Dos à dos, Sarko, Ségo, au mépris de la morale citoyenne

par Olivier Bonnet
jeudi 8 mars 2007

La situation est grave. Les deux candidats, dont on nous prédit l’élection obligatoire de l’un ou l’autre, sont également pris en flagrant délit de mépris de la plus élémentaire morale citoyenne. Et le pire : ce scandale n’empêchera sans doute pas l’accession du plus habile de ces deux bonimenteurs à la fonction démocratique suprême. Le prochain président sera-t-il celui que ça ne dérange pas de se faire offrir des dessous de table ou celle pas gênée de voler le trésor public ?

 

Sarkozy, l’homme blessé
Nicolas Sarkozy est un homme "blessé par des attaques malhonnêtes". Pensez : tant de mensonges, de calomnies, tant de bassesse. Mais on ne l’abattra pas ainsi, à coups de pareilles vilénies. Rien ne l’empêchera d’atteindre son glorieux destin : être élu président. Tout ce qu’on lui reproche ne compte pas. Son argument ? "C’est même pas vrai !" Lorsqu’il est révélé - par le Canard enchaîné, déjà - qu’il instrumentalise la police nationale à son profit de ministre-candidat, qu’il fait ainsi payer par le contribuable des fonctionnaires qui travaillent pour lui, au mépris de leur mission de service public, il nie. Un journal qui se compromettrait ainsi à propager de fausses informations, aussi gravissimes, mériterait bien d’être traîné devant les tribunaux, pour prouver au citoyen électeur que l’homme qui se présente à son suffrage est injustement accusé. Mais Sarkozy ne porte pas plainte... Quand son adversaire annoncée comme principale, Ségolène Royal, est calomniée par une campagne d’e-mails lui imputant un hôtel particulier qu’elle ne possède pas, cette dernière révèle sa déclaration fiscale et le candidat UMP annonce qu’il va publier la sienne. Mais Sarkozy ne le fait pas. Et le droit de suite ? Elle vient, cette déclaration, Monsieur le transparent ? Et bien non : une dépêche AFP nous livre cette perle : "M. Sarkozy avait lui aussi annoncé être assujetti à l’ISF, annonçant la publication de son patrimoine, mais a finalement renoncé à cette deuxième mesure, arguant de raisons privées." Raisons privées ! Ca ne nous regarde pas, donc, c’est très clair. Circulez, y’a rien à voir. Lorsqu’enfin le Canard enchaîné nous apprend que le promoteur favori de la ville de Neuilly consent à son maire un rabais de 300 000 euros sur le prix d’un appartement, auquel s’ajoute un autre cadeau sur les travaux d’aménagements, d’un montant de 511 000 euros hors taxes mais dont il ne paiera que 447 800 TTC, il nie, encore. Comment, un conflit d’intérêt, un abus de position dominante, de la corruption ? De l’enrichissement personnel, aussi, puiqu’il revendra finalement ledit appartement 1,9 millions d’euros - une plus-value de 122% ? "Même pas vrai !" On attend là encore une action en justice du potentat des Hauts-de-Seine, qui ne laisserait pas ainsi son honneur odieusement sali...

Royal, fraudeuse à l’insu de son plein gré
Nous voilà donc édifiés sur l’honnêteté du lider minimo. Mais qu’on se retourne vers la candidate censée représenter l’alternative et qu’apprend-on, dans un Canard enchaîné décidément d’utilité publique ? Ségolène Royal et son compagnon ont estimé la valeur de leur appartement de Boulogne-Billancourt à 750 000 euros. Or, il a été acheté en 1990 876 000 euros. Il se serait entre temps tellement déprécié, contre-exemple ahurissant de la hausse vertigineuse de l’immobilier ? Pas du tout, évidemment : il vaut en réalité, au prix du marché, quelque 1,2 millions d’euros. Et ce n’est pas tout : Royal et Hollande évaluent leur résidence de Mougins, sur la Côte d’azur, à 270 000 euros. Au lieu des 700 000 sur lesquels s’accordent les professionnels locaux de l’immobilier : une paille ! Au total, le Canard sort sa calculette et nous informe que la somme due au titre de l’ISF, sur le patrimoine correctement évalué, devrait être sept fois plus élevée que celle acquittée par les Hollande-Royal. Et que répondent-ils, variante du "même pas vrai" sarkoziste ? "C’est pas nous, c’est l’expert comptable". Est-ce à dire que l’expert en question aurait outrageusement sous-évalué leur patrimoine... à leur insu ? Jusqu’où nous prendra-t-on pour des cons ? Marie-Ségolène Royal prétend défendre les démunis, porte les valeurs de la solidarité - financée par l’impôt -, mais elle vole tout bonnement le Trésor public en payant sept fois moins que ce qu’elle devrait : est-ce là la pratique de la politique par la preuve ? On est en réalité, comme d’habitude, plutôt dans le registre du "fais ce que je dis, pas ce que je fais". Mais sans doute sommes-nous trop naïf de nous indigner ainsi que le peuple français s’apprête vraisemblablement à élire l’un ou l’autre de ces individus dont la malhonnêteté éclate désormais au grand jour. Qui se soucie encore de morale citoyenne ?


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