Le 12 septembre 2008, Kosta Tribrecka meurt dans
les circonstances exposées. Il avait clairement tout raconté à la presse, qu’il avait auparavant convoqué : l’ambassadeur US avait bien favorisé l’entrée de Diveroli en Albanie, le fils du premier ministre "dealait" bien ouvertement des armes, et les deux gouvernements, albanais et américain étaient bien au
courant de tout. Il venait sans le savoir de signer
son arrêt de mort. C’est le mouchard de l’histoire,
désormais. Sa conversation téléphonique avec Diveroli où celui-ci parlait de "mafia" au plus haut sommet de l’état albanais avait été
remis à la presse. Mais chez ce Diveroli, on ne comprend toujours pas comment une aussi jeune revendeur d’armes avait pu hériter d’un contrat de 300 millions de dollars. On le comprend encore moins quand on apprend qu’un contrat précédent portant sur des uniformes, des armes et d’autres objets militaires avait déjà été rompu pour manque de sérieux et de qualité par le Pentagone : le Congrès, en 2008, grâce à Waxman, ressort des textes le prouvant :
"The firm was being investigated for "numerous violations of the Arms Export Control Act and contract fraud," according to a congressional report issued last year. In addition, it was accused of performing substandard work on at least 11 government contracts, which were ultimately withdrawn or terminated. According to the report : "Government contracting officials repeatedly warned of ’poor quality,’ ’damaged goods,’ ’junk’ weapons, and other equipment in ’the reject category,’ and they complained on several occasions that AEY was ’hurting the mission’ and had ’endangered the performance’ of government agencies." Dès 2005, donc, son entreprise a déjà été sermonnée pour sa légéreté et son incompétence (c’est une marque de fabrique familiale, comme nous le verrons). Or en septembre 2006, malgré ce handicap, il remporte quand même le marché du siècle : mystère et boule de gomme. En janvier 2007 le contrat est même confirmé. On s’interroge : comment fait-il donc ?
Dès l’annonce de la rupture du contrat, l’armée, qui s’est résolue à le faire contrainte et forcée, multiplie les gaffes pour masquer l’ampleur du problème et sa forte responsabilité. La palme en revenant à Jeffrey Parsons, le directeur de l’Army Contracting Command, qui tente à tout prix de minimiser... son propre rôle dans l’affaire. Tout d’abord, en expliquant pourquoi les commandes ratées précédentes n’avaient pas été dissuasives :
"Military contracting officials said the review of AEY’s past performance didn’t raise any red flags because the company’s previous contracts were too small to require mandatory reporting". En gros on ne fait pas d’enquêtes en dessous d"un certain seuil ! Il y en avait déjà eu pour plus de 128 millions de dollars... Mais comme ce n’est pas encore assez gros à avaler, Parsons en trouve une autre, d’excuse : tant que la plainte n’avait pas été déposée, on ne pouvait arrêter les contrats en cours, et Diveroli n’avait pas lui-même indiqué dans son dossier ses déboires précédents :
"Parsons said AEY had failed to tell the military that it had several contracts that were "terminated for cause" before it was awarded the $298 million contract in January 2007. He said the Army was changing its policies to require that all canceled contracts — regardless of the amounts — be reported". C’est bien entendu grotesque, ou alors l’armée américaine gère ses stocks et ses contractants avec un boulier, ou ne tient jamais compte des remarques ou désagréments, bref elle est... incompétente ! Finalement, pour le responsable des approvisionnements US, ce n’est donc pas si grave que ça, et lui n’y est pour rien, et Diveroli est responsable de tout
: "In my opinion while there certainly is room for improvement . . . this case is more about a contractor who failed to properly represent his company ... rather than a faulty contracting process". C’est pas nous, c’est lui ! Les propos de Parsons sont pour le moins scandaleux, dignes d’un gamin de 5 ans plutôt que d’un haut responsable, et démontrent à quel point l’armée veut se laver les mains de l’histoire ! Les "explications" données par le responsable des fournisseurs de l’armée sont grotesques !
En juin 2008, notre homme et ses associés sont néanmoins inculpés officiellement par un juge de Miami :
"But in June, a federal grand jury in Miami indicted Diveroli, as well as Packouz and two other AEY associates, for fraud and conspiracy". Ce qui n’empêche aucunement l’entreprise de continuer à fournir pendant ce temps le Pentagone : "
Diveroli retained at least two government contracts for months after the indictment. "The contracts were for AK-47s and weapons repair parts," says Glenn Furbish, a senior audit manager for the Special Inspector General of Iraq Reconstruction (SIGIR). The contract for weapons repair parts is noteworthy for another reason : AEY had attempted to buy parts through websites in China"... Sur les sites internet... et même d’acheter directement sur place ou presque, en août 2008, à la foire Malaysienne déjà citée. Sur les stands de la Malaysian Fair de 2008, en effet, 11
entreprises sont chinoises. Parmi elles, CHINA NORTH INDUSTRIES CORPORATION, plus connue sous le nom de
Norinco. La firme s’était rendue célèbre au USA en 1994 :
"In 1994, some employees of Norinco came under federal investigation from both the FBI as well as the BATF after a successful sting dubbed “Operation Dragon Fire.” In May 1996, in what was called "the largest seizure of fully operational automatic weapons in U.S. history,"14 individuals and an Atlanta, Georgia company were indicted for the unlicensed importation and sale of 2,000 Type 56’s into the United States. Les loubards s’étaient fait infiltrer : "
U.S. Customs agents posing as arms traffickers convinced a group of Chinese arms dealers, including three Norinco representatives, that they were in the market to buy guns for drug rings and street gangs." Il ne pouvait pas mieux rêver comme voyage d’affaires ! Sa présence là-bas démontre que c’est bien un trafiquant d’armes, et non un simple post-adolescent paumé comme le décrit si bien sa famille. On ne va pas dans une foire à l’armement en touriste ! Son adjoint, David Packouz se retrouvera lui aussi aux Emirats pour une foire similaire : encore une fois, ce n’était pas pour y faire du tourisme...
Ne cherchez pas plus loin ce qu’est un "type56".
"The Type 56 assault rifle is a Chinese copy of the Kalashnikov AK-47 assault rifle, which has been manufactured since 1956. It was produced by state factory 66 from 1956-73, then by
Norinco from
1973 onward." Décidément, notre jeune homme y est abonné, à la Kalach’... Plus intéressant encore : si l’alliance du Nord de Massoud avait choisi d’être équipée en AK-74, d’origine soviétique pure, d’autres groupes afghans avaient préféré le fameux Type56, sa copie chimoise. Ce sont les talibans ! "
During the Soviet war in Afghanistan in the 1980s, many Chinese Type 56 assault rifles were given to Afghan Mujahideen guerrillas to fight Soviet forces in Afghanistan by both the Chinese and the Americans. The Type 56’s use in Afghanistan also continued well into the 1990s and the early 21st century as the standard rifle of the Taliban when Taliban forces seized control of Kabul in 1996"... The Taliban’s use of the Type 56 was a stark contrast to the weapons of the Afghan Northern Alliance, which were exclusively Russian-made small arms like the AKM and the AK-74.... En résumé, les Kalach’ chinoises sont plutôt talibanes... et Diveroli achète plutôt chinois... à vous d’en tirer les conclusions. Un bon vendeur répond d’abord à la demande...
En septembre 2008, alors que les membres du Congrès poursuivent leur enquête, Diveroli s’enfuit en Israël, où réside une partie de sa famille. Car l’enquête du Congrès avance, avec des révélations de taille : "
A committee report reveals that in December 2007 the President of Albania traveled to Iraq in December 2007 and made a personal offer to David Petraeus and Ryan Crocker to provide the ammo free of charge. Albania, and other former Soviet with aged weapons stockpiles, had been actively trying to give away the weapons" En décembre 2007, au moment où Diveroli recevait la certitude que son contrat de septembre 2006 portant sur les 300 millions de dollars était confirmé, le président du pays qui gérait le dépôt d’armes où il se servait abondamment annonçait que les munitions y devenaient désormais gratuites ! Le pays étant l’objet de plusieurs enquêtes de l’ONU et également d’Amnesty sur le trafic des armes légères, où le fiston avait été abondamment cité, voilà qui tombait à pic... Et qui était mis au courant en pemier ?
Petraeus, l’homme autour de qui ont tourné toutes les transactions, toutes les arrestations, et toutes les.... exécutions ? Celui vers qui tout converge ! Mais quand va-t-on se rendre compte qu’il est l’homme-clé de tous les scandales de circulations illicites d’’armes partout où il passe ? Qui avait intérêt, en ce cas, à ce que le dépôt qui ne valait plus grand chose, explose ?
Qui pouvait en ce cas rejeter la faute facilement sur un contractant berné ? Qui aurait perdu, à ne plus vendre des choses devenues subitement gratuites ? Qui donc ? Ce dont on se doutait depuis le début était donc vrai : et d’une, le gouvernement albanais, à son plus haut niveau, était à l’o
rigine du scandale, et de deux, Petraeus en connaissat tous les attenants depuis le début ! Les avions de Victor Bout avaient bien été affrétés... par une autorité de l’armée américaine, comme nous le verrons plus loin.
Pendant ce temps, Diveroli continuait à fuir ses responsabilités. Questionné sur pourquoi il avait autant tardé à répondre aux enquêteurs du Congrès, celui-ci avait invoqué je cite "
son bureau avait été détruit par un cyclone" !!! "
The hearing is now back to looking at why AEY was given the contract in the first place, despite past shenanigans of Diveroli. These include telling a contracting officer that an order was delayed because a hurricane destroyed his Miami office. Not only did the hurricane not destroy his office, but there wasn’t a hurricane",dit un bloggeur ayant de l’humour. Avec cette affaire, on nage dans le grotesque depuis le début !!! Diveroli suspendu, l’armée américaine doit donc se tourner fin 2008 vers d’autres fournisseurs :
"When supplies were drawn down quickly last year, the Army had to turn to foreign suppliers to make "urgent buys." Ammunition was supplied by Poongsan Metals Corp. in South Korea, Israeli Military Industries, SNC of Canada and the Winchester division of Olin Corp. in East Alton, Ill". Poongsan Metal Corps Ammunition étant la firme citée par Ammoworks, la nouvelle société de Diveroli, comme étant son fournisseur Coréen privilégié : le même cirque recommençait ! On ne change pas une équipe qui gagne.... autant d’argent ! A noter aussi qu’une subdivision d’Olin, US Repeating Arms, appartient à la firme belge Herstal depuis 1989...
Le 27 janvier 2009, épilogue, enfin, ou presque, de la saga Diveroli : un juge de Miami, à la surprise générale, ordonne de rendre à Efraim sa Mercedes et son compte en banque généreusement garni, gelé depuis 2006 : pire encore, il l’autorise à nouveau à faire du commerce avec le gouvernement US !!! Le garçon, toujours en Israël n’était même pas présent à la lecture de la sentence..
"Last week, Miami federal prosecutors retreated, allowing the return of $4.2 million of Diveroli’s property — including a new Mercedes S550 — that had been confiscated. Perhaps even more significant, Diveroli is out on bail and a Miami Beach company he owns called Ammoworks might even now be selling ammunition to the American government. This fact has been largely overlooked by prosecutors and Congress". On tombe des nues, mais on apprend que Diveroli avait aussi un excellent avocat, payé par son père, lui aussi dans la vente d’armes : il avait fait remarqué que les armes avaient été fabriquées avant l’embargo, (et bien avant la naissance de son client !) et que c’était bien l’état Albanais qui les lui avait vendues. Or l’Albanie n’est plus communiste depuis longtemps :
"the government knows Mr. Diveroli purchased the Chinese-made ammo from the Albanian government, which had acquired the ammo back in the ’60s and ’70s, before the Chinese embargo and before Mr. Diveroli was even born," Srebnick said. "
Mr. Diveroli did not acquire the Chinese-made ammo, ’directly or indirectly,’ from any Communist Chinese military company." Résultat, Diveroli blanchi, puisque les balles n’étaient plus ni chinoises ni communistes (?), le voilà blanc comme neige et tout peut à nouveau recommencer, comme avant... et les soldats américains mourir en Afghanistan de balles achetées par le Pentagone... enfin pas tout à fait : le 27 mars 2009, lors de l’ouverture du procès fédéral de sa société AEY prévu pour se tenir en septembre, David Packouz et Alexandre Podrizki, décident,eux, de plaider coupable, risquant ainsi cinq années de prison maximum. Efraim Diveroli et Ralph Merill ayant choisi eux le non coupable... ce qui est beaucoup plus risqué. Dans l’arrêté, on relève 35 envois successifs pour un total de 90 000 000 de balles, facturées 10,3 millions de dollars, plus 10 000 pistolets... les fameux Glocks ou des Beretta (qui n’ont jamais été livrés).
Au final, tout le monde en est à se demander de quelles protections ces garçons ont bénéficié. Les mêmes qui ont permis à Diveroli de devenir vendeur d’armes à 18 ans. Car son extravagant dossier bute toujours sur ce fait incroyable. “
A lot of us are asking the question” ose un responsable du
State Department. “How did this guy get all this business ?” surenchérit un autre... Aussi jeune, aussi inexpérimenté et déjà de pareilles sommes sur son compte en banque ? Finalement, en creusant un peu, on a fini par trouver : pour y arriver, Diveroli avait fait jouer une vieille loi instaurée par Reagan, celle de la "
préférence ethnique". C’est incroyable, mais vrai. Avec ça, il avait battu aisément et "hors compétition" pas moins de 9 autres sociétés de vente d’armes concurrentes :
"AEY was one of 10 companies to bid by the September 2006 deadline". C’était effectivement imbattable : pour obtenir le contrat, Diveroli avait mis en évidence... sa judaïcité comme argument d’achat ! Mais ça, c’est aussi une aussi longue histoire, que nous verrons demain.