En bref : des propositions pour financer les retraites

par Jean-Luc Picard-Bachelerie
samedi 21 janvier 2023

Le problème serait, dans la pire des hypothèses du COR, un déficit de 12 milliards annuels de 2027 à 2050. Sachant qu’en 2021, 345 milliards ont été versés pour les pensions de retraite, ce déficit annuel représente 3,51 % de cette somme. Oh la la… Rappelons que le COR avait prévu en 2013, un déficit de 22 milliards pour l’année 2022 (lien) qui, en réalité, se retrouve en excédent de quelques centaines de millions à 3 milliards d’euros selon les versions. C’est dire la fiabilité des hypothèses du COR. Quand on voit comment le gouvernement a anticipé la pandémie alors que l’OMS n’avait de cesse depuis des années d’alerter les États de l’imminence d’une pandémie…

À l’heure de la sobriété et des appels du GIEC à produire moins, Macron veut nous faire travailler plus suivant ainsi l’appel de son maître l’Union européenne au projet néolibéral de régression sociale. Tout est dit sur l’absurdité et la méchanceté de ce projet de réforme. Alors, passons directement aux propositions non pour financer une retraite à 62 ans, mais à 60 ans, car les recettes pour y parvenir sont les mêmes.

Rappelons qu’en 1946, la situation économique de la France était bien pire qu’actuellement lorsqu’a été mis en place le modèle social à la française.

Théoriquement, à situation urgente et dramatique, toutes les solutions sont bonnes. Mais pour Elisabeth Borne : « Il y a clairement une ligne rouge pour nous, c'est de ne pas augmenter le coût du travail ». A priori, notre première ministre a oublié que le travail avant d’être un coût est LE producteur de richesse du pays.

En grande économiste, elle élimine donc d’emblée les solutions suivantes :

• mettre fin aux exonérations de cotisations (75 milliards d’euros par an) ;

• en finir avec les inégalités salariales hommes-femmes (24 milliards d’euros de cotisations supplémentaires par an) ;

• augmenter l’ensemble des salaires ;

• augmenter le taux des cotisations ;

• faire cotiser la part des salaires au-dessus de 3 377 euros (qui est exonérée de cotisation).

 

Néanmoins, il reste encore comme solution pour éviter « d’augmenter le coût du travail » :

• Lever une taxe de solidarité à nos milliardaires. Leur fortune s’élève à 544 milliards. Un prélèvement de solidarité de 2 % suffirait à combler le déficit annoncé. (lien)

• Taper dans le fonds de réserve de la CADES et des fonds de retraite complémentaire qui s’élève au total à 163 milliards. Si Sarkozy n’avait pas détourné les fonds de la CADES la réserve serait beaucoup plus importante. (lien)

• Faire cotiser les dividendes qui se sont élevés à 80 milliards en 2022. (lien)

• Lever une taxe sociale sur les robots qui remplacent des emplois les 3 premières années d’installation. (lien)

 

On le voit, des solutions il y en a pour peu qu’on le veuille bien, pour peu que cette réforme de retraite ne soit pas, en fait, une réforme idéologique néolibérale qui n’a pour objectif de ne considérer les individus que pour des agents de production dès le plus jeune âge (il n’y a qu’à voir le développement de l’apprentissage) jusqu’au maximum. Macron veut une retraite comme antichambre de la mort. (lien) Lors du premier essai de réforme, Macron supprimait le système par répartition pour nous obliger à cotiser dans des fonds de pension privés sans garantie qu'ils ne fassent faillite comme on le voit régulièrement dans les pays qui utilisent le système de retraite à points. Cette seconde tentative de réforme veut nous y pousser par dégradation des pensions au détriment des plus faibles.

D’autre part, le débat porte peu sur les conséquences de ce projet sur le chômage. Pourtant, il est évident qu’elles sont importantes, car cette réforme, si elle passait, augmenterait d'une façon significative le taux de chômage.

En effet, aujourd’hui toute personne entre 62 et 64 ans est en retraite. Avec des revenus plus ou moins importants, mais aucune ne reçoit quoi que ce soit des caisses d'indemnisation du chômage. Aucune n'entre dans les statistiques du chômage.

Si la réforme était appliquée ces mêmes personnes seraient soit au chômage, soit toujours au travail. Dans le premier cas à la charge des caisses d'indemnisation ; dans le second cas, ce sont les jeunes qui resteraient au chômage. Déshabiller Pierre pour habiller Paul ?

Il y a environ 2 millions de personnes qui ont entre 62 et 64 ans… C'est donc une hausse massive du chômage qui est planifiée. Pire, comme Macron devrait prévoir de mieux indemniser les chômeurs si le chômage augmente (puisqu'inversement quand le chômage baisse il veut réduire la durée d'indemnisation) le déficit de pôle emploi devrait être plus important encore .

Probablement parce que cela permet de faire pression sur les salaires... d'où l'intérêt du MEDEF pour ce projet de réforme car sinon, garder un vieux à la place d'un jeune c'est pas vraiment leur préférence.*

Ambroise Croizat, le père de la sécurité sociale disait ceci : « Ne me parlez pas d'acquis sociaux mais de conquis sociaux, car le patronat ne désarme jamais. »

64 ans, ça n’est pas négociable ! 62 ans il y en a ras-le-bol ! On lâche rien pour une retraite à 60 ans ! On lâche rien…

 

Sources pour cette tribune

Le Monde - « La réforme annoncée pénalise les classes intermédiaires, nées dans les années 1960, qui pensaient être aux portes de la retraite »

Mieux vivre votre argent - Rapport Oxfam : taxer les milliardaires pour éviter la réforme des retraites ?

Marianne - "Marianne vous répond" : où sont passés les 150 milliards de la réserve pour les retraites de Jospin ?

Les Echos - Les géants du CAC 40 ont reversé 80 milliards d'euros à leurs actionnaires en 2022

UMR - Les robots peuvent-ils payer nos retraites ?

* Merci à Jean-Pierre Gaillet de cette réflexion opportune.

 

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