Ces concours de Miss qu’il faut supprimer...

par Circé
mardi 11 novembre 2014

Dans ma ville, aura lieu le 06 décembre prochain, l'un de ces concours, les plus sexistes et discriminatoires qui soit.

Un de ces concours, où l'on soupèse du regard le corps des femmes, où on les évalue, sur leur tour de poitrine, de taille, de hanche, leur démarche et sourire, capacité à être des potiches bien gentilles, pouvant rester des heures à être le faire-valoir d'autres produits à vendre : des voitures de luxe, par exemple, et si possible, taille enserrée le temps d'une photo (?) par une mâle assistance se pensant droit et pouvoir sur celle-ci et auquel le non ne peut être opposé.

Concours ringard s'il en est, et qui n'élève pas le niveau quant à la place des femmes dans notre société.

Concours coûteux aussi ! Pas moins de 400 000€ pour organiser tout cela.

400 000€ en des temps de disette budgétaire, en des temps où l'on supprime dans ma ville un festival de Jazz, une journée dite "Jour J", soirée gratuite avec nombre de concerts à destination des jeunes, où l'on ne sait encore si seront votées les subventions pour l'année 2014-2015 à destination des écoles qui organisent des classes vertes.

Encore que là-aussi, doit-on se poser la question de la définition de classe verte, puisque pour la moitié des classes des écoles publiques qui ont déposé dossier, les enfants partiront le matin de chez eux, pour y rentrer..le soir ! Glissement sémantique s'il en est de sortie pédagogique à classe verte...

Et donc, figurez-vous, que cela, parait-il, coûte cher pour la ville, 102 000€ !

102 000€ contre 400 000 pour une soirée à faire perdurer le pire du pire en matière de légitimité des femmes dans l'espace public.

Potiche et/ou sur le trottoir pour un nombre grandissant de cervelles masculines mal dégrossies et qui reviennent à des comportements insupportables.

Car dans notre ville, et comme sans doute dans nombre d'autres villes d'ailleurs, les femmes de tous âges sont copieusement harcelées, alpaguées, accostées et insultées, qu'elles répondent ou non aux assauts répétés de mâles de tous âges, en tous quartiers et à toute heure du jour et de la nuit.

Injonction leur est faite tout d'abord de ne pas être en dehors de leur maison ou sinon de marcher rapidement, d'un point à un autre, d'avoir quelque chose à faire. Et gare à celle qui flânerait, se promènerait, profiterait du soleil, ou simplement se poserait, les harceleurs ne sont pas loin.

En notre ville, Orléans, une jeune femme, lasse d'être ainsi l'objet d'une véritable mainmise de la part d'une gent masculine agressive et envahissante a fini par se raser la tête, en signes de protestation et libération. Terrible société où la victime retourne contre elle la violence qu'on lui fait, et qui en plus se reçoit maints commentaires désagréables sur sa féminité qu'elle aurait ainsi sacrifiée.

Et comme chez nous, nous sommes un tantinet schizophrène, nous avons reçu comme il se doit, et officiellement, Mme Rosen Hicher, une femme courageuse, ancienne prostituée qui lors d'un périple long de près de 800 kms à informer, alerter, sensibiliser celles et ceux qu'elle rencontrait pour que la pénalisation des clients de la prostitution soit remise à l'ordre du jour et soit enfin votée, via le biais d'un amendement, lorsque cette loi visant à l'abolition de la prostitution repassera à l'Assemblée Nationale.

Schizophrène vous dis-je, encore et toujours, que d'organiser ce concours de Miss, fût-il celui de Miss France, alors que nous célébrons dans le même temps le courage d'une toute jeune femme de 17 ans, Malala Yousafzai, qui vient d'obtenir le prix Nobel de la Paix pour sa lutte déterminée et au péril de sa vie, pour l'accès à l'éducation de tous les enfants, et les filles notamment, où que ce soit sur cette planète.

Et nous ?

Nous, nous organisons toujours la foire aux femmes, celle dont Pierre Tchernia vantait les "mérites" en invitant les spectateurs, sur un mode prétendûment humoristique, à "acheter une femme", lors du salon des arts ménagers tenu à Paris, en 1965.

Curieusement, j'ai la grande crainte que peu de choses aient réellement changé dans les mentalités.

En attendant, voici le texte de mon intervention en conseil municipal d'Orléans en juin dernier contre l'organisation de ce concours. Nous n'avons été que deux sur 55 à nous y opposer.

Aujourd'hui la révolte gronde, et c'est tant mieux.

En Italie, ils ont fini par abandonner ce concours, en Islande les féministes de tous âges et de tous genres ( et oui, féministe ne signifie en rien que la personne soit une femme, ce peut être un homme, si, si, je vous l'assure !) s'inscrivent en masse pour le polluer et en empêcher sa tenue, mais nous ?

Et bien nous, nous sommes vraiment le pays de la ringardise, malgré une belle devise dont nombre de pays nous envient, mais que nous sommes incapables de mettre en œuvre.

Pire même, nous régressons.

« Lors d’un précédent conseil, je vous avais interrogé pour savoir si la ville d’Orléans financerait ce concours parfaitement discriminatoire et sexiste de Miss France. Vous m’aviez alors répondu par la négative, il s’avère aujourd’hui que d’une façon ou d’une autre la ville d’Orléans va l’organiser.

Pourtant, comme tous les concours de Miss, celui-ci fait de la femme une femme objet, devant répondre qui plus est à des critères : physiques, pas moins de 1m70, - et en filigrane ne pas être handicapée physique ou mentale-, d’âge : ne pas avoir plus de 26 ans, de situation personnelle : ne pas être mariée ou pacsée, être célibataire, moraux : ne pas avoir tourné dans des films pornos…etc… et puis aussi être souriante, aimable, gracieuse

Ce concours est le reliquat de nos rosières d’autrefois, mais qui aujourd’hui se retrouvent pour une année, ces « Miss Rosières » à faire la foire aux jambons de Trifouillies les Oies ou bien encore servir de décoration, de potiche souriante lors des salons de l’auto ou autres foire-expo…

Je crains que nous soyons un certain nombre à avoir d’autres valeurs pour représenter la France que celles portées par ce concours complètement désuet et qui ne relève pas le niveau quant à la place des Femmes dans notre société en tant que citoyenne notamment lorsqu’on leur demande de se comporter avec grâce, distinction et élégance, d’avoir une bonne tenue vestimentaire, une hygiène soignée, et pourquoi ne pas vérifier le brossage de dents tant qu’on y est…

Alors, oui, je sais à l’avance ce qui va nous être rétorqué : la force de frappe de TF1, notez comme tout de suite le vocabulaire est plus guerrier et moins élégant, et puis aussi les retombées touristiques, commerciales etc…Des corps à vendre contre une pseudo manne financière…

En attendant, ce sont 400 000 euros qui vont partir en hôtels 4 étoiles avec chambres individuelles pendant 17 nuits pour 43 personnes, autant pour les petits déjeuners, déjeuners et diners, mise à disposition du Zénith, des techniciens – 1 grand salut aux intermittents du spectacle sans qui aucun spectacle ne pourrait avoir lieu, ni même ce concours de Miss-, des personnels de la ville, d’une salle de 500 m2 et j’en passe et des meilleures…

Et surtout ne venez pas prétendre que ce sera la conversation de ces jeunes femmes qui feront publicité pour notre ville, mais bien uniquement leur plastique, les défilés en maillot et autres joyeusetés où nombre reluqueront autre chose que l’élégance, la grâce, la distinction ; Quelle hypocrisie !

Pour ma part, ce n’est pas une poupée Barbie, un Ken ou un GI’Joe qui peut représenter la France, mais bien une personne qui porte des valeurs, celle de notre République et qui réponde aux valeurs de Liberté, d’Egalité et de Fraternité.

A ce jour, et ce n’est qu’un exemple, celui qui a répondu à mes attentes, au-delà des clivages politiques, a été Mr Dominique de Villepin lorsqu’il a pris la parole au nom de la France lors de son discours à l’ONU contre l’entrée en guerre de la France contre l’Irak.

Ce jour-là, oui, comme nombre de Françaises et de Français, j’ai vibré à l’unisson et j’ai été fière d’être française.

Pour en revenir à ce concours, il est bien le pire du pire qui peut se faire ; Il contribue à maintenir les femmes dans le rôle du repos du guerrier, sois belle et tais-toi, et comme ne renierait pas mon amie Monique Lemoine, Présidente de Mix-Cité, je le redis ici : Princesse un jour, Bonniche toujours !

Et c’est la ville d’Orléans qui finance, désespérant !

 


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