C’est au départ un fait divers comme il s’en produit hélas de plus en plus. C’est à Mably, dans la Loire, notable pour son arsenal, installé depuis 1917 et qui existe toujours. Un coin calme, où on va à la pêche dans une ancienne gravière, celle de l’étang de Cornillon. Le soir du samedi 18 septembre, trois jeunes de la ville ont complètement saccagé un atelier de tissus d’ameublement de 1100 m2, celui de l’entreprise Jolymousse, par simple jeu et par plaisir. Ils ont tout dévasté : vidé les extincteurs, cassé des machines à coudre, écrit des propos obscènes sur les murs, arraché les tissus, renversés les étagères, bref, un saccage sans nom. Gratuit, fait par des gamins de 12 à 14 ans jusqu’ici sans histoire jusqu’ici. Le patron de l’entreprise, alerté par le bruit, les a arrêtés avec les gendarmes appelés en renfort en moins de dix minutes. L’acte idiot par excellence, par pur désœuvrement... et par influence. Au final, il y en a pour 100 000 euros de dégâts. Car, au regard de la télévision actuelle, j’acccuse aujourd’hui les publicitaires d’incitation à la violence et aux incivilités : il y a bien trop de pubs télévisuelles qui poussent à la roue en ce moment, c’est une évidence, et je vous avoue que j’en ai marre de cette bande d’irresponsables qui fourguent à nos gamins des idées aussi idiotes. Personnellement, je les mettrais au trou à la place des gamins.
La dernière en date de ses publicités à la con et l’étalage d’une violence sans nom pour vendre un produit de suivi de bourse en ligne : il faut le faire. Dans le cerveau malade du publicitaire qui a pondu ça, on tombe sur une scène inimaginable de personnes qui se tapent dessus, en fond d’écran, avec au premier plan un individu qui actionne tranquillement son ordinateur. Avec toute la panoplie du clip des années 80 : ralentis, mouvements de caméras, etc. La mise en scène n’a aucun rapport avec le produit final, bien sûr : on vante la sécurité d’un produit en étalant une forme d’insécurité, finalement. Un débauche de violence gratuite dont l’obscénité est accentuée par la musique douce : le procédé a déjà été utilisé au cinéma. Le décalage, on le sait est payant : on filme un assassinat illustré par du Strauss ou de la musique douce. Incroyable publicité, qui sévit en ce moment même sur nos écrans. La publicité est pour
Binck, un nouveau service boursier en ligne, pour lui un moyen de se différencier, et la violence de ses messages une méthode lourde pour y arriver. Pourquoi nous impose-t-on un tel message aux grandes heures d’écoute ? Un gamin qui voir ça va en retenir quoi ? Que cette violence gratuite et ce déchaînement serait une constante en entreprise ? Pourquoi ne pas être tenté de faire de même ailleurs, alors ?
Chez Binck, c’est clair, on a bien choisi un état d’esprit et il n’est guère reluisant : les richesses étalées et galvaudées, présentées comme
"le banquier désarçonné", ne rien
foutre au boulot, se t
enir mal au resto. L’agressivité en ligne, oui ! Dans le langage bancaire ça donne
"Pour faire passer le message, BinckBank illustre son propos en empruntant les codes de ses adversaires et donc en caricaturant le banquier sur trois thèmes : le golf, les grands restaurants et un PDG cloitré dans un bureau immense". En fait c’est l’étalage d’un cynisme absolu présenté comme valeur principale.
"Moi d’abord, et après les autres". Venu de Hollande, le brocker en ligne est agressif d’origine, et ne joue que sur l’effet parodique du
pouvoir de l’argent. Le patron est par exemple obligatoirement un allumé nerveux qui retient
difficilement sa violence. Le message est clair : les banquier
s sont des cons, sauf eux, bien sûr. Toujours le même thème et le même message tournant autour de la violence, contrôlée ou pas. Avec au bout un argument de vente en France digne de la vente au parapluie
: "BinckBank s’engage à rembourser ses clients s’ils trouvent moins cher ailleurs". Un produit de bourse vendu comme des cravates au parapluie ! "Moins cher", le seul argument véritable de la boutique en fait : c’est
l’Aldi du broker : "Il en coûte, par exemple, 5 euros pour un ordre de 5.000 euros passé sur Euronext, contre 24 euros avec Boursorama Classic ou 15,50 euros avec Fortuneo Eco".
Son directeur adjoint actuel, qui se dit italien, est l’a
ncien de Monster, site d’emploi qui présentait une campagne
"où on explosait de joie". Ancien de chez E-Cortal, se courtier en ligne se juge
"en guerre" contre les autres, qui tous sont des filiales de groupes bancaires comme Boursorama (Société Générale), Cortal Consors (BNP Paribas), Fortuneo (Crédit Mutuel) ou de courtier comme Bourse Direct (Viel & Cie). En guerre, d’où sa thématique publicitaire agressive sans doute.... En Belgique, Binck s’était
déjà fait repérer pour avoir vanté un peu vite ses mérites soi-disant comparés. D’autres sont moins
... évasifs. "En guerre", donc, et imposant sans vergogne sa violence en publicité dont on se passerait aisément. La campagne précédente avait été analysée par le blog de l’
agence Sidièse. Sur le blog de la firme on se pose des questions pour savoir si cette pub est
choquante ou pas, par exemple... or c’est bien l’agence "écolo" qui a signé les troi
s spots pour le broker. "Derrière les films se cache l’humoriste Michel Muller" apprend-t-on également. Le
"Hénaut Président"... sorti de Canal. L’homme qui affirme que sa vie est
plus belle que la vôtre. Celui dont les prestations trash son
t jugées parfois "malsaines" : à force de se vautrer dans le néant... voilà où on en est publicitairement. Et qui influence réellement les gamins. "Canal" a mis le doigt dans l’engrenage trash, pour se démarquer des autres chaînes, il peut aujourd’hui en payer les pots cassés.
Tout de suite, sur les journaux, après le forfait des jeunes voyous, l’arc sécuritaire se tend. Dans le mauvais sens, encore une fois, et sans trop de réflexion :
« Il est évident que si c’est un acte volontaire de dégradation, quel que soit le montant, et encore plus si c’est un montant très important, il pourrait y avoir une condamnation pénale assez lourde. Cela peut être l’admonestation ou le rappel à la loi ou des sanctions éducatives si l’on voit qu’il y a une carence de la part des parents. Cela peut aller jusqu’à une peine de détention, ferme ou avec sursis. Mais il y aura certainement des sanctions pénales contre ces mineurs. » déclare un avocat. Certes, mais pourquoi eux seulement ? Les gamins n’ont pas été freinés, certes, mais qu’ont-ils vus qui a pu les influencer ? De cela, on ne se soucie guère et le CSA à mon sens ne fait visiblement pas son boulot."
« Les parents sont civilement responsables des actes de leurs enfants. Les parents ne peuvent pas être condamnés pénalement, mais ils sont responsables, financièrement, des dégâts causés par leurs enfants. Donc les parents devront payer. Généralement, pour l’immense majorité de la population, nous sommes assurés contre les dégâts causés par nos enfants dans l’assurance habitation. Si toutefois, ils n’étaient pas assurés, ce serait aux parents de régler ces sommes-là. »" Très bien : et les publicitaires ayant d’une certaine manière incité au délit, pourquoi ne le seraient-ils pas eux aussi dans ce cas ? Qui est davantage responsable : le parent, ou celui qui met à la vue de tous des saccages glorifiés ?
Car il n’y a pas que Bink à blâmer : depuis des années (2003 !) une pub montrait des
stagiaires d’entreprise qui maculaient les murs de cette dernière en balançant des pots de peinture partout : il n’y en a pas eu un seul au CSA pour interdire cette apologie du saccage d’entrepris
e. "Le petit déj’ qui va t’éclater" disait l’un des jeunes stagiaires qui s’emmerdait... ah ouais..
. "y’en a marre, hein, de ce boulot d’été" disait ce même stagiaire avant de tout saccager avec son pote !
Et encore, on a rien vu encore, il semble. Les américains, depuis toujours, font bien pire. Pour les
boissons visant un public jeune, par exemple... on est loin, il est vrai, de la
pub pour espadrilles, là. Ou de celle du "coup de pub" magistral d’un recalé de l’ENA appelé
Eric Besson, roi de la pub avant l’heure. Celles de quelles valeurs ?