De la guerre d’Algérie - n° 1

par Nicole Cheverney
mardi 2 août 2022

La Génèse.

La reddition d’Abd-El-Kader met un terme à la période la plus sanglante de la conquête qui s’étendit de 1830 à 1850.

« Les tribus sont lasses de la guerre et la chute de leur chef de file a provoqué un choc psychologique dont elles ne se relèveront que sporadiquement. Les Algériens ont pris la juste mesure de la force de l’adversaire qui a, pour sa part, tiré les leçons de ses échecs sur le terrain et s’est adapté, au fil des ans, aux réalités tactiques spécifiques du pays ».

La Constitution de 1848 déclare l’Algérie territoire français. Ce territoire est géré depuis Paris. Le gouvernement républicain transforme en trois départements distincts, les trois provinces de la Régence : Oranie, Constantinois, Algérois.

A la demande de Napoléon III, entre 1860 et 1865, les législateurs vont travailler sur des textes législatifs « assurant le respect de la propriété des tribus arabes sur des territoires dont elles ont la jouissance permanente et traditionnelles ».

Napoléon aimait l’Algérie, il disait à ce sujet : « L’Algérie n’est pas une colonie proprement dite, mais un royaume arabe. Les indigènes comme les colons ont un droit égal à ma protection. Et je suis aussi bien l’empereur des Arabes que l’empereur des Français ».

14 Juillet 1865.

Un Senatus-Consulte ouvre aux Indigènes musulmans « la voie de la nationalité française, ainsi que la citoyenneté française ».

Il décide que tout Musulman devenu Français continuera d’être régi – juridiquement – par la loi musulmane (coranique). Mais il pourra sur sa demande être admis à « jouir des droits du citoyen, dans ce cas, il est régi par les lois civiles et politiques de la France ».

En clair, les Musulmans déclarés Français restent régis par leur statut religieux cependant incompatible avec la citoyenneté française. Nuance de taille, qui va constituer la pierre d’achoppement dans le cadre de la politique. La plupart des Musulmans ne renonceront jamais à leur religion, à leur Loi coranique. Malgré ce, ils sont admis à entrer dans l’armée (terre/mer) et à remplir des fonctions civiles en Algérie. Ils peuvent désormais participer à la vie politique (électeurs et éligibles) dans les conseils municipaux est généraux. Ces dernières dispositions napoléoniennes seront abrogées par la 3eme République.

Depuis 1830, il existait en Algérie une rivalité civile militaire exacerbée par Bugeaud et qui se développa tout au long des années suivantes, sous l’Empire jusqu’à l’avènement de la République en 1870. Les civils acceptaient mal la tutelle des militaires. D’autre part, la population civile ne cessait d’augmenter et leur nombre commençait à peser de tout leur poids dans les affaires de la collectivité. L’arrivée importante d’Alsaciens-Lorrains en Algérie après Sedan, en 1870, (voir paix de Francfort), renforçait doublement le poids des civils.

La chute du second Empire avec Napoléon III après la défaite de Sedan en 1870 ouvre la voie à d’autres perspectives, les Républicains bien décidés à « ce que la République française s’aligne sur les objectifs algériens » : se débarrasser des militaires. Gambetta accède à leurs desiderata. Le pouvoir est confié aux seuls civils.

La 3ème République, dès son avènement, décide d’adopter une politique d’assimilation très difficile à mettre en œuvre, du fait des ses multiples contradictions.

« Il peut paraître paradoxal que les hommes de gauche de la jeune république soient plus « colonialistes » que leurs prédécesseurs monarchistes ».

En effet, le roi Charles X avait longtemps traîné les pieds avant d’engager la France dans la conquête. Mais les membres du Gouvernement de la troisième république, sont particulièrement impliqués par l’extension de la colonisation/implantation. Bien que n’ayant qu’une connaissance superficielle de tous les dossiers concernant cet immense territoire, ils s’engagent complètement dans leurs projet d’implantation de 100 000 européens dont 50 % de Français métropolitains. Le reste de la population sont des Maltais, Espagnols, Italiens, poussés à l’émigration, souvent par la misère qu’ils vivent dans leurs pays respectifs. Ils se cherchent un nouvel Eldorado ; ces immigrés se situent à divers niveaux d’origines sociales. Parmi eux, une toute petite poignée d’aventuriers, vite rebutés par le peu de perspectives économiques qu’offre le pays. Ils repartiront aussi vite qu’ils sont venus.

Le gros de l’afflux de population qui fera souche sont paysans, artisans, ouvriers, fonctionnaires et militaires.

Adolphe Crémieux.

C’est le nouvel homme fort du régime mis en place. Avocat, ténor du barreau, Président de l’Alliance israélite universelle, il déclare vouloir « assimiler complètement l’Algérie à la France ». Pas moins de 58 décrets signés tous de la même date, le 24 octobre 1870, seront promulgués sous son influence qui n’est pas moindre.

Mais le plus emblématique, et très lourd acte d’Adolphe Crémieux, aux lourdes conséquences politiques, psychologiques, sera d’accorder aux 35 000 Juifs d’Algérie la nationalité française que l’on refuse aux Musulmans ou du moins sous certaines conditions inapplicables au regard de l’Islam.

Cette distinction juridico-politique entre Juifs et Musulmans provoque la colère de ces derniers. L’agitation et à son comble dans les Tribus, « dont les chefs se reprennent à douter des intentions véritables des Français ».

Le Bachaga Mokrani « canalise » le mécontentement. Aidé d’El Haddad, chef de la Confrérie des Rhamayas, il organise le soulèvement de 150 000 Kabyles. L’Algérie est en état d’alerte permanent, d’Alger au Sahara, et de terribles affrontements entre les forces françaises et les troupes de Mokrani ont lieu. Au terme de ces affrontements où la Kabylie perd son autonomie, la IIIeme République peut enfin appliquer « sans réserve » la politique d’assimilation avec le Code de l’Indigénat… « fil des incompréhensions réciproques des populations d’Algérie ».

Albert Grévy en 1870 accède au poste de Gouverneur général. Il s’agit du frère du Président de la République Jules Grévy. Il s’applique à « rattacher complètement les affaires de l’Algérie à celles de la Métropole ». Les Européens d’Algérie protestent contre cette main-mise parisienne des affaires algériennes.

Le 19 Décembre 1900, l’autonomie financière de l’Algérie est prononcée.

En 1910, les délégations financières « vont constituer l’embryon d’un Parlement qui deviendra après la seconde guerre mondiale, « l’Assemblée algérienne », siège - Palais Carnot à Alger, sur le modèle du Palais Bourbon à Paris.

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Sources bibliographiques :

Encyclopédies Alpha, Larousse, Quillet.

Le destin tragique de l’Algérie française – Collection dirigée par P. Miquel.

 


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