De François Ruffin à Marine Le Pen, la haine en bandoulière

par Henry Moreigne
vendredi 5 mai 2017

Des deux côtés, ils affirment porter la voix du peuple et, à ce titre, être le messager de leur colère. Dans une stratégie calquée sur celle de Donald Trump, Marine Le Pen dans son débat contre Emmanuel Macron a ainsi choisi de tomber le masque pour nous offrir son vrai visage marqué par la violence et la haine, à l'opposé se son affiche officielle. La haine à l’égard d’Emmanuel Macron, c’est également le fil conducteur de la tribune signée par François Ruffin, l’une des figures des Insoumis, dans Le Monde. L’une des leçons à retenir de cette élection présidentielle, c’est que les extrêmes, qu’elles soient de droite ou de gauche, constituent les deux faces d’une même pièce et usent des mêmes ficelles.

Et cela commence par un vocabulaire commun qui stigmatise « les petits marquis poudrés », « les élites », « les codes », « ces gens là ».

« J’incarne l’irruption du peuple dans l’entre soi suranné des élites », « J’ai été à la table de ce débat la voix du peuple, l’expression de la colère de cette majorité silencieuse qui n’en peut plus de l’abandon à laquelle on la confine » a ainsi déclaré Marine Le Pen le lendemain de sa prestation médiatique. Des propos que l’on pourrait placer indifféremment dans la bouche de Jean-Luc Mélenchon notamment lorsqu’elle ajoute « Ma voix n’a été que l’écho de la violence sociale qui va exploser dans ce pays« .

Il y a de quoi être effrayé devant cette violence, qu’elle soit en filigrane ou physiquement exercée dans les réunions publiques pour le FN ou dans la confrontation directe avec ses adversaires politiques, façon Insoumis, par les jets d’œufs ou les concerts de casseroles.

Le problème avec la violence verbale, c’est qu’à force d’en user elle finit par s’exercer physiquement, notamment lorsqu’on légitime à longueur de discours son usage et donc qu’on la normalise.

« (…) j’ai discuté avec des centaines de personnes, et ça se respire dans l’air : vous êtes haï » écrit François Ruffin à destination d’Emmanuel Macron dans une diatribe où l’auteur cache son aversion personnelle derrière un sentiment collectif supposé.

« Vous êtes détesté d’emblée, avant même d’avoir mis un pied à l’Elysée » assène le Mélenchoniste patenté. Une phrase qui résume tout. L’intransigeance, le procès d’intention et le refus de faire réussir la France même avec un président dont on ne partage pas les idées. La seule chose qui compte ce serait donc le CV. Une nouvelle forme de déterminisme social où les individus seraient les otages de leur milieu, de leurs études, de leur vie professionnelle.

Il est toujours présomptueux de vouloir parler au nom des autres. Mieux vaut pour cela avoir une légitimité populaire acquise sur la base du suffrage universel. Or les urnes ont parlé et JL Mélenchon n’est pas au second tour.

Les élections législatives offriront l’occasion de mesurer le rejet supposé du futur président de la République. Mais, de la même façon que la prestation de Marine Le Pen a été contre-productive, il n’est pas sûr que les promesses de chaos, les aigreurs et les rancœurs constituent un programme attractif.

Ce n’est pas d’enragés la bave aux lèvres dont notre pays a besoin mais de personnes engagées dans un redressement collectif partagé qui ne soit pas synonyme de recul social mais au contraire, de reprise en main de notre destin, de la place de la France dans l’Europe et dans le monde, et de consolidation de notre modèle social, de notre contrat social. Ce qui nous réunit donc et pas ce qui nous divise.


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