Ça y est : la Grande-Bretagne va commencer à « libérer l’Europe ». Ouf !

par VICTOR Ayoli
mercredi 29 mars 2017

Peut-on jeter la pierre aux Anglais de vouloir sortir de cette Europe de la déception ? Ils ont au moins le courage de poser la question à leur peuple et son gouvernement, en actionnant aujourd’hui le « chapitre 50 » respecte le verdict des urnes, contrairement à nous, qui avons laissé un président tricheur se torcher sans vergogne avec la victoire du « Non » à la constitution européenne.

Cette Europe est exécrable. C’est vrai. Parce qu’elle « oblige » à vivre ensemble des peuples qui avaient la « désagréable » habitude de s’entre-massacrer tous les quarts de siècle ? Quel fanatique du « frexit » pourrait dire ça ? Parce que sans l’Europe, aussi imparfaite soit-elle, la désintégration de la Yougoslavie il y a quelques années aurait dégénéré en un nouveau carnage entre France et Allemagne. La paix, la PAIX entre ces deux frères ennemis vaut tous les désagréments.

L’Europe est, pour cela, trop précieuse pour qu’on la rejette. Et le « brexit » est une chance formidable : débarrassée du boulet britannique, l’Europe – actuellement massivement rejetée par les peuples qui la composent – peut entamer sa refondation autour d’u noyau restreint : les fondateurs plus les nations ibériques.

Ne rêvons pas, ce n’est pas demain que l’on aura une armée commune ce qui impliquerait de donner le bouton de notre force nucléaire à un Espagnol, un Italien, un Belge, un Allemand… Mais on peut avoir, rapidement, une diplomatie sinon unique du moins largement concertée. Et si on veut vraiment la relancer, on doit avoir rapidement une organisation sociale, des règles fiscales compatibles sinon communes. Parce que c’est de là que vient le rejet de l’Europe. Cette clause qui exclut le social et la fiscalité des règles communes a été imposée par les Anglais. C’est d’elle que découle les pratiques de rufians du Luxembourg, de l’Irlande, des Pays-Bas.

Refonder l’Europe c’est avant tout abroger cette clause scélérate, ainsi que le système des travailleurs détachés tout en laissant s’épanouir séparément la culture, le mode de vie, la langue évidemment, l’éducation. Ceci impliquant une prise de distance avec les « amis » et « alliés » étasuniens.

Faisons un petit retour en arrière. À l’époque de la création du Marché Commun, la Grande-Bretagne a tout fait pour le contrer, notamment en créant parallèlement une « zone de libre-échange » avec quelques pays de l’Europe du Nord. Mais les milieux d’affaires britanniques, assistant impuissant au rapide développement économique du Marché Commun sans en profiter ont poussé les politiques à demander leur adhésion.

De Gaulle - qui les connaissait bien - s’est en son temps farouchement opposé à leur entrée, en 1963 puis en 1967. Pour des raisons stratégiques : il avait compris que la Grande-Bretagne serait le cheval de Troie des États-Unis. Ce en quoi, là encore, sa vision était pertinente. Mais Rothschild-Pompidou, à la solde la City de Londres, leur ouvrit les portes et, après deux ans de négociations, la Grande-Bretagne adhéra à l’Europe en 1972, amenant dans ses bagages l’Irlande et le Danemark.

La Grande-Bretagne s’est tout de suite opposée à la seule réalisation européenne tangible, la politique agricole commune. Et le bordel européen a commencé…

Souvenons-nous, en 1979, de Margaret Thatcher réclamant, telle une virago : « I want my money back ! » Et obtenant un chèque annuel de restitution de tout ce que la Grande-Bretagne verse au budget de l’Europe. Et ça dure toujours !!! De même, Thatcher s’opposa aux tentatives de Jacques Delors d’avancer vers une certaine fédéralisation, vers une Europe intégrée d’États-Nations.

Souvenons-nous de Leon Brittan, nommé en 1989 commissaire européen à la très sainte « Concurrence ». Ultralibéral assumé, cette brute a tout fait pour donner le pouvoir aux multinationales étasuniennes et européennes. Il est à la source d’un lobby international regroupant les multinationales, le TABD (dialogue économique transatlantique), l’ancêtre de TAFTA.

Souvenons-nous de John Major qui, en 1990, proclamait que « le succès économique de la Grande-Bretagne dépend de ses coûts sociaux bas, pas de chapitre social et pas de salaire minimum ». Refusant l’application d’une des rares directives sociales de la Commission européenne, concernant une limitation du temps de travail à 48 heures et 3 semaines de congés payés, il fusilla toute tentative d’Europe sociale.

Souvenons-nous aussi de Tony Blair, le caniche de Washington, fidèle soutien de Bush dans son invasion de l’Irak et donc, à ce titre, coresponsable du foutoir actuel au Moyen-Orient. Il aurait sa place comme accusé devant le tribunal de La Haye, tout comme Sarkozy, Obama et évidemment tous les Bush…

C’est une constante de la politique extérieure britannique, lorsqu’elle met le pied dans une organisation, la Grande-Bretagne n’a qu’une chose en tête : la dominer et la façonner selon ses seuls intérêts ou sinon la faire capoter. Le premier terme de l’alternative n’étant pas réalisable, il fallait donc couler l’Europe, la faire échouer en tant que puissance politique, diplomatique, militaire. Ceci évidemment en étroite concertation avec les États-Unis.

Comment ?

D’abord en poussant à un élargissement sans frein, et le plus rapidement possible. Et ça a été l’intégration catastrophique de tous les pays de l’Est… 28 États dans une organisation où les décisions se prennent à l’unanimité ! Un « machin » rigoureusement ingouvernable, donc paralysé. C’est ce qui se passe actuellement. Et que serait-ce si on intégrait la Turquie ! Aux fous !

Ensuite freiner, par tous les moyens, toute avancée vers une plus grande intégration fédéraliste. Puis influer pour ouvrir cette Europe passoire à tous les vents d’une « mondialisation » façonnée par et pour les États-Unis (et leur cheval de Troie britannique).

Puis vint Maastricht et la création de l’Euro. Ce sont les Britanniques qui ont lutté farouchement, et avec succès, pour que la fiscalité et le social soient exclus des lois communes européennes. C’est donc à eux que l’on doit la concurrence sauvage entre pays vers le moins-disant fiscal et social. C’est à cause d’eux que des pays sans scrupule comme le Luxembourg, l’Irlande et les Pays-Bas ont mis au point des mécanismes exploitant cette faille et livrent l’Europe aux appétits sans frein des multinationales. C’est à cause d’eux que celles-ci ne paient pas d’impôts.

Quant à l’euro, non seulement ils n’y sont pas entrés, mais ils en profitent outrageusement grâce à la puissance financière de leur nid de banksters qu’est la City…

Ce ramdam autour de la sortie de la Grande-Bretagne cache le véritable problème de l’Europe devenue une colonie allemande. Ceci ne l’oublions pas, à cause de la faiblesse et du renoncement politique de la France. Frau Merkel à la baguette mène l’orchestre et la danse européenne, mais avec une musique exclusivement allemande. Avec des effets désastreux pour les nations de l’U.E. sauf… pour l’Allemagne.

Son économie est prospère ? Oui mais elle est basée sur l’exploitation éhontée de la main-d’œuvre des ex-pays de l’Est, sous payée, supportant des conditions de travail « à la chinoise ».

Elle exporte ainsi ses produits industriels avec le label « made in Germany » alors qu’ils sont souvent faits ailleurs, Tchéquie, Hongrie, Roumanie, etc. et seulement assemblés voire juste étiquetés en Allemagne.

Elle fout en l’air l’industrie laitière et l’élevage des autres pays européens, en industrialisant l’agriculture, exploitant là encore la main-d’œuvre détachée de ses marches de l’Est.

Ses décisions en matière de politique internationale sont catastrophiques, comme toujours lorsqu’elle se laisse griser par sa puissance économique.

Ainsi elle a étranglé et humilié la Grèce avec une brutalité et une morgue qu’on croyait rangées aux poubelles de l’Histoire.

Ainsi elle a ouvert toutes grandes, avec une effarante stupidité, les portes de l’Europe à une immigration sans limite… pour ensuite faire marche arrière.

Elle est allée (Frau Merkel) négocier la gestion des immigrés du Moyen-Orient - de sa propre initiative sans mandat ni même concertation de ses partenaires européens - avec le dictateur Turc Erdogan qui s’est fait une joie de lui imposer ses diktats.

Elle négocie avec la Chine ses seuls intérêts, s’implique en Ukraine comme un toutou docile des Yankees, donnant toutes facilités à l’Otan pour provoquer le voisin Russe, elle pousse à la roue pour signer au plus vite l’horreur économique qu’est le traité Tafta.

Mais elle se garde bien de s’impliquer dans les problèmes du Moyen-Orient et de l’Afrique, laissant la France s’épuiser par son effort militaire bien solitaire au profit pourtant de toute l’Europe.

Qui peut faire face à cette Allemagne à volonté hégémonique ? Comme le montre l’Histoire, seule la France est en mesure de le faire. Dès lors, l’avenir de l’Europe dépend en grande part de nous. Encore faut-il que nous le voulions et donc que nous nous débarrassions de cette caste politique ayant amplement prouvé son incompétence, sa lâcheté, sa cupidité. Dans quelques semaines nous aurons cette possibilité. Il s’agit de ne pas la laisser passer en se réfugiant derrière un « votutile » imbécile.

La victoire du « Brexit » peut être ce coup de pied dans la fourmilière qui permettra de rebattre les cartes.

 

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