Cauchemar électoral. Macron-Le Pen : se dégager de la manipulation

par LilianeBaie
lundi 1er mai 2017

Deux candidats de droite au second tour, qui prétendent ne pas être de droite. Nous vivons une période cruciale où les mensonges de la comm' politique commencent à se voir. Servons-nous de cette fenêtre, certes douloureuse, pour cesser d'être dupe et accepter le combat, mais avec les armes de la démocratie : dévoilement des mensonges, réflexion, action collective.

Ils sont combien, les électeurs vraiment de gauche qui se sont réveillés, le lendemain du premier tour des élections présidentielles, avec un doute et une légère nausée ? Parce que, convaincus à tort par les médias, ils avaient de bonne foi cru que seul Macron pouvait battre Le Pen au deuxième tour, et que le doute sur le bien-fondé de ce vote commençait à s'insinuer dans leur esprit ? Surtout quand ils ont réalisé que Mélenchon aurait aussi battu Le Pen sans problèmes (cf « liste des sondages élections présidentielles 2017 » sur Wikipedia).

Je crois que ce malaise a pu évoluer en angoisse quand ils ont constaté que leur poulain du vote utile enlevait vite ses habits de lumière pour montrer qui il était vraiment : un libéral à 100%, sans projet autre que servir les grands groupes et une Europe Merkelienne - dont eux savaient qu'elle était la source de leur maux - méprisant la démocratie en confirmant qu'il allait promulguer des lois - auxquelles eux s'étaient profondément opposés dans la rue - dès juillet à coup de 49.3 et d'ordonnances pour affaiblir encore les lois sociales (ceci dit, on avait été prévenu avant : pourquoi tant de gens s'aveuglent-ils volontairement ?). On a pu percevoir, aussi, le manque d'adaptabilité du personnage qui, s'il sait séduire à coup d’œillades, de mains pressées et de regards appuyés, n'écoute et n'entend rien véritablement de l'autre, même des journalistes neutres ou plutôt dévoués à sa cause (cf « L'émission politique du 27 avril sur TF1 »). Sa personnalité commence à affleurer sous les sourires stratégiques. Son agressivité aussi.

Depuis, je pense que ses conseillers en communication ont dû le reprendre en mains (sûrement même, tant la courbe d'intentions de vote à son égard chute rapidement). Mais j'espère que cette porte ouverte sur le fonctionnement macronien, plein de morgue et avec une évidente certitude d'avoir raison, et, surtout, profondément réactionnaire, va permettre à ceux qui ont cru « voter utile » de réviser leur position.

Quand on pense "voter utile" on devrait toujours se demander : utile à qui ?

Oh, bien sûr, il ne s'agit pas de voter Le Pen le 7 mai : au bal des menteurs, elle ne fait pas tapisserie, elle qui a réussi à faire croire aux ouvriers et aux personnes à revenu modeste qu'elle était de leur bord, voire qu'elle était de gauche, alors qu'elle est de la droite de la droite et n'a jamais montré, dans ses actes, le moindre soutien aux ouvriers en lutte ou la moindre détermination à empêcher les riches d'être plus riches, ou les pauvres d'être moins pauvres. On a pu remarquer le refus d'augmenter le SMIC, de défendre les salariés... C'est une candidate de "l'ordre", ne l'oublions pas, qui dissimule (on dit, pudiquement « dédiabolise ») tous les aspects les plus suspects de son mouvement. Et ignore superbement toutes les mises en examen de membres éminents de son groupe, y compris d'elle-même si elle ne bénéficiait pas d'une immunité d'élue.

Non, il s'agit juste de réaliser que l'on s'est fait manipuler par un matraquage médiatique sans précédent : tous les médias appartenant à de grands groupes ont poussé en avant le candidat Macron, et ce, depuis des mois. Le PS, dans sa partie « éléphants » a, lui aussi, tout fait pour promouvoir Macron. A ce titre, le lâchage de Hamon par la plus grande partie de ces politiques soi-disant socialistes promouvant une politique néolibérale, n'était pas une surprise, mais a favorisé une scission des votes PS dont Macron a largement bénéficié.

Voila, vous avez voulu du changement ? Vous avez pensé que Macron était (au moins un peu) de gauche. Vous avez craint que Mélenchon ne soit un fou qui voudrait quitter l'Europe et faire alliance avec l'Amérique latine ? Finalement, vous souffrez d'une succession de gouvernements qui ont détourné le sens de l'Europe pour en faire une zone de soumission des peuples aux diktats des banques, des fonds de pension et des multinationales et vous réalisez que le seul candidat qui peut empêcher de donner le pouvoir à l'extrême-droite au second tour, c'est celui qui est à fond pour ce système et l'a d'ailleurs déjà largement favorisé ?

Maintenant, vous avez la gueule de bois. On vous somme de vous décider pour le petit chéri de la finance, et, franchement, vous sentez que vous allez avoir du mal.

J'ai déjà écrit un texte sur ce sujet «  Barrer Le Pen sans plébisciter Macron ». J'y explique qu'il me paraît important, pour ceux qui sont partagés dans ce choix cornélien, de se débarrasser le plus possible de toutes les influences médiatiques qu'ils ont à supporter.

Ça suffit, non, de se faire avoir par les médias ?

La question est mal posée : il ne s'agit pas de choisir entre la peste et le choléra, mais de trouver la façon de contrer ces deux fléaux. Et ce sera, forcément, aux législatives.

Mais pour que les législatives puissent dégager une majorité renvoyant Macron et Le Pen à leur impuissance politique, il faut que celui qui est élu ne le soit qu'à une courte majorité, je dirais moins de 60%. J'explique dans mon texte comment on peut s'y prendre (cf Note 1). Et je tente de démontrer l'importance majeure de ce choix : car donner un fort taux électoral à celui qui va sortir des urnes dimanche, c'est le plus sûr moyen d'empêcher une vraie majorité d'opposition de gauche à l'Assemblée (cf dans la deuxième partie de mon billet la question des ressorts psychologiques du vote, voir Note 2). Souvenons-nous que Jacques Chirac bénéficiait de moins de 20% des suffrages au premier tour en 2002 contre Le Pen père, et que le Front républicain lui ayant donné 80% des voix au second tour, il a emporté la majorité absolue à la Chambre un mois plus tard. 30% d'électeurs qui ont continué de voter utile alors qu''il n'y avait plus l'alternative Le Pen ! Cela fait réfléchir, non ?

C'est cela, le danger, s'auto-saborder encore une fois en n'utilisant pas les armes légales dont nous disposons, et, encore et toujours, sous la pression médiatique.

Ne nous laissons pas influencer : réfléchissons ! Et suivons la liste des sondages...

 

 

Notes pour ceux qui n'ont pas le courage d'aller sur le billet "Barrer Le Pen sans plébisciter Macron" :

Note 1 : "Il n'y a pas d'autre alternative que l'élection de Macron, on en est tous d'accord (sauf les lepénistes, bien sûr...). Mais il est important de ne pas donner à ce dernier plus de voix qu'il n'est nécessaire pour être élu. Selon moi, il s'agit donc, pour ceux qui partagent mon point de vue, de voter blanc ou de s'abstenir, sauf si les derniers sondage se rapprochaient de la ligne de danger. Par exemple un pourcentage décroissant du vote Macron au deuxième tour dans les dix jours qui viennent et se rapprochant de 55% nécessiterait une réflexion de vote pour les insoumis : on pourrait envisager qu'un insoumis sur deux sacrifie son bulletin en le donnant au petit chéri de la finance tandis qu'un autre fait un vote blanc. Ou autre stratégie à réfléchir."

Note 2 : "Et encore une remarque : ceux qui laissent entendre que ne pas appeler à voter Macron signerait une trahison républicaine sont, soit des propagandistes ultralibéraux, soit des victimes de cette propagande. En tout cas, il s'agit de l'exemple typique d'une communication perverse « Si vous dites ça, cela veut dire ça... » (suit une action sans rapport). Face à la communication perverse il est important de ne pas se justifier (qui s'excuse s'accuse) ni de se mettre en colère. Mais de faire du retour à l'envoyeur : type « Si vous pensez cela, c'est que vous trouvez bien que Macron soit élu avec 80% des votants et qu'il soit majoritaire à l'Assemblée... ». Ou « Vous pouvez croire qu'il y a un risque que Le Pen soit élue. Suivons les sondages ensemble... ».

Et essayons de ne pas nous laisser entraîner sur ce terrain qui rend tous les vrais démocrates désolés et amers : concentrons-nous sur les législatives à venir !"


Lire l'article complet, et les commentaires