soirée, il n’aura convaincu que les convaincus : ceux qui pensent qu’il n’y a aucune alternative en dehors de celle qu’il représente et à laquelle ils adhèrent depuis longtemps.

Aussi, ils n’auront eu de cesse depuis sa prestation de louer son courage, sa combativité, face à deux insolents qui ne lui donnaient pas du « Monsieur le Président ». A noter que cette façon désinvolte, voire discourtoise, de s’adresser à lui a d’abord été soulignée par des opposants de droite qui ont une dévotion extrême pour la fonction présidentielle.

Certes, nous n’étions pas invités à un Tribunal des Flagrants délires où Pierre Desproges l’aurait salué en ces termes : « Mon Président, mon chien ». C’était une tribune où s’agitaient trois tribuns.

Des révélations sont peut-être à venir sur les dessous de cet entretien. Etait-il prévu de l’apostropher en ces termes : « Emmanuel Macron »  ? Toujours est-il que le président en exercice de « pédagogie » ne s’est pas plaint officiellement du traitement qui lui a été infligé. Quant à ses contradicteurs, ils sont aussi très contents de leurs prestations respectives. Certes, ils avaient des réputations à défendre. Bourdin a été à la hauteur de la sienne. Pleynel aurait dû se faire représenter tant il a ramé. Quant à monsieur Macron, je l’ai trouvé, comme souvent, agité et très bavard. Bien sûr, il était la vedette, mais j’ai bien ri lorsque Bourdin a voulu l’interrompre sans formule de courtoisie : il a dû rester en suspend après un « Emmanuel »... Celui-ci continuait de développer sa pensée complexe.

 

Je vais ignorer ici cette pensée complexe pour m’arrêter à certains mots employés par lui, dont on ne sait s’ils sont des lapsus, des créations littéraires, voire des innovations sémantiques dont est coutumier le monde du management.

1) « Je vais toujours au conflit » : des commentateurs ont décelé là un lapsus peut-être apparent. Plus tard, un peu fatigué de la situation où il s’était mise, il dira sans ambages : «  Vous n’êtes pas des juges, vous êtes des intervieweurs, je suis le président de la République, et nous sommes dans un débat démocratique."

2) A un réquisitoire de Plenel, il répondra : «  C’est une question ou un plaidoyer  ? c’est sans doute son inconscient qui parlait là.

3) « Impuissanter » serait une création littéraire. Mais que dire de « débandence » ou « débendance » ? Ca m’a rappelé furieusement le débat de 2012 où, Hollande reprochant à Sarkozy son « impuissance », celui-ci lui demanda d’un air affligé de rester poli.

4) Enfin, il y a ces mots d’Audiard que le jeune Macron aime à placer depuis quelques jours : les « professionnels du désordre ». Le film intitulé Bon baisers... à lundi date de 1974. Il n’était pas né, le pauvre petit. Mais son épouse ou ses conseillers auraient dû savoir que, dans ce film, il est question de ballets roses. La séquence ci-dessous est évocatrice : Bernard Blier y répond à des calomnies répandues par Jean Carmet et Maria Pacôme (son épouse) en rajoute.

- Heureusement, les p’tites ont témoigné en ma faveur. Je suis sorti du bureau du juge la tête haute.

-Mais la queue basse...Les parents t’attendaient dehors. Il a fallu te dégager...

- Quelques énergumènes... des professionnels du désordre.

https://www.huffingtonpost.fr/2018/04/16/emmanuel-macron-a-encore-employe-cette-expression-de-michel-audiard-pour-evoquer-les-facs-bloquees_a_23412104/

https://www.youtube.com/watch?v=HYmyhGD8hLk

Voulait-il parler, en réalité, des « révolutionnaires professionnels » chers à Lénine ?[i]

 

Conclusion provisoire.

Le jeudi 12, le souverain s’invite dans une école primaire pour se servir un Pernaud, lui qui avait été à l’école d’un Ricœur. Le dimanche 15, il croit affronter deux opposants politiques et une presse complaisante le conforte dans cette illusion. Lui-même donc semble ignorer des opposants à l’Assemblée, sauf ceux de la France Soumise dont il conteste la légitimité. Ce mardi 17, il se fait tancer par un député belge.

Pense-t-il avoir fait bouger les lignes depuis qu’il est à l’Elysée ? Les lignes de coke ? Il ne lui en restait plus aujourd’hui pour humilier cet insolent d’un pays voisin.

 

 

[i] « il faut un comité de révolutionnaires professionnels, composé de gens - ouvriers ou étudiants, peu importe ! - qui auront su faire leur éducation de révolutionnaires professionnels. »

Lénine, Que faire ? (1902)

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