Caroline Fourest : Cheval de Troie ou Jeanne d’Arc ?

par Denis Thomas
vendredi 8 février 2013

Depuis quelques mois, l’espace médiatique qui, par essence, a horreur du vide, résonne au nom d’une jeune consoeur : Caroline Fourest. La journaliste occupe le terrain. Elle est partout : des manifs au profit du « Mariage pour tous » aux plateaux de C dans l’air, d’Yves Calvi. Jusqu’aux toutes premières pages … d’Agoravox. C’est dire.

La jeune femme ne laisse visiblement pas indifférent. Elle est voyante, et ça lui plaît. Bien sûr.

Elle se positionne fortement au cœur des débats, politiques ou sociétaux, argumente et questionne. Délivre son analyse. Elle actionne son petit business, ce qui est normal et est loin de lui être exclusif.

Mademoiselle Fourest clame fort son homosexualité, ce qui est son droit le plus absolu. Elle apparaît aux yeux de certains comme la porte parole d’une liberté d’expression. Elle a fondé la revue ProChoix, qui vise à « défendre les libertés individuelles contre toute idéologie dogmatique, liberticide, essentialiste, raciste ou intégriste ».

De l’autre main, elle publie. A tour de bras des ouvrages à « scoops ». Elle épingle le Front national avec un ingénieux « guide des sponsors du FN », Christine Boutin et l’intégrisme chrétien dans « Les anti-Pacs ou la dernière croisade homophobe » ou bien encore « Frère Tariq » dans lequel elle pointe ce qu’elle estime être le double discours du professeur d’Oxford, libéral le jour mais fondamentaliste la nuit …

Pour sa « Tentation obscurantiste », elle obtient le prix du livre politique 2006 de l’Assemblée nationale, les doigts dans le nez au premier tour. On passerait la Noël à énumérer les publications et collaborations de Caroline Fourest, la journaliste. Ainsi que les actions et coups de gueule de Caroline Fourest, la militante.

Et c’est, sans doute ce CV à rallonge qui commence à gêner la jeune femme aux entournures. Etre voyant, c’est bien. Mais c’est aussi s’exposer dangereusement.

Au centre des démonstrations pour le Mariage Pour Tous, qui agitent les rues françaises, elle filme une action des FEMEN, ces militantes féministes ukrainiennes, aux prises avec les membres franchouillards cathos de Civitas. L’affaire tourne à la foire d’empoigne et Caroline Fourest affirme s’être faite tabassée par des exaltés du mariage papa – maman.

Mais son image se trouble un tantinet lorsque France 5 diffuse un documentaire de la journaliste sur les « obsédés du complot ». Caroline déchaîne les passions et devient, pour les autres, un agent « au service de la politique des USA ». Elle qui avait cherché des poux dans la tête de Bush Junior pour ses amitiés avec le mouvement intégriste catholique yankee dans son libre « Foi contre choix : la droite religieuse et le mouvement pro-life ». Un comble …

PASIONARIA

Ici est le problème. Son problème. Un journaliste se met invariablement en péril lorsqu’il franchit trop clairement les « lignes rouges », comme dirait Montebourg, qui séparent les diligences de son métier de son affect. Le « pipole » y gagne alors ce que la crédibilité y perd. 

Dans le cadre de son métier de journaliste-écrivain, essayiste comme la qualifie sa fiche Wikipedia, elle perd un procès en diffamation contre Marine Le Pen en octobre dernier. Pas de quoi fouetter un éditorialiste, avec le clan Le Pen ce sont précisément les risques du … métier.

Que des détracteurs viennent fouiller dans son passé, raillant la découverte de son homosexualité dans son collège privé catholique d’Aix-en-Provence ou que son arrière grand mère empesait les cols de Laval à Vichy ou bien encore que son caniche nain devient épileptique quand le facteur épèle le nom de Sarkozy, n’a franchement guère d’intérêt et ne fait pas sérieux.

Mais qu’un nombre grandissant de politiques ou d’intellectuels, pas forcément du même bord et sans relation connue, viennent à lui reprocher grosso modo de leur prêter des propos qu’ils affirment n’avoir jamais tenu pour mieux les circonvenir. Là, ça tousse un peu.

Caroline Fourest navigue entre deux syndromes. Celui d’une pasionaria façon Jeanne d’Arc qui, à force de suivre la voix céleste de l’intolérance contre l’intolérance, finit par irriter tout le monde. Ensuite celui du cheval de Troie, si séduisant qu’on le fait rentrer dans son salon, pour s’apercevoir que ses manières n’étaient, finalement, pas si bienveillantes que cela.

Le hic, c’est que ces deux figures emblématiques ont, toutes deux, péri dans les flammes.

 


Lire l'article complet, et les commentaires