Clocheman a deux mots à dire à Borloo et à Villepin...

par Rémi FRITSCH
mardi 25 avril 2006

« Il y a urgence. Je suis déterminé. Je n’ai pas la chance d’être élu, mais je suis représentant d’exclus, et mon combat est honorifique, pour sauver des milliers de vies humaines », me souffle Jean-Paul Fanto, dit « Clocheman », le 21 avril 2006 à 17h, assis dans « son » abribus face à l’Opéra Bastille, au 36e jour de sa grève de la faim...

" Dis bien que je suis sur la place publique, dans les courants d’air et les intempéries !". Chez lui, assis dans "son" abribus, Jean-Paul Fantou me serre la main, me jauge longuement du regard, réfléchit, essaie de rester concentré, cherche ses mots, allume la ènième cigarette de la journée, boit une gorgée d’eau, et me dit :

"Tu vois, j’ai redoublé deux fois le CP, j’étais constamment le 26e élève de la classe, sauf une fois, je suis passé 25e !... Et tu sais pourquoi ? Parce que ce jour-là, le 26e n’est pas venu !".

Respect.

Trouver ainsi la force de plaisanter avec pudeur, ironie, autodérision, sur un passé douloureux, révèle une force de caractère hors du commun, un vrai charisme, et une profonde humanité. Clocheman, ainsi qu’il s’est lui-même surnommé (et c’est le titre de son livre publié le 3 novembre 2005 aux Presses de la Renaissance), en a assez de se heurter à des murs d’inertie, de silence, d’hypocrisie des autorités pour accéder à sa demande.

Ma seule arme étant mon stylo, je lui demande : "A qui veux-tu que j’écrive en priorité ?"

La réponse claque sans attendre : "Je veux rencontrer Monsieur Borloo, ou Villepin."

Clocheman sort alors de son sac à dos des mails imprimés, échangés entre un homme (que j’appellerai PR, de ses initiales), défendant sa cause, et les services du Premier ministre.

Un premier mail du 5 avril 2006 obtient une réponse deux jours plus tard de Madame Nicole Martin, chef du Service des interventions du Premier ministre, qui l’informe que sa "corresondance est signalée au Préfet d’Ile-de-France, aux fins d’un examen diligent et attentif"....

Depuis, rien... Deuxième mail de rappel de PR le 15 avril 2006...

Depuis, toujours rien...

Pourtant, quand on lit les propositions de Clocheman, on ne peut que se retrousser les manches et tout faire pour l’aider à mener son projet à bien, qui nous concerne tous !

Un oncle se plaisait à me dire quand j’étais gamin : "Méfie-toi des apparences, sous chaque cloche il y a souvent un battant qui sommeille".

Hier après-midi, sous Clocheman, j’ai trouvé un vrai battant, fatigué certes, mais plus déterminé que jamais.

Un battant de la trempe de Coluche et de l ’abbé Pierre...

Un battant extrêmement réveillé depuis 36 jours...

La lutte contre l’exclusion doit devenir une grande cause nationale.

Donner à Jean-Paul Fantou un local pour démarrer l’association "Bannissons l’exclusion", ainsi qu’un toit pour se loger décemment, serait la moindre des choses, et un bon début !

J’ai retranscrit fidèlement la note manuscrite de Jean-Paul Fantou :

"Note d’attention" de Jean-Paul Fantou, dit Clocheman, au 36e jour de sa grève de la faim. Il y a urgence. "La Convention européenne des Droits de l’Homme précise que chaque citoyen a le droit et le devoir de dénoncer le dysfonctionnement des institutions quand tel est le cas". Jean-Paul Fantou, en tant que citoyen français, né à Paris rue Saint-Antoine, s’estime donc dans son droit, et se fait un devoir de dénoncer concrètement les dysfonctionnements de notre société française, ainsi que l’inhumanité de décisions absurdes qui aggravent ces dysfonctionnements.

"Qu’on soit clochard, ministre ou ouvrier, nous sommes tous égaux pour dénoncer ce dysfonctionnement. Tout citoyen au courant de ce dysfonctionnement sans le dénoncer se rend coupable et complice de non-assistance à personne en danger. De plus, l’Etat est dans l’obligation de fournir à tout citoyen de quoi vivre décemment pour manger, travailler et faire vivre sa famille". D’un regard encore plus vif et sombre, Jean-Paul Fantou ajoute, après un long silence : "Aujourd’hui, en France, à Paris, dans la rue, on meurt. C’est mon droit le plus strict de dénoncer cet état de fait. C’est pourquoi je suis aujourd’hui en droit d’exiger de rencontrer Monsieur Borloo ou Villepin".

Voici donc la "Déclaration d’attention" de Jean-Paul Fantou, qui leur est destinée : "Si j’ai entamé cette grève de la faim, c’est pour qu’on n’oublie pas les sans-abri, les exclus après le 15 mars. Après cette date, on les oublie et on s’inquiète moins d’eux.

1°) Je demande un rendez-vous d’ urgence car l’ urgence s"impose pour rencontrer les élu(e)s concerné(e)s et les décideurs (M. Borloo et M. Villepin) pour commencer à travailler sur mes propositions. Dans le dernier chapitre de mon livre, je dis que je suis prêt à parrainer le premier lieu de vie et à collaborer à sa réalisation.

2°) Je demande un local d’environ 50 m2 pour pouvoir faire exister l’association "Bannissons l’exclusion", à loyer symbolique sur 3 ans, plus aides pour son fonctionnement.

3°) Un studio social pour vivre décemment.

Signé : Jean-Paul Fantou, dit Clocheman, représentant d’exclus. "

Documents joints à cet article


Lire l'article complet, et les commentaires