EDF, quelle énergie pour demain ?

par Christophe Bugeau
jeudi 18 février 2016

Le producteur EDF désormais séparé de l’exploitant de réseau ERDF et qui pourtant se réjouissait de la mise en concurrence (qui devait lui rapporter plus) est obligé de faire appel à l’Etat qui ne lui réclamera pas son dividende mais percevra 1,8 milliard d’euros en action, ce qui équivaut à une augmentation de capital. Mais est-ce la bonne formule pour assurer notre futur énergétique ?

Tout d’abord, il faut se rappeler qu’EDF a pour fleuron ses centrales nucléaires (58 réacteurs en France pour environ 65 000 mégawatts de puissance installée), qui sont censées lui fournir une électricité bon marché et toujours disponible (90-95 % du temps). Mais la continuation de l’exploitation des réacteurs existants pour au moins 10 ans, le temps de développer les réacteurs de prochaine génération coute cher. La mise aux normes va peser sur les capacités de l’entreprise. Et cette dernière voit les coûts de l’EPR de prochaine génération s’envoler à 3,5 milliards d’euros pour Flamanville (3 fois le prix prévu !). Le nucléaire n’est plus ce qu’il était !

Enfin, EDF a fait des investissements peu rentables en G-B, au Brésil et en Argentine qui lui ont fait perdre beaucoup de fonds. Mais le consommateur paiera peut-être puisque l’électricien a obtenu une hausse de 2,5 % du tarif réglementé…

En fait, se pose aujourd’hui la question du bouquet énergétique de demain (voir http://www.christophebugeau.fr), le gouvernement a-t-il fait un bon choix en décidant le maintien du nucléaire ? Pas si sûr, la hausse des coûts de ce dernier pour des raisons de sécurité (Fukushima est passé par là) et la baisse des coûts des énergies renouvelables rendent le choix hasardeux.

Le péché fondamental des énergies renouvelables c’est leur capacité de production aléatoire. L’éolien ne fonctionne pas s’il n’y pas de vent et le solaire non plus s’il n’y a pas de soleil. Mais ce défaut rédhibitoire peut être corrigé : l’on peut de plus en plus stocker l’énergie (par des systèmes de condensateurs, par la fabrication d’hydrogène, par des barrages à deux niveau qui retiennent l’eau dans un réservoir bas et la remontent la nuit lorsque la consommation est moindre).

De surcroît, les réseaux « intelligents » seront bientôt là pour permettre de mieux répartir, même à longue distance, la production et la consommation. Et ceux-ci couplés à des économies d’énergie de plus en plus nécessaires, rendront la part belle à une production plus décentralisée. Le rapport rendu par l’ADEME l’an dernier, même s’il a des défauts prouve que cette hypothèse est techniquement et financièrement réaliste (voir http://www.ademe.fr/mix-electrique-100-renouvelable-analyses-optimisations).

Enfin, les énergies renouvelables sont à la veille d’une vraie révolution technologique qui va bouleverser leurs coûts et les capacités d’utilisation. Le solaire photovoltaïque à concentration (https://www.google.fr/search?q=solaire+photovoltaique+a+concentration&safe=strict&biw=1360&bih=630&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwi3l6Ll7f7KAhXCvRQKHcf_CqwQ_AUIBigB) est le premier exemple : il s’agit d’avoir non pas d’un panneau recouvert de cellules mais d’une cellule qui est sous une lentille solaire qui concentre la lumière : un coût moindre puisqu’il faut moins de cellules et la possibilité d’utiliser des cellules à « jonction » avec plusieurs longueurs d’ondes de lumières interceptées (rendement 30-40 % au lieu des 10 % habituels). Ceci permet avec des panneaux avec « traceurs » suivant la direction du soleil d’avoir à la fois une plus forte production et de continuer à produire même quand le soleil est voilé grâce à l’interception de certaines longueurs d’ondes (même si le rendement est moindre).

De même, l’éolien de haute altitude (https://www.google.fr/search?q=high+altitude+wind+turbine&safe=strict&biw=1360&bih=630&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwiej5i87f7KAhXBoBQKHTc7AR0Q_AUIBigB) va révolutionner le domaine de l’éolien. Il s’agit ici d’exploiter les vents de hautes altitudes à partir de 300-600 m : ils sont plus constants et dès cette altitude pour une même surface d’hélice l’ont obtient de 2 à 4 fois plus d’énergie. Ces « éoliennes » ont un taux de disponibilité de 75%, soit le double d’une éolienne classique. Il est difficile de savoir quelle est celle (ou celles) des technologies qui remportera la palme, mais entre l’éolienne au sein d’un ballon dirigeable d’altaeros energies (start up du MIT) ou les pâles d’hélicoptère volantes de Makani Power (filiale de google) la course est lancée.

Ces perspectives devraient permettre à nos dirigeants de revoir leur copie au fur et à mesure que le siècle s’avance : les investissements lourds dans de futures centrales nucléaires sont peut-être à différer. 


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