Courroye un autre des scandales de l’affaire Bettencourt
par Imhotep
jeudi 9 septembre 2010
Il y a quelques informations qui sont bien éphémères et pourtant elles sont essentielles. C’est le cas dans l’affaire Bettencourt. On sait que Woerth a menti de nombreuses fois. On suppose qu’il y a cette autre affaire d’état du financement illégal de la campagne de Nicolas Sarkozy par de l’argent liquide provenant de madame Bettencourt. On sait aussi cette histoire de légion d’honneur. Mais on s’intéresse peu à un certain OUart, en fait au petit groupe Maistre, Ouart, Sarkozy, Courroye et Bettencourt auquel il faut ajouter le photographe avide.
La presse s’est beaucoup intéressée à la comptable voulant la discréditer plusieurs fois. Le Monde s’y était mis à moitié et la Pravda complètement. On a sorti une lettre dont j’ai parlé. Or il y a une partie effrayante dans cette histoire Bettencourt. On y trouve deux volets. Le volet Banier et le volet justice.
Parlons un peu de Banier. Bettencourt est finalement son chef d’œuvre. Mais ce n’était pas son coup d’essai. Voici un extrait édifiant de l’Express : Quand il ne crochète pas le coeur des hommes, Banier chatouille, sans complexe, l’Oedipe de vieilles femmes esseulées. Bien avant Liliane Bettencourt, il envoûte la comtesse Marie-Laure de Noailles, dont quelques meubles d’une valeur inestimable décorent aujourd’hui les appartements de la rue Servandoni. Puis il jette son dévolu sur Sao Schlumberger, l’épouse du magnat du pétrole. En 1975, cette milliardaire fantasque cherche à lancer la carrière de dramaturge de son turbulent protégé. Sa pièce, Hôtel du lac, est donnée au Théâtre moderne. "Schlumberger a avancé 35 millions d’anciens francs", révèle le toujours très informé Paul Morand, dans son Journal inutile (Gallimard) au 23 août 1975. Avant d’observer, vachard, après quelques représentations : "La pièce de M. Banier, un four. 35 millions."
Une vingtaine d’années plus tard, l’artiste protée s’essaie à amadouer Betty Lagardère, l’épouse du capitaine d’industrie. "Un jour, dans son atelier, Banier me montrait ses tableaux, qu’il se vantait de vendre à des prix astronomiques, se souvient un ami de Jean-Luc Lagardère. Puis, sans crier gare, il m’a demandé de le mettre en contact avec Betty. J’en ai déduit quel était son nouveau métier : homme de compagnie pour vieille dame fortunée."
Le jeune homme susurrant à l’actrice italienne Silvana Mangano - de dix-sept ans son aînée - qu’elle était "la plus belle femme depuis Néfertiti" s’enivre, parfois, d’un excès de cynisme. "J’ai fait le fils mort chez beaucoup", reconnaissait-il, bien avant qu’une hypothétique adoption par Liliane Bettencourt ne défraie la chronique. En 1972, Banier déboule à L’Express, où il a décroché un rendez-vous avec Françoise Giroud. La directrice de l’hebdomadaire vient d’enterrer son fils unique, décédé dans un accident de montagne. "Je viens pour remplacer l’enfant que vous avez perdu", attaque son visiteur. La réponse cingle : "Monsieur, sortez !"
On peut lire dans le même journal ce portait qui est autant à vomir par ce qu’il décrit que par la complaisance cynique et amorale de celui qui écrit : Paul Morand : "Mon déjeuner chez Banier"
Le 16 avril 1975, le grand romancier est convié chez Banier. Il consigne ce moment dans son Journal inutile (Gallimard).
"Déjeuner chez François-Marie Banier, dans son logement sous les toits de la rue Servandoni, avec un ami, très beau et silencieux. Service en blanc par indigène. [...] F.-M. Banier, très sévère pour ses aînés : Cocteau, Mauriac, Montherlant. Quand F.-M. B. se met en colère, il est superbe, éclatant, ses yeux ardoise jettent du feu, son long cou se gonfle, sa bouche se rétrécit, devient mauvaise, il est vraiment très beau, dur, cassant, d’une violence qui ne cesse pas d’être élégante ; très drôle dans ses imitations d’un Mauriac aphone et séduit, d’Aragon, de Marie Laure de Noailles ; sur un paysage de toits."
Morand qui parle de superbe la colère de Banier, une colère avec pourtant une bouche mauvaise. Le voilà beau en colère le photographe gigolo, la crapule spoliatrice ! Ah ce monde-là est bien pourri bien plus que jusqu’à la moelle.
Comme je vous le disais il y a quelques informations qui restent dans les tiroirs des journaux après n’avoir été sorties qu’une fois. C’est le cas des notes de Banier qui accusent Sarkozy d’avoir redemander de l’argent à madame Bettencourt entre les deux tours de la présidentielles de 2007. C’est le cas aussi de l’enquête poussée et intéressante de France Inter qui prouve que la brigade de police était convaincue de l’abus de faiblesse à l’encontre de madame Bettencourt : En fait, comme le montre un rapport de synthèse du 1er décembre 2008 auquel France-Inter a pu avoir accès (et dont le Journal du Dimanche avait, pour la première fois, révélé les conclusions, le 6 décembre 2009, s’attachant surtout à détailler les largesses de Liliane Bettencourt à François-Marie Banier et ses proches), les enquêteurs penchaient alors clairement pour un « abus de faiblesse » au détriment de la milliardaire, considérant que « certains faits » détaillés dans ce rapport « tendent à confirmer l’existence de ce délit », concluant à un « faisceau de présomption quant à la réalité d’un abus de faiblesse » commis par François-Marie Banier.
C’est donc aussi le cas de cette information qui concerne l’interrogatoire de la secrétaire particulière d’André Bettencourt le 31 août dernier par la juge Prévost Desprez, qui, elle, semble faire son travail avec une célérité peu habituelle dans cet autre monde-là qui souvent prend son temps surtout pour protéger les puissants quand elle a usé de tous les artifices, et qu’ils sont épuisés, pour les épargner . Le NouvelObs : Selon les propos qu’elle a tenus lors de son audition, dont le site d’information publie des extraits, elle a raconté comment l’état de santé de Liliane Bettencourt s’était dégradé à partir de 2003 tandis que François-Marie Banier devenait peu à peu "plus qu’un gourou" pour elle. "Il avait une emprise totale sur elle et priorité sur tout et tout le monde," estime-t-elle.
Et de surcroît, il avait un "comportement irrespectueux" envers son ex-patronne. "Il appelait Liliane Bettencourt ’ma grosse’".
Des absences
Sachant que Liliane Bettencourt "avait déjà des pertes de mémoire", Christiane Djenane fait néanmoins remonter l’apparition des problèmes de santé de son ancienne patronne à son hospitalisation de mars 2003. Elle aurait ensuite été sous antidépresseurs et Rivotril, sur les conseils d’un médecin recommandé par François-Marie Banier. Ce qui l’aurait mise dans un état d’hébétude qui se serait "amélioré" avec l’arrêt de ces médicaments.
Après l’hospitalisation de son époux André Bettencourt en août 2006, Liliane Bettencourt a eu "de plus en plus d’absences", souligne ensuite son ex-secrétaire particulière. Un "état qui ne s’est pas amélioré du tout jusqu’à mon départ en février 2007", ajoute-t-elle.
Harcèlement
C’est dans ce contexte que le photographe, à en croire l’ancienne secrétaire, la "harcelait pour qu’elle mette le chéquier dans le sac de Liliane Bettencourt quand ils partaient déjeuner ensemble", ainsi que du "papier à en-tête ’18, rue Delabordère’" (adresse de Mme Bettencourt, ndlr) vierge.
Christiane Djenane a aussi raconté avoir établi deux chèques, juste avant son départ, en février 2007, en présence de Liliane Bettencourt et de François-Marie Banier "d’un montant respectif de 50.000 et 60.000 euros je crois."
Et si elle a été licenciée, c’est à ses yeux l’artiste qui en est responsable : "J’imagine que je gênais François-Marie Banier", a-t-elle expliqué, précisant qu’il lui était arrivé de confisquer le chéquier de Liliane Bettencourt.
C’est lui aussi qui aurait été à l’origine de la rupture entre la mère et la fille : "François-Marie Banier a détruit leur relation, il s’y est employé pendant des années", juge Christiane Djenane.
Il faut savoir que cette secrétaire a été licenciée en 2007. Cette autre information a son importance. En effet, à la fois ce témoignage et à la fois cette date de licenciement conforte l’analyse que j’avais faite du courrier de François Meyers Bettencourt à la comptable. Il devient évident que le témoignage de la comptable est confirmée par ce témoignage, comme sont confirmées par le fait-même du licenciement de la secrétaire la crainte de la comptable et sa prise de risque en témoignant de son possible licenciement. Ce qui s’est avéré par la suite.
Venons en au fait judiciaire. On sait tout ce qu’il y a d’anormal et amoral dans le fait que le procureur Courroye ne se soit pas dessaisi de cette affaire car il est cité dans les enregistrements clandestins du majordome. Et on ne peut qu’être conforté dans l’idée que tout cela n’est pas clair quand Maistre a été à nouveau placé en garde à vue le 25 août dernier, que le procureur est au courant depuis mi août des courriers de Maistre, depuis bien avant des notes de Banier accusant Sarkozy, depuis avant aussi de la lettre de Woerth au candidat ministre avec à la main : je t’en reparle et que, à ce jour 9 septembre 2010, le parquet n’a transmis aucune demande au conseil des ministres pour l’autoriser à réentendre Woerth (Maistre a été entendu le 25 août), qu’aucune perquisition n’est faire ni à l’UMP, ni chez les époux Woerth, que les comptes de campagne ne sont toujours pas saisis, que Sarkozy n’est toujours pas inquiété et qu’Ouart est absent définitivement de toute procédure. Souvenons des enregistrements (Le Point) dans lesquels Maistre annonce le qu’Ouart lui a certifié que Courroye classerait l’affaire ce qui sera fait le 22 septembre, que le 22 juin 2009 Maistre va à l’Elysée à la demande d’Ouart pour parler de l’affaire qui oppose la fille à Banier en réalité et non à la mère qu’elle veut protéger alors que l’avocat Goguel rencontre Courroye. Le 21 juillet, soit deux mois avant l’annonce officielle, Maistre dit à madame Bettencourt que Courroye allait classer l’affaire. On sait également que Maistre a rencontré au moins deux fois Sarkozy personnellement dont une fois avec madame Bettencourt le 5 novembre 2008.
Une question devra trouver sa réponse : pourquoi Courroye a-t-il classé l’affaire alors que le rapport de police concluait à un évident abus de faiblesse et alors que ce témoignage de la secrétaire de feu André Bettencourt est accablant ? N’oublions pas que la demeure de madame Bettencourt a été perquisitionnée pour y retrouver les petits papiers planqués par la femme de chambre, petits papiers qui pourront confirmer les dires de tous ces témoins qui affirment que ceux-ci servaient tout à la fois à maintenir la veuve dorée sous influence et afin qu’elle dise ce qu’il faut à qui il faut. Il faut se rapporter à ce témoignage cité plus haut, témoignage effrayant et édifiant. Banier, d’après ce témoignage terrorisait en fait madame Bettencourt. Les enregistrements le confirment car parfois elle demandait à Maistre (en fait elle tombait dans une autre gueule de loup) de la protéger de la violence et de l’insistance de Banier. En suivant cette histoire on se rend compte que ceux qui voulaient la protéger (cette secrétaire qui cachait le carnet de chèque, ou la comptable qui refusait aussi de faire des chèques ou de ramener les bijoux du coffre de la banque à la demeure de Neuilly pour ne pas les mettre à disposition de Banier) furent éjectés par Banier avec la complicité de Maistre.
Voici une hypothèse que je vais émettre, digne des romans les plus noirs. Bettencourt avec son immense fortune est une proie évidente. Son état de santé en fait une proie facile. Les scrupules au contraire de l’avidité ne semblent pas être la qualité première du trio Sarkozy, Banier et Maistre. Banier, le premier sur le dos de la bête s’est bien servi (on parle d’un petit milliard d’euros, dont chacun d’entre nous ferait bien son quatre heures, même avec 1 %). Maistre arrive là-dessus et il voudrait bien une part du grand gâteau. On le voit à sa rémunération (2,2 millions d’euros par an) mais surtout au 5 millions reçus et à son incongrue demande de voilier de 21 mètres de long. Il a une partie à jouer, prendre peu à peu la place de Banier. Cependant l’aigrefin et photographe a une adversaire coriace en la fille. Par ricochet toute attaque contre Banier peut riper sur Maistre. Il faut donc protéger Banier en partie pour se protéger lui-même. A se stade entre en jeu Nicolas Sarkozy (hmmm c’est une hypothèse, bien entendue). Il aurait déjà touché des enveloppes mais là c’est du plus lourd, et du plus gros. La campagne présidentielle (la suivante). Il faut du magot. Si la fille réussit à faire mettre sous tutelle c’est la cata du côté du trio. Banier lui est progressivement sur la touche, et malgré son appétit insatiable, il a déjà reçu quelques bons picaillons pour son estomac d’autruche plaqué platine format XXXL. Il y a donc une alliance objective entre Sarkozy et Maistre afin que la veuve reste sous influence, cette influence étant celle de Maistre, l’habile grand chambellan à la technique radicalement opposée à celle de Banier. A la terreur il oppose la douceur et le sourire. Lui ne va pas pisser dans les tasses à thé debout sur la table. Il fait le baise-main et apporte des fleurs. Il faut donc, coûte que coûte, empêcher cette mise sous tutelle. Rappelons que Maistre cotise au Premier cercle mais est aussi un excellent rabatteur et par dessus tout a la haute main sur la fortune Bettencourt par l’influence majeure qu’il a sur la veuve. Il suffit d’écouter avec quelle facilité il obtient les fameux trois chèques pour la bande Pécresse, Woerth et Sarkozy. Dans cette noire hypothèse qui confine à un énorme scandale impliquant la justice, Sarkozy et Maistre ont intérêts liés. Pour eux pas de tutelle. Maistre pourra se faire offrir son bateau, et Sarkozy financer l’UMP et sa future campagne. Ainsi Sarkozy compterait-il sur Maistre pour obtenir de l’oseille, la veuve restant sous influence, et Maistre compterait-il sur Sarkozy pour influencer la justice pour leur grand bien à tous les deux. Ouart serait le messager actif et Courroye serait l’instrument. Eva Joly a du reste accusé Courroye de se fourvoyer. Pour l’instant ce procureur s’est contenté d’aboyer dans la Pravda, mentant au passage ou étant alors très très mal informé, sans pour autant l’attaquer en diffamation, arme pourtant si facilement utilisée, du moins en parole. Vous noterez qu’Ouart, la cheville ouvrière, cité pour être intervenu au plus près de cette affaire Bettencourt disparaît des journaux et passe au travers des gouttes judiciaires. Il n’est toujours pas interrogé.
Courroye pourrait donc bien être au cœur d’un scandale politico-judiciaire explosif.
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Sarkozya delenda est !