Ces insolites interdictions à l’entrée du Colisée à Rome…

par Paul Villach
vendredi 9 septembre 2011

 À l’entrée du Colisée de Rome devant laquelle piétinait en août dernier la longue file d’attente de visiteurs, une pancarte en italien et en anglais rappelait, comme il se doit, les règles à respecter à l’intérieur de ce monument vénérable (voir photo ci-contre). Il a beau être le symbole de l’infâme politique de voyeurisme tant prisée de gouvernants romains démagogues pour se concilier les faveurs d’une plèbe abrutie qui en était friande – un peu comme l’auditoire de certaines télévisions contemporaines - , il est aujourd’hui un édifice témoin d’une civilisation disparue qui mérite à ce titre le plus grand respect.

On s’attend donc à trouver sur la pancarte les recommandations d’usage pour l’adoption d’une conduite urbaine respectueuse des lieux. Or, pas du tout ! On reste surpris par certaines interdictions insolites que la Surperintendance des sites archéologiques de Rome a dû édicter. On suppose qu’elle ne s’y est résolue que parce qu’elle a dû faire face à des conduites déviantes inimaginables.

Des prescriptions d’usage compréhensibles

1- Ce ne sont pas, bien sûr, les prescriptions de discrétion qui surprennent. L’affluence des groupes est forcément bruyante et leur concurrence en cours de visite tend à faire monter par paliers le ton des guides pour tenter de se faire entendre de leurs auditeurs au-dessus du brouhaha général. Le recours à des mégaphones ou des hauts-parleurs a pu être, un temps, la solution trouvée pour ménager sa voix, mais non les oreilles des voisins ni la majesté des lieux. On comprend que leur usage soit interdit. Les guides disposent d’ailleurs aujourd’hui d’un système de contact discret par radio avec leurs voyageurs équipés d’oreillettes : il leur suffit de parler doucement dans un micro-cravate.

2- Il n’est pas non plus incompréhensible que les visites guidées à l’improviste ne soient pas autorisées. Elles relèvent d’une activité commerciale plus générale qu’il a fallu de manière plus étonnante interdire à l’intérieur du monument : c’est donc qu’appâtés par l’affluence, des marchands du temple s’y étaient introduits sans vergogne pour vendre leur camelote. 

3- Que l’on rappelle enfin qu’il est interdit de fumer n’importe où, et qu’il existe des zones réservées aux fumeurs, est désormais une mesure d’hygiène et de sécurité passée dans les mœurs tant pour ne pas indisposer les non-fumeurs que pour prévenir tout risque d’incendie.

Des conduites aberrantes qui doivent pourtant faire l’objet d’une interdiction

Ce qui, en revanche, est ahurissant, ce sont les autres activités formellement prohibées et même inscrites en tête des interdictions pour capter l’attention du visiteur en priorité. Jamais on n’aurait pensé que des individus normalement constitués pussent s’y livrer dans un des plus fameux monument de l’Antiquité romaine.

1- Il est ainsi interdit de pique-niquer dans le Colisée ! Il s’est donc trouvé des beaufs pour venir casser la croûte et la coque de leurs œufs durs sur les gradins, voire déployer au sol une nappe pour y disposer ses chips, sandwichs ou pizzas avec litrons ou boîtes de bière ou jus de fruit, et abandonner dans les lieux les reliefs de leurs agapes. Curieuse idée tout de même ! L’auraient-ils fait dans une église ?

2- La plus hilarante, cependant, est l’interdiction signifiée d’introduire dans le Colisée bicyclette, planche à roulettes et autres engins motorisés. Pas de doute possible là non plus ! La Superintendance a dû être confrontée à ces conduites fantasques pour devoir les prohiber de façon aussi spécifique. Pourquoi pas, tant qu’on y est, le jeu de ballon, la planche à voile, le cheval ou la pétanque ? Quel esprit dérangé ne faut-il pas avoir pour prendre ce vestige de la Rome antique pour un terrain de jeu, de courses à obstacles ou d’escalade ?

 

L’existence de ces prescriptions inattendues montre en fait le degré d’éducation des visiteurs qui se présentent parfois à l’entrée des sites archéologiques. Le temps et les intempéries ne sont pas les seuls ennemis des monuments antiques. La foule des visiteurs en est un autre, ne serait-ce que par l’usure des pierres sous le piétinement de millions de pieds par an. Un arasement d’un quart de demi-millimètre par deux pieds qui frottent seulement le sol pas à pas, finit par atteindre des dizaines de centimètres si des millions de pas foulent le même sol par an. Quand s’y ajoutent ces conduites destructrices extravagantes que cette pancarte dénonce, on comprend qu’un site archéologique est vulnérable et peut être détruit en quelques années si on ne le protège pas. Paul Villach 

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