Comment l’état de droit a pu être ligoté et bâillonné sans coup férir

par Gilles Mérivac
samedi 25 février 2017

Quand le citoyen lambda regarde les images des quartiers enflammés sans que la force puisse être exercée par la loi, il se demande souvent avec stupeur : mais comment en est-on arrivé là ? Par une gradation inexorable dont l'article relate les principales étapes.

 Le fer de lance du syndicalisme politisé

La principale caractéristique du syndicalisme français d'après-guerre est son étroite association avec les partis politiques, le cas le plus typique étant la CGT considérée comme la courroie de transmission du parti communiste. Les autres syndicats ouvriers, comme FO ou la CFDT, sont plus proches du parti socialiste, à cette époque. Avec un secteur public considérable et des entreprises nationalisées importantes, ils disposent alors de gros bataillons capables de bloquer le pays en déclenchant des grèves illimitées.

Tous les gouvernements successifs sont obligés de tenir compte de cette épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête, la paralysie totale de l'économie. Un ministre dira, parlant de Renault qui était alors une entreprise nationalisée, « il ne faut pas désespérer Billancourt ». Même un parti communiste très minoritaire dans les élections réussissait par ce biais à imposer ses vues, en paralysant la volonté des élus d'appliquer des réformes qu'il ne souhaitait pas.
 

La main mise idéologique sur l'université

Le seul syndicat étudiant véritablement connu est l'UNEF avec ses cinquante nuances de gauchisme. Il maintient son monopole grâce à la gestion des mutuelles étudiantes et de la restauration universitaire, ainsi que par de menus services rendus à ses adhérents. En échange, il diffuse largement une propagande favorable à tous les régimes socialistes de la planète et défile régulièrement contre la guerre au Viet-Nam.

Durant les émeutes de mai 68, il découvre une méthode capable de paralyser les forces de l'ordre et le pouvoir en place, la victimisation bien orchestrée. Il a déjà assimilé cette stratégie en participant avec la CGT, la CFDT et les communistes à la manifestation interdite du 19 décembre 1962 « contre l'OAS et la paix en algérie » qui se terminera avec les morts du métros de Charonne. Ce fut l'une des dernières fois où le gouvernement fit preuve d'une volonté inflexible dans la répression d'une manifestation interdite. Depuis ce jour, le choix entre contenir les débordements et autoriser les manifestations pouvant déraper est devenu une équation impossible à résoudre.

Bien entendu, ce dérapage énorme des forces de police devient rapidement l'objet d'une commémoration et surtout d'un symbole rassemblant toute la gauche contre l'oppression. Une vingtaine d'années plus tard, une autre bavure grave se produisit, donnant une image désastreuse des forces de l'ordre, la mise à mort à coups de matraques de l'étudiant Malek Oussekine, supposé faire partie des « casseurs » lors des manifestations de 1986 contre le projet Devaquet. Il s'agissait d'un texte de loi permettant de sélectionner à l'entrée de l'université, mais les étudiants refusaient de telles mesures jugées élitistes, et fort

Il faut ici souligner un point important et même décisif pour la suite des événements, peu importe que le projet fut raisonnable ou pas, qu'il améliorât la situation des universités ou non, à partir d'un seul dérapage qui n'avait rien à voir avec ce texte, celui-ci était condamné. La situation actuelle offre de nombreux cas similaires ou la médiatisation outrancière de faits divers annule d'un seul coup des possibilités de réforme intéressantes.

La leçon tirée de ces colères légitimes et de leurs conséquences était dorénavant d'une simplicité enfantine, il suffisait de provoquer suffisamment de réactions policières conduisant à des bavures quasiment inévitables dans le feu de l'action pour que le décret ou la loi déplaisante soit retirée automatiquement. Progressivement, les syndicats étudiants et lycéens prenaient conscience de leur pouvoir. Ils seront en première ligne contre la réforme de la sécurité sociale de Juppé en 1995.

Cependant, il devient de plus en plus clair qu'en prenant de l'importance, le premier syndicat étudiant se sclérose et devient un marchepied pour obtenir des postes politiques en rémunérant de façon opaque des jeunes loups socialistes comme Cambadélis, Le Guen ou Valls. L'affaire de la MNEF éclate en 1998, et les fonds détournés à cet effet apparaissent dans le rapport de la Cour des comptes. Depuis lors, ce syndicat a beaucoup perdu de son mordant, mais les méthodes qu'il employait contre la police dans les manifestations vont trouver de nouveaux émules dans les quartiers qui deviendront des zones de non-droit.
 

Le noyautage des centres d'opinion et de formation

Ces étudiants sensibilisés aux thèses libertaires et anti-policières à l'université et dans diverses écoles fonctionnant de la même façon comme les écoles de journalisme ou de droit, se retrouvèrent ainsi dans les salles de rédaction des principaux journaux qui basculèrent peu à peu à gauche pour la plupart, ou dans les salles des tribunaux où ils firent primer une conception particulière du droit.

Ainsi, en 1974 la harangue de Oswald Baudot recommande d'avoir un préjugé en faveur « de la femme contre le mari, pour l'enfant contre le père, pour le débiteur contre le créancier, pour l'ouvrier contre le patron, pour l'écrasé contre la compagnie d'assurances de l'écraseur, pour le malade contre la sécurité sociale, pour le voleur contre la police, pour le plaideur contre la justice ».

Nous sommes très loin du jugement de Salomon qui donnait raison à la partie à qui on avait fait le plus de tort, cette thèse écartait crûment l'égalité des citoyens devant la loi. C'est pourtant cette interprétation qui a été vigoureusement soutenue par le syndicat de la magistrature formé aux idées de mai 68, en évitant des sanctions à ce magistrat. C'est ce même syndicat qui s'illustre plus tard « brillamment » avec le mur des cons, la présidente sera finalement jugée après moult tergiversations qui témoignent de l'embarras du pouvoir et du ministère de la justice.

La situation n'est pas meilleure pour les autres écoles, par exemple avec Sciences-Po très marquée à gauche, où les intervenants proviennent presque tous des rangs socialistes, et où il est presque impossible de s'y revendiquer de droite.
 

La montée inexorable des revendications communautaires

Comme nous l'avons vu plus haut, le principe directeur pour obliger un gouvernement à reculer, est de l'affaiblir en le culpabilisant au maximum afin de la faire apparaître odieux aux yeux de la population, toutes les causes qui peuvent y contribuer sont donc les bienvenues. L'accueil de nombreux immigrés en provenance du Maghreb et principalement d'Algérie va en fournir une sur mesure. C'est un euphémisme de dire que la décolonisation en Algérie s'est mal passée, elle a profondément divisé le pays entre « pieds-noirs » et « porteurs de valises », et les atrocités commises après les accords d'Evian n'ont pas arrangé les choses.

Il aurait donc été étonnant que les immigrés algériens aient été bien accueillis et régulièrement des frictions entre communautés se produisent qui sont très vite qualifiées de racistes. Ce qui donne une cause supplémentaire à défendre et naissent ainsi des associations telles que SOS racisme proche du parti socialiste, le MRAP et la LICRA. On doit noter cependant que le « pote » dont il n'est pas question de toucher n'est ni blanc ni asiatique, il s'agit donc déjà d'associations communautaires, même si le terme n'est pas revendiqué.

Ces associations partisanes se portent donc parties civiles devant les tribunaux, réussissant souvent à faire infliger une double peine à l'inculpé, au mépris de l'égalité devant la loi. Mais elles n'atteignent leur pleine puissance qu'après la promulgation des lois Pleven et Gayssot, qualifiées d'antiracistes et antinégationnistes. Ces lois permettent de considérer comme délit tout travaux d'historien contraires aux affirmations officielles qui sont alors gravées dans le marbre.

Avec le regroupement familial sous Giscard, les banlieues comment à se remplir d'immigrés qui prennent conscience de leur nombre et commencent à contester de plus en plus violemment les contrôles ou les arrestations dont ils sont l'objet. Tous le gouvernements essaieront sans succès de développer ces quartiers, adoptant même la notion de discrimination positive, instaurant parfois une police de proximité, rien n'y fait, la dynamique d'opposition est la plus forte et se développe sans cesse, menaçant constamment les services publics qui y interviennent encore à leurs risques et périls.

En 2005, deux adolescents, Zyed Benna et Bouna Traoré, meurent en se réfugiant dans un poste électrique pour échapper à un contrôle de police. C'est immédiatement l'embrasement des banlieues, notamment celle de Clichy-sous-Bois. C'est aussi l'occasion pour les forces de gauche de se ranger derrière les émeutiers, affaiblissant un peu plus un pouvoir dont l'autorité est déjà vacillante.

La situation va empirer peu à peu, dans ces zones où les forces de l'ordre ne peuvent entrer qu'en groupes importants, la nature ayant horreur du vide, une contre-culture s'installe faite de trafic de drogues, de discours salafistes, résolument anti-française. De ce terreau naîtront les futurs terroristes comme Mehra ou Nemmhouche.

L'affaire Théo est le dernier fait révélateur de cette triste évolution. La démission et le laxisme de l'état sont devenus tels que, avant que la justice n'ait statué sur le cas, le chef de l'état s'est précipité à l'hôpital pour assurer Théo de son soutien. Par cette action, il fait clairement allégeance à ceux qui contestent la loi et qui développent une haine anti-française sur notre territoire.

La messe est dite.


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