EADS : Nicolas Sarkozy s’engage

par Aimé FAY
mardi 9 octobre 2007

Le président Sarkozy s’est exprimé hier, 8 octobre 2007, en ces termes : « S’il y a des gens qui ont fraudé chez EADS, il faut que la justice aille jusqu’au bout. Que l’on connaisse la vérité et que ceux qui se sont comportés de façon malhonnête soient punis à dure proportion de ce qu’ils ont fait. Il ne peut pas y avoir une règle en bas et une règle différente en haut. Et, j’irai jusqu’au bout de l’enquête pour savoir quelles ont été les responsabilités de l’Etat à ce moment-là ».

A ce niveau de responsabilité et pour l’ancien brillant avocat qu’est notre président, tous les mots ont un sens bien précis. Si on prend le mot à mot suivant : "ceux qui ont fraudé chez EADS", il semblerait ne concerner que ceux qui sont effectivement chez EADS, c’est-à-dire les salariés. Bien sûr, Lagardère et Daimler, comme l’Etat, ne sont pas salariés du groupe EADS. Ils pourraient donc être exclus du propos présidentiel.

Naturellement ce n’est pas dans ce sens que toute la France a entendu les mots du chef de l’Etat. Si Nicolas Sarkozy veut que la justice passe, pour les hommes comme pour l’Etat, elle devra le faire avec intransigeance. Un engagement présidentiel de cette portée ne pourra jamais être renié. Jamais un président de la République n’était allé aussi loin.

Nicolas Sarkozy a montré hier soir que le terme de rupture devait prendre rapidement tout son sens et, notamment à l’occasion d’une affaire où l’amitié qui le lie à un présumé innocent, Arnaud Lagardère, est très forte.

On ne peut que se rappeler le président Mitterrand qui avait, lui aussi, dû lâcher son vieil ami de déportation, Roger-Patrice Pelat, quand il avait été soupçonné de délit d’initié. A cette époque, la France avait apprécié ce trait de droiture chez un homme politique...

Pour le commun des mortels cela paraissait normal. Mais, quand on est en haut, tout en haut, il peut être difficile de ne pas soutenir une personne pour qui on a, encore, une amitié sincère.

Cependant, on n’est pas chef d’Etat comme on est simple citoyen. L’exemple doit venir d’en haut. Nicolas Sarkozy le sait. Il sait aussi qu’une certaine jeunesse de France, à la recherche de valeurs et de repères disparus depuis 68, attend, chaque jour, qu’il n’y ait plus du tout "une règle en bas différente de celle d’en haut".

L’affaire EADS est maintenant devenue une affaire d’Etat. Des centaines de millions d’euros, sous la forme de valeurs mobilières, auraient été fourguées à l’Etat par des vendeurs apparemment dénués de tous scrupules. En droit civil cela s’appelle du dol. L’article 1116 in extenso précise : "le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une ou l’autre des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et il doit être prouvé".

Donc, si la justice passe, les coupables seront punis du fait de dol et aussi de l’article L 465-1 du Code des marchés financiers qui prévoit deux ans d’emprisonnement et une amende pouvant aller jusqu’à dix fois l’infraction.

Les sommes que les délinquants pourraient avoir à payer seront de l’ordre de plusieurs milliards d’euros. Et, l’Etat sera remboursé des deniers perdus dans la manœuvre dolosive dont il a été la victime malheureuse.

Il appartiendra ensuite à l’Etat de voir quels sont ses collaborateurs qui n’ont pas été aussi compétents que leur fonction l’exigeait. Voire ceux qui ont, volontairement ou non, trahi la confiance que la nation avait mise en eux en les nommant par erreur à des postes trop importants et, malheureusement, conservés trop longtemps par oubli.

L’affaire EADS pourrait marquer ce début de siècle, tellement les sommes sont énormes.

Sa résolution sera essentiellement due à la ténacité du président Sarkozy pour qui la mise en œuvre de ses promesses de campagne n’aura pas été, comme trop souvent chez les chefs d’Etat, que des mots qui n’engagent que ceux qui les écoutent.


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