Cahuzac enterre Hollande

par LM
mardi 2 avril 2013

Le corrézien normal l’aura « démissionné » trop tard : son ministre du budget, qui « les yeux dans les yeux » lui avait assuré ne pas avoir de compte en suisse, a avoué le contraire aux juges.

Le Canard Enchaîné de la semaine dernière racontait par le menu comment Hollande avait éjecté Cahuzac par téléphone, après avoir beaucoup tergiversé, convaincu en fait depuis Noel, qu’il ne pouvait y avoir d’autre issue. On pouvait aussi lire que l’ex ministre du budget avait « les yeux dans les yeux » (à la Mitterrand en quelque sorte) certifié au chef de l’état qu’il ne possédait aucun compte en Suisse ou ailleurs. Aujourd’hui le Canard décortique les aveux de l’ancien ministre, non seulement détenteur un temps d’un compte en Suisse, mais en plus détenteur toujours (selon l’hebdomadaire) d’un compte à Singapour. Cahuzac depuis, pleure, demande pardon mais le mal est fait. Montebourg s’étrangle, d’autres s’insurgent, on veut maintenant savoir qui couvrait, qui savait, qui n’a rien dit, et pourquoi. Le Président normal, évidemment, se trouve largement éclaboussé. Encore une crise mal gérée par un exécutif totalement largué, même pas requinqué depuis l’intervention télévisée de la semaine dernière. Cahuzac, c’est l’hallali, pour Hollande, la fin de tout, ou pas loin. Blanchiment, ça a une autre gueule qu’abus de faiblesse, quand même. Ca parle. Ca pulvérise, ça éparpille toute légende de normalité, tout espoir de changement. Soudain, tout est cuit. En tout cas ça sent le brûlé, sévère, et pour remonter ce type de pente, il en faudra du talent à une équipe qui n’en a guère montré jusqu’ici.



On dit le Président « ami » de Plenel, que n’a-t-il bien plus tôt pris des renseignements pour savoir si du lourd se cachait derrière le soupçon ? On a l’impression qu’Hollande a plutôt suivi la presse jalouse qui hurlait à la manipulation, sans trop chercher à savoir si l’accusation pouvait être crédible. Hollande, du coup, sur cette affaire comme sur tant d’autres a perdu du temps, pour au final se discréditer dans le grandes largeurs. Vous me direz, à 30% à peine d’opinion favorable, que reste-t-il à perdre ? Beaucoup, quand même. Pouvait-il faire autrement ? Sans doute, oui, on peut toujours faire autrement, autrement que de laisser Cahuzac, devant l’Assemblée nationale, affirmer son innocence avec force verbe. Cahuzac a préféré mentir, effrontément, sans état d’âme, à l’ensemble de l’exécutif, avec conviction. Il a par là même flingué la normalité, socle du quinquennat corrézien de Hollande. Ce qui revient à achever un homme et un pouvoir à terre.

En même temps, ce n’est pas la première fois qu’un homme politique avoue quelques turpitudes ou se fait prendre la main dans le pot de marmelade, mais rarement de façon si spectaculaire. Il s’agit quand même là de l’ancien ministre du budget, accusé de blanchiment ! Mais au-delà de cela même, une question cruciale se pose avec insistance : Hollande et Ayrault pouvaient ils tout ignorer ? N’avaient ils pas les moyens, beaucoup plus tôt, de chercher la vérité sur ce dossier plutôt que de laisser le ministre s’enfoncer dans le mensonge et enfoncer ses collègues avec ? Soit ils l’ignoraient en effet, et dans ce cas là, ça laisse pantois, parce que si le plus haut personnage de l’état et son Premier Ministre en savent moins qu’un journaliste d’un site internet, fut-il Edwy Plenel, sur la « vraie vie » d’un de leur ministre, leur crédibilité en prend un sacré coup, et le fait que Cahuzac ait menti à Hollande « les yeux dans les yeux » en dit long sur le respect et la crainte que ce dernier lui inspiraient…Soit donc le Président ne savait rien, et il est discrédité, et Ayrault avec, soit les deux savaient, et alors là…

En attendant on en est aux gros yeux d’un côté et à la demande de pardon de l’autre. Plenel triomphe, Mélenchon s’extasie, le Président de la République, lui, refait ses comptes, seul comme jamais.


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