Ces conflits d’intérêt qui empoisonnent la république
par Bernard Dugué
vendredi 18 décembre 2009
Les conflits d’intérêts, nos médias français en parlent peu. Est-ce parce que notre culture de la connivence et des combines interdit à la plupart d’évoquer cette question car ils devraient se jeter la première pierre, étant concernés de près dans cette pratique ? Mais au fait, qu’est-ce qu’un conflit d’intérêt ? Nous allons comprendre que le conflit d’intérêt n’existe pas parce qu’il est toujours résolu et c’est parce que ce conflit est solutionné sous forme de connivence que ça pose parfois problème à la société.
Pour comprendre le conflit d’intérêt, rien de tel que l’exemple des laboratoires pharmaceutiques et des chercheurs. Les scientifiques font des expériences qui parfois, portent sur l’étude du mécanisme d’action d’une molécule ou alors de son efficacité dans le traitement d’une pathologie. Ces mêmes scientifiques peuvent éventuellement faire financer leurs recherches par des fonds privés. Ce n’est pas illégal, ni immoral. Le seul écueil, c’est qu’il y a conflit d’intérêt. Cela se produit quand une équipe financée par un industriel publie des résultats concernant une spécialité produite par cette firme et mise sur le marché de la santé. Le principe du conflit d’intérêt est facile à comprendre. Il se produit lorsqu’il y a un antagonisme entre l’intérêt de la science, qui est de produire de l’exactitude, et l’intérêt de la firme pharmaceutique qui est de vendre sa molécule. Admettons que cette molécule ne soit pas efficace, ou qu’elle engendre des effets secondaires. Le scientifique est face à un dilemme. Doit-il taire quelques expériences, et façonner la présentation des résultats dans un sens favorable à l’intérêt de l’industriel, ou bien mettre en avant la déontologie de la science et publier les résultats bruts, quitte à fâcher l’industriel qui par la suite, pourrait réduire, voire supprimer les crédits ?
Le propre du conflit d’intérêt est de ne pas engendrer un conflit qui se manifeste et s’extériorise. Cela n’a rien à voir avec un conflit pour une zone frontalière riche en ressources. Les pays qui se la disputent peuvent faire parler les armes. Mais vous ne verrez jamais le moindre canif utilisé dans un conflit d’intérêt, sauf celui qui permet de mettre un coup de canif dans le contrat moral que passe l’intéressé avec la déontologie et l’éthique. Autrement dit, si conflit il y a, il est intérieur. Le scientifique est en conflit avec lui-même et parfois, hésite entre l’intérêt supérieur de la science et l’intérêt pécuniaire. Et le conflit est vite résolu. Si le scientifique penche vers la corruption, il agira en mettant dans la balance l’intérêt de l’industriel, mais s’il est un chevalier blanc de la vérité, il optera pour la publication de résultats non tronqués. Dans le premier cas, il y a connivence d’intérêts et dans le second, dissociation des intérêts. C’est de cette manière que le conflit est résolu. Il arrive aussi qu’il n’y ait pas de conflit. Lorsqu’une molécule est vraiment efficace, l’intérêt du laboratoire privé et du scientifique convergent bien évidemment.
Compte-tenu des interconnections et des financements croisés, les conflits d’intérêts sont fréquents. On ne peut les supprimer, à moins d’interdire tout financement privé de la recherche. Mais pour réduire l’impact de ces conflits et inciter les scientifiques à respecter l’éthique, la transparence a été décidée. A la fin de chaque publication, l’équipe signale si elle est exempte de tout conflit d’intérêt ou alors si elle a reçu des fonds privés. On ne rigole pas, surtout chez nos amis britanniques qui ont étendu cette transparence au domaine de la fonction publique, chaque fonctionnaire devant déclarer s’il appartient à la Franc-maçonnerie, au cas où certaines décisions pourraient faire apparaître des connivences d’intérêts.
Si l’on veut coller à l’actualité et illustrer la pertinence de cette question ici soulevée, on prendra appui sur la pandémie grippale où des conflits d’intérêts ont été signalés par la presse. Par exemple Bruno Lina, ou alors, le Dr Flu, alias Dr Osterhaus, expert à l’OMS, dans le collimateur des parlementaires néerlandais. Et le climat. Qui peut prétendre qu’il n’y a pas de conflits d’intérêts entre les activités financières d’Al Gore dans le domaine du financement de l’économie verte (et les « permis de polluer ») et la croisade menée par ce même Al Gore avec l’appui du GIEC pour inciter les pays à s’orienter dans la croissance verte ? Quel est l’Al Gore qui parle au monde, celui qui a intérêt dans ses affaires ou celui qui est convaincu de l’effet des GES sur le réchauffement et de graves problèmes en résultant ? Nos médias n’ont pas été très clairs sur ce sujet mais grâce au Net, la transparence est offerte. Pourquoi les médias de masse ne jouent-il pas de cette liberté en faisant comme dans le cas des publications scientifiques, en signalant à chaque fois qu’il est question d’Al Gore quelles sont ses activités et les conflits d’intérêt en découlant ?
Ces conflits d’intérêts, ils ne datent pas d’une époque récente. Ils sont vieux comme les sociétés humaines régies par le droit. Ils ne se restreignent pas au monde de la science et des industries. On les trouve dans les rouages de la société où parfois, ces conflits sont liés à des affaires de népotisme, parfois de réseaux, maçonniques, énarchiques, communautaires ou autres. Débattre de la transparence serait bien plus intelligent que de discuter sur l’identité nationale.
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Je suis obligé de déclarer un conflit d’intérêt dans la mesure où en publiant ce billet, on peut remonter, en lisant ma fiche auteur, au livre que je viens de publier aux éditions Xenia et qui s’intitule « H1N1 La pandémie de la peur ». Et dans la mesure où la presse est aidée par le gouvernement, il se peut aussi qu’il y ait conflit d’intérêt pour ces journaux qui n’ont pas fait une recension équitable, ou mieux, une critique, de ce livre, qui ne devrait pas plaire à Madame Bachelot