Coronavirus : « Je savais que la vague du tsunami était devant nous », Agnès Buzyn
par Panorama Media
mercredi 18 mars 2020
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Dans un entretien donné au journal Le Monde, Mme Buzyn raconte avoir "pleuré" lorsqu'elle a quitté ses fonctions gouvernementales le 17 février pour mener la bataille des municipales à Paris sous la bannière de LREM. "Quand j'ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections n’auraient pas lieu".
"Le 11 janvier, j'ai envoyé un message au président sur la situation. Le 30 janvier, j’ai averti Édouard Philippe que les élections ne pourraient sans doute pas se tenir", a ajouté Mme Buzyn, médecin de profession.
Elle confie aussi que la dernière semaine de campagne "a été un cauchemar" : "J'avais peur à chaque meeting. J’ai vécu cette campagne de manière dissociée." Selon des sources concordantes, dimanche, après le premier tour, elle s'est encore emportée : "Je veux mettre fin à cette mascarade des élections, ça suffit". Plus tôt dans la semaine, l'ex-ministre de la Santé avait plaidé en vain pour un report du scrutin auprès d'Emmanuel Macron.
Les révélations d'Agnès Buzyn ont semé le trouble dans la classe politique, jusque dans son propre camp. La porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a rappelé mardi "l'engagement" de Mme Buzyn "en tant que ministre du gouvernement puisqu'elle a eu l'occasion elle-même, aux responsabilités, de mettre en place les premiers éléments d'organisation autour de la gestion de cette crise". Une source parlementaire de La République en marche a fustigé auprès de l'AFP "des propos irresponsables" et prévenu : "Elle devra en répondre en temps voulu". "Cette interview au Monde a scié les jambes de beaucoup de monde", résume une proche de la candidate lors de la campagne, alors qu'Édouard Philippe, mardi soir au 20H00 de France 2, devrait répondre à son ancienne ministre."Elle craque psychologiquement. Ce n'est pas parce qu'on a une intuition que par ailleurs on prend des décisions d'Etat", déplore un autre proche de Mme Buzyn. Interrogée dimanche au soir des résultats du premier tour des élections municipales par l'AFP, elle avait confié : "L'heure est grave... dans 15 jours, c'est la Bérézina à Paris !" Elle avait assuré avoir dit la même chose au président Emmanuel Macron.
Dimanche soir, Agnès Buzyn avait suspendu sa campagne en disant vouloir n'être "que médecin". Lundi, elle a écrit à ses militants qu'elle "arrêtait" sa campagne. "Les conditions ne sont plus réunies pour continuer une campagne électorale" et "la priorité est à la lutte contre le coronavirus".
Des propos qui ont fait vivement réagir l'opposition
Dans l'opposition, les critiques ont été crescendo : des propos "effarants" pour Marine Le Pen, "consternants" selon Jean-Luc Mélenchon. "A-t-elle su et prévenu trois mois avant ? Et dans ce cas, pourquoi rien n'a-t-il été fait ?", a encore interrogé le chef de file de La France insoumise, en appelant la mission d'information décidée mardi matin en conférence des présidents à l'Assemblée nationale de "se saisir de ces aveux".
"L'heure est à l'union sacrée pour protéger les Français", a réagi mardi Guillaume Peltier, qui assure la présidence par intérim de LR, en déplorant toutefois des propos "graves" qui "ne pourront pas rester sans suite".
Le sénateur PS David Assouline s'est pour sa part étonné que, le 24 janvier, alors ministre de la Santé, Agnès Buzyn affirmait que "le risque d’importation depuis Wuhan (du virus) est quasi nul". "Elle confie donc aujourd’hui qu'elle a menti publiquement dans l'exercice de ses fonctions", s'interroge le parlementaire.
Le numéro un du PCF Fabien Roussel a encore dénoncé des déclarations "graves", "car elles montrent le plus laid visage de la politique, celui du mensonge, de l'opportunisme et de la lâcheté".