Des militaires lanceurs d’alerte injustement priés de se taire
par Régis DESMARAIS
mercredi 28 avril 2021
Nos gouvernants n’aiment pas être dérangés ni interpellés. Ils détestent les lanceurs d’alerte si facilement qualifiés de « complotistes » et presque « d’ennemis intérieurs ». Des militaires ont décidé d’alerter le pouvoir sur les dangers à venir si rien n’est fait. La réponse à cette alerte est cinglante et prévisible : honte à ceux qui osent alerter. Les lanceurs d’alerte seraient-ils plus dangereux que les délitements en cours ?
Une polémique enflamme le ministère des Armées et certains médias à la suite de la publication d’une « Lettre ouverte à nos gouvernants » signée aujourd’hui par 7 754 militaires. Si l’on veut mesurer le niveau de délitement d’une société, il suffit de comparer le contenu d’un texte à ce qui en est dit publiquement par ses détracteurs.
La lecture de cette lettre ouverte est, en ce sens, un modèle. Le contenu de ce document est incontestablement un texte antiraciste, fédérateur, humaniste et dénonciateur de dérives qui portent en elles le racisme, la violence, l’ignominie et le chaos.
Ces militaires se font lanceurs d’alerte. Ils dénoncent l’état d’une société et le glissement en cours qui, si rien n’est fait, ne peut que conduire au chaos. Dénoncer un risque de chaos n’est pas créer le chaos. Aujourd’hui, dans notre société où tout est inversé, où la logique n’a plus sa place, où presque plus rien ne fait sens, ceux qui alertent sur le drame qui se prépare sont accusés de vouloir ce drame, et pire, d’en être les instigateurs, les responsables, ceux qui le cautionnent. Alerter sur l’imminence d’un crime ne fait pas de vous un criminel ! Dans notre société malade, alerter et vouloir prévenir fait de vous le problème. Tout s’organise comme si ceux qui veulent éviter un drame sont jugés trop contrariants et irritants. Les soupçonnerait-on d’être des empêcheurs de chaos à venir ?
Il est plus que jamais impératif de prendre de la hauteur et de se saisir de cette lettre ouverte pour placer dans le débat public ce sur quoi elle nous alerte, à savoir :
- L’existence et la nature du délitement en cours ;
- L’exacerbation des haines et des contresens, conduisant à opposer les uns aux autres ;
- L’existence de territoires de la République où la seule loi qui s’applique est celle du plus fort ;
- La perte du sentiment de fraternité ;
- La nécessité d’identifier et d’éradiquer les dangers ;
- Eviter une guerre civile comme futur possible pour notre Nation.
On le voit, s’insurger contre cette alerte est paradoxal et le signe d’un délitement de la pensée. Comment s’insurger contre des individus qui appellent à réinstaurer la fraternité, à éviter la violence, à faire que le vivre ensemble, quelles que soient sa couleur de peau et/ou sa religion, soit une réalité concrète et non un idéal ? Il y a vraiment quelque chose de malsain dans notre société contemporaine et ce qui est malsain est cette confusion qui fait passer celui qui veut entraver le crime pour un criminel. Après tout, ne voit-on pas aujourd’hui des médecins poursuivis pour avoir voulu soigner leurs patients ? Ne voit-on pas des mesures entravant nos libertés sur le seul fondement d’une croyance en leur utilité ?
Notre société semble pilotée par des algorithmes devenu fous, c’est-à-dire en pleine confusion et sans repère. La ministre des Armées, qui a fait de sa vie un long combat pour décrocher des postes de cabinet et des maroquins ministériels, qualifie cette lettre de tribune irresponsable mais l’irresponsable n’est-elle pas cette ministre incapable de saisir le sens de cette lettre et de poser un regard lucide sur l’état de notre société ? Nous sommes encore dans l’inversion accusatoire et le chamboulement du vrai par le faux. Désormais, pour le pouvoir, il est de bon ton de taper sur le messager et d’ignorer le message.
Il est urgent de regarder la réalité, de nommer les maux, de les comprendre et d’agir pour préserver ce qui est essentiel et conforme aux valeurs de notre culture : le respect de l’autre et l’éradication de la violence illégitime. Il faut placer la vie au-dessus de tout et la vie ne relève pas de visions et d’interprétations où tout est inversé et où le mal est déguisé sous les habits du bien. Il est urgent de ne plus être aveugle et de ne plus fuir la réalité. Pour toutes ces raisons, cette lettre ouverte doit être lue par tous les Français et devenir le texte à partir duquel nous devons débattre puis exiger des actions pour sauver notre pays, sauver la fraternité et sauver nos libertés.