Cachez-moi ce Gaulois que je ne saurais voir !

par Emile Mourey
vendredi 31 juillet 2009

Le ministre de la culture et de la communication a pour mission de rendre accessibles au plus grand nombre les oeuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France, d’assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel, de favoriser la création des oeuvres de l’art et de l’esprit et de développer les pratiques artistiques (décret n° 97-713 du 11 juin 1997).


C’est très exactement dans cet esprit qu’en tant que modeste citoyen, je cherche à ouvrir un débat sur ce que les Gaulois nous ont laissé en héritage, un héritage à mon sens bien mal compris. Auteur de sept ouvrages publiés et de 91 articles sur Agoravox, il m’a fallu commencer par dénoncer, arguments et preuves à l’appui, l’incroyable erreur de la localisation de Bibracte au mont Beuvray dont je dis qu’il n’est que le site de Gorgobina, ville boïenne dont parle César. En effet, si l’on traduit correctement les Commentaires sur la guerre des Gaules, la localisation de Bibracte s’impose à Mont-Saint-Vincent, au centre de la Bourgogne du sud. Cela fait des années que je le dis et que je le proclame sans que jamais personne ne vienne contredire, ni ma traduction, ni mon interprétation du texte de César.
 
Question : Que Bibracte ait été au mont Beuvray ou à Mont-Saint-Vincent, cela modifie-t-il notre vision de la Gaule antique ?
Réponse : Cela change tout car c’est la référence par excellence. En effet, il faut choisir : ou bien une Gaule plus ou moins chevelue, avec quelques rares agglomérations ressemblant à la localité relativement récente et toute spartiate de Gorgobina/mont Beuvray, ou bien une Gaule pré-médiévale, riche de cités rayonnantes, parsemée de petites villes fortifiées comme le Mont-Saint-Vincent.

Entre le mont Beuvray et le Mont-Saint-Vincent, les archéologues français ont fait le mauvais choix, en totale contradiction avec les textes antiques. Et même aujourd’hui jusqu’à l’absurde, car ils se trouvent contraints d’imaginer, en dépit du bon sens et sans aucune justification, le surgissement soudain et irréaliste dans notre pays de grandes villes dites romaines dès le siècle d’Auguste alors que tout indique une évolution lente et continue du paysage urbain gaulois.
Conséquence : il serait intéressant de montrer aux touristes étrangers nos vieilles forteresses gauloises, les quelques vieux temples qui se cachent dans des églises, nos antiques villages perchés sur leur hauteur… Non ! On y a systématiquement planté le drapeau gallo-romain ou celui de la féodalité franque.
 
I. Mais qui commande donc à l’archéologie française ?
 
Eh bien, contrairement à ce qu’on pense, ce n’est pas la Directrice de la Sous-direction de l’Archéologie auprès du ministre de la Culture mais le représentant du Collège de France, titulaire de la chaire des Antiquités Nationales. Quant un problème se pose, c’est à lui que (la) ministre s’adresse (JO du 2/07/2001, page 3835). De même, les archéologues des Directions régionales des affaires culturelles. Cette autorité a le privilège royal et publicitaire sur les autres auteurs d’écrire et d’enseigner au bon peuple de France la recherche en train de se faire ainsi que l’avantage de ne pas avoir à répondre aux questions des représentants de la nation. Le collège de France est en effet une survivance de la royauté qui n’a de compte à rendre qu’à lui-même.
 
II. Voyons d’un peu plus près comment fonctionne cette technostructure archéologique ?
 
Affaire Lutèce. Ça part comme une fusée dans un article du Monde. Les archéologues auraient retrouvé la ville de Lutèce à Nanterre. Matthieu Poux est pour, Jean-Louis Brunaux contre. Où diable se trouve la « Lutèce gauloise » ? « Sincèrement, je n’en sais rien », répond Christian Goudineau, professeur au collège de France, titulaire de la chaire des Antiquités Nationales.
Que dit le militaire (un peu latiniste, auteur du présent article) ? L’oppidum (refuge) de Lutèce ne peut être que l’île de la cité. La ville de Lutèce ne peut être qu’à l’emplacement où l’on situe la ville dite gallo-romaine, de l’autre côté du fleuve, sur la rive gauche. César confirme si on le traduit correctement.
Que dit l’archéologue ? Négatif ! On n’a trouvé aucune trace archéologique gauloise à l’emplacement où s’est installée la ville romaine (les Gaulois ne construisaient qu’en bois).
Que répond le militaire ? la ville dite gallo-romaine est la ville gauloise avec un plus (les Gaulois construisaient en pierre).
 
 Affaire Alésia. C’est dans le projet du futur muséoparc : visite et explication de ce qui reste de la ville dite gallo-romaine située sur le mont Auxois.
Que dit l’archéologue ? Pas de traces gauloises significatives à cet emplacement.
Que répond le militaire ? Ces ruines sont celles du village gaulois des Mandubiens (les Gaulois construisaient en dur). Le témoignage de César est formel.
 
Affaire bataille de cavalerie avant celle d’Alésia.
Que dit l’archéologue ? Qu’elle a eu lieu à Fains-les-Moutiers (Christian Goudineau)
Que dit le militaire ? Qu’elle a eu lieu à Noyers.
 
Affaire Gergovie.
Que dit l’archéologue ? Le plateau de Merdogne est l’oppidum de Gergovie dont parle César mais il n’est pas le seul oppidum (Vincent Guichard). Gergovie est à Corent ; il n’y a rien de gaulois à Merdogne (Matthieu Poux).
Que dit le militaire ? La ville de Gergovie sur une hauteur que décrit César est la ville du Crest sur l’éperon de la montagne de la Serre.
Que répond l’archéologue ? Non ! Les vestiges de la forteresse datent du Moyen-âge.
 
Affaire Uxellodunum.
Que dit l’archéologue ? Uxellodunum est à Puy d’Issolud (Christian Goudineau).
Que dit le militaire ? Uxellodunum est à Luzech.
 
Affaire Bibracte.
pour mémoire etc.
 
Que dit le ministre de la Culture ?
 
Il y a heureusement des archéologues dont les actions sont positives comme la mise au jour, sur le mont Lassois, d’une petite ville du premier âge du fer (820 à 450 ans avant J.C.) ce qui remet en question la thèse d’une Gaule qui n’aurait connu un début d’urbanisation qu’aux Ier/IIe siècle avant notre ère. Voyez mon article http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=28189 et ma conclusion en forme d’espoir pour les jeunes archéologues :
 
"La recherche archéologique a encore de beaux jours devant elle".
 
 

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