Désolé, je vais vous parler des Serbes

par djooka
mardi 9 octobre 2007

J’en suis navré, mais je me dois de vous en parler, et même si cela vous nuit, vous gêne ou vous ennuie. Je veux parler des Serbes, du peuple serbe. Je souhaite m’exprimer au sujet de la Serbie. Serbe, Serbie, je vais m’acharner à vous le répéter. Cela sonne comment à vos oreilles ? Similitude sémantique avec le mot exacerbe, le verbe exacerber, n’est-ce pas ? Acerbe aussi, tiens, puisqu’on y est.

Serbe... Qu’est-ce qu’un Serbe ? Mais surtout qu’est-ce qu’un Serbe aujourd’hui ? Et qu’est-ce qu’un Serbe, aujourd’hui, en France mais aussi et surtout à Belgrade, à Banja Luka ou à Zagreb ? Pour véritablement déterminer ce que représente ce pays, décrypter son histoire, je me suis intéressé tout d’abord à ce que j’ai connu, la Yougoslavie, puis à sa capitale d’époque, Belgrade.

C’est dans les années 90 évidemment que j’apprenais que j’étais plus un Serbe qu’un Yougoslave. Car, bien que né en France, je me suis toujours senti Yougoslave, de part les années magnifiques de mon enfance passée en Bosnie, durant les étés. C’est à cette période que la télévision m’apprend la dislocation de la fédération de Yougoslavie. Et c’est à cette même période que mes camarades de classe, perchés sur leurs clichés me catégorisent, m’emboîtent, me jugent, m’archivent. Ils me demandent donc ce que "je suis", et ma réponse naturelle est de répondre que je suis "Yougoslave". Mais la réponse ne leur a pas convenu, alors, je l’ai dit, je l’ai lancé, je m’y suis vu contraint. Comme une punition, je suis, alors, Serbe. "Alors toi donc, tu es un criminel !" Quelle punition que d’entendre cela, quel outrage, quelle honte, pour moi, qui me suis toujours dit être contre le racisme, la discrimination, la xénophobie, maintenant, moi, ayant toujours été fier de mes origines, je devais les cacher, les bannir ? Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait.

Dois-je expliquer éternellement que des foules immenses, quelles que soient leurs nationalités ou appartenances ethniques, se sont déplacées dans toutes les rues de l’ancienne Yougoslavie pour manifester leur révolte, leur mécontentement lors de l’arrivée des premières troupes en Slovénie en 1991 ? Je me dois de l’expliquer. Dois-je expliquer qu’il est faux que
Milosevic avait donné pour ordre aux forces militaires serbes de violer systématiquement les femmes musulmanes bosniaques ou croates, qu’il y a eu certes et ô hélas des viols dans cette guerre minable comme dans beaucoup d’autres, mais que les victimes étaient aussi Serbes et que les violeurs ne l’étaient pas ? Devrais-je encore longtemps me justifier pour simplement dire que les Serbes ont également du sang rouge qui coulent dans leurs veines, et qu’ils aiment les leurs autant que vous aimez les vôtres ? Devrais-je encore vous étayer cela en affirmant que ce même nombre de viols a été multiplié par six ou dix et que les commissions d’enquête ordonnées par la Croix-Rouge en ont constaté moins d’une centaine ?! Savez-vous que le général Morillon affirme devant une commission d’information du parlement français que Milosevic n’était pas responsable des massacres perpétrés à Srebrenica, qu’une enquête ordonnée par le gouvernement des Pays-Bas, qui avait envoyé un bataillon à Srebrenica, aboutit aux mêmes conclusions ? Saviez-vous que les Serbes de Bosnie ne sont pas des envahisseurs, mais des indigènes et que les musulmans bosniaques sont des Serbes convertis à l’islam quand la Bosnie était alors ottomane ?

Je sais pertinemment que les Balkans sont difficiles à comprendre. Je sais également qu’aucune personne ayant commis des meurtres, génocides ou autres manquements aux droits basiques de l’homme, ne doit échapper à la justice, quelles que soient ses différences. Mais je ne supporterai plus cet acharnement médiatique, ce lynchage des Serbes systématique. Mais savez-vous donc qu’il existe à Belgrade un monument érigé à l’amitié franco-serbe, et qu’il n’en existe nulle part ailleurs dans le monde ? Définition du vieux dictionnaire Larousse des années 60 appartenant à un proche : malgré ses pages vieillies et jaunies il est indiqué : "peuple des balkans... accueillant et chaleureux..."

Ce qu’était mon cousin, Dragan, mort une balle en plein front, tirée par on ne sait qui. Il se lavait alors le visage dans un petit ruisseau, détestait la guerre, et, parmi ses amis, des musulmans, des Kosovars, des Russes, des Croates. Il ne voulait pas la guerre, comme beaucoup d’ailleurs. Et qu’entend-on aujourd’hui çà et là ? Le mot serbe associé à la guerre, à la haine, à la haine ou à la guerre. La Serbie a gagné l’Eurovision ? C’est du géopolitique, entends-je ! La Serbie au Parlement européen et éventuellement à la présidence tournante ? On crie au scandale. Le scandale a été joué d’avance par l’Allemagne et les Etats-Unis, qui eux seuls ont mis le feu aux poudres. Ayant voyagé partout dans les Balkans, je peux vous assurer que même à Belgrade, je me sens en sécurité, et que le peuple Serbe est véritablement un peuple accueillant et chaleureux, qui a envie de tourner... non, non, qui a DEJA tourné la page, car ne l’oubliez pas, si effectivement le régime serbe d’époque me dérangeait fortement, c’est le peuple serbe et lui seul qui en a eu raison. Comprenez donc bien ce que j’écris pour ne pas tomber dans le panserbisme : je lutterai pour chaque peuple de manière identique, mais seulement dans le sens de la vérité. Et la vérité sur les Serbes a été spoliée. Ah oui, juste une chose : je suis Serbe d’origine, côtoie des musulmans de tous pays, des catholiques, des protestants et je suis ami avec des juifs. Je ne suis ni criminel ni violeur ni barbu aux cheveux longs pourtant, comme toute ma famille. La seule précision que je souhaiterais apporter est la suivante : méfiez-vous donc de ce que vous racontent les médias ! Et jugez par vous-même.


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