Centrale nucléaire d’Hinkley Point 24,5 milliards pour rien ?

par Christophe Bugeau
mardi 10 mai 2016

Le comité d’entreprise vient de demander un rapport d’expert sur l’opportunité pour EDF d’investir dans la construction de deux centrales nucléaires de nouvelle génération (EPR) en Grande-Bretagne à Hinkley Point pour le montant pharaonique de 24,5 milliards d’euros et l’Etat actionnaire d’EDF à 84,49 % ferait bien aussi de s’intéresser à la question !

Ces deux centrales auront une puissance installée de 1650 MW chacune, ce qui n’est pas négligeable, mais la dérive du devis (qui est commune à toutes les centrales de nouvelle génération comme Flamanville) est plus qu’inquiétante : en 2013 le projet était estimé à 16 milliards d’euros et l’on est passé à 24,5 milliards aujourd’hui. En attendant d’autres dérives ? EDF est coutumier du fait (voir http://www.christophebugeau.fr).

EDF reste à l’heure actuelle le financeur principal à 66,5 %, mais il a dû faire entrer pour 33,5 % le groupe chinois CGN. Ce dernier apparaît désormais comme un partenaire indispensable.

Plusieurs questions se posent autour de ce projet : d’abord celui de la rentabilité, celle-ci est de moins en moins assurée. En effet, un réacteur nucléaire fonctionne à pleine charge 80 % du temps, alors que des éoliennes ne fonctionnent à pleine charge que 25 % du temps mais à l’heure actuelle, le prix de l’installation est de l’ordre de 1,35 millions d’euros par MW de puissance installée (http://www.enr.fr/userfiles/files/Brochures%20Eolien/Etat%20Co%C3%BBt%20de%20production%20%C3%A9olien%20terrestre%20VF.pdf) sauf pour l’éolien en mer.

Avec les 16 Milliards investis par EDF nous pourrions installer 11 850 MW d’éolienne, soit 2 962 MW de pleine charge annuelle (25% du temps), or Hinkley Point et ses deux réacteurs de 1 650 MW (3 300 MW cumulés) fonctionnant à 80 % du temps représenteront une puissance de pleine charge annuelle de 2 640 MW. Certes le problème de l’éolien reste son instabilité en terme de production ce qui nécessite de pouvoir stocker l’énergie. Mais cela signifie bien que le nucléaire est en train de devenir plus cher que le renouvelable.

Or, nous ne devons pas perdre de vue que même si sur ces nouveaux types de réacteur les mesures de sécurités sont drastiques, le nucléaire est et restera dangereux, le jeu en vaut-il la chandelle ?

En dernier lieu, est-il dans l’intérêt de l’actionnaire français (donc nous tous) qu’EDF investisse massivement en Grande-Bretagne quand nos propres centrales nucléaires arrivent en fin de vie et qu’il faudra les remplacer soit par des EPR (est-ce vraiment une bonne idée) soit par des énergies renouvelables ?

L’on peut réellement se demander si l’Etat ne devrait pas dans l’intérêt supérieur du pays mettre un terme à cette aventure de plus en plus mal partie ! 


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