Entre Grenoble et Briançon, la montagne s’écroule, Paris s’en moque

par Pierre Thivolet
jeudi 25 juin 2015

Ce qui se passe dans la vallée du Chambon, montre que face aux Alpes, on ne peut pas mégoter avec les infrastructures. Sinon la montagne se rappelle à vous. Apparemment, il manque une volonté politique à Paris. Il y aurait là de quoi lancer des grands travaux, une vraie politique d’infrastructures nouvelles. Mais on préfère s’attaquer à Nutella plutôt qu’aux Alpes, candidater pour les Jeux Olympiques plutôt que reconstruire un des axes majeurs de circulation entre le Nord et le Sud de l’Europe.

Incroyable mais vrai : La route qui relie la France à l’Italie, Grenoble à Briançon est coupée et apparemment à Paris, tout le monde s’en fout. La seule inquiétude : Mais par où va passer le Tour de France le samedi 25 juillet pour atteindre l’Alpe d’Huez ? Pas de souci : Un autre itinéraire est en train d’être organisé. Les cyclistes vont donc pouvoir pédaler tranquille. En revanche, sur place, les habitants sont coupés du monde, coupés des vallées voisines. Et ils vivent maintenant dans la peur du glissement brutal de tout un pan de montagne, déversant d’un coup, l’équivalent de 10 000 camions de roches dans le lac du Chambon, provoquant un tsunami dans le lac artificiel retenu par le barrage hydroélectrique le plus vieux de France. EdF se veut rassurante, mais c’est quand même une première.

Comment en est-on arrivé là, en 2015, en France ?

Depuis les romains, cette route est un des principaux axes reliant la France et l’Italie. Après la construction du barrage, dans les années 1930, la vallée a été noyée par un lac. Il a fallu construire une route à flanc de montagne au pied du plateau d’Emparis, jusqu’à la Grave, puis le Col du Lautaret, vers la vallée de Briançon. Et ce serait seulement aujourd’hui que l’on découvrirait que ce flanc de montagne était instable ?

Et quel a été l’impact de l’augmentation démesurée du trafic depuis que le tunnel sous le Mont-Blanc a limité ses capacités après l’incendie dramatique de 1999, et que la vallée de la Romanche a dû absorber des colonnes de camions, des files de caravanes et de vacanciers passant au ras des maisons et des voutes des tunnels ?

Il y a quelques mois, les services de l’équipement s’étaient voulus optimistes : La route serait réparée avant juillet.

Mais aujourd’hui les travaux ont dû être stoppés : Trop dangereux, la voute d’un des tunnels étant en train de s’effondrer. La catastrophe est imminente.

Vous n’en n’avez pas entendu parler ? Aucun ministre ne s’est rendu place ? La Ministre de l’Environnement et des Transports préfère voguer avec l’Hermione sur l’Atlantique plutôt qu’avec les sinistrés du lac du Chambon ?

Se sentant abandonnés, les habitants se sont organisés en collectif www.collectif-du-chambon.org.

Et ils découvrent que cela fait en fait plusieurs années que l’on avait détecté des fissures et des glissements de terrain. Ils redécouvrent que dès la construction du barrage dans les années 1930, le tracé de la route avait été jugé dangereux, et que la solution aurait été de construire un grand tunnel pour éviter ce versant trop instable. Un tunnel jamais construit. La seule solution qu’on leur propose serait d’aménager à la hâte une piste provisoire, un sentier, sur l’autre rive, au pied des glaciers du Mont-de-Lans et de la Meije… Retour deux siècles en arrière.

Ces 30 dernières années, suisses et autrichiens ont construit des ouvrages gigantesques, des tunnels de dizaines de kilomètres pour aménager la traversée des Alpes, le plus souvent en ferroutage. En France… nous sommes toujours à discuter de l’opportunité de la fameuse liaison Lyon-Turin, avec de nombreux tunnels, dont l’un de 57 kilomètres. C’est trop cher, clament des militants écologistes. Pas rentable, écrit un récent rapport de la Cour des Comptes. Pourtant, ce qui se passe dans la vallée du Chambon, montre que face aux Alpes, on ne peut pas mégoter avec les infrastructures. Sinon la montagne se rappelle à vous.

Apparemment, il manque une volonté politique à Paris. Il y aurait là de quoi lancer des grands travaux, une vraie politique d’infrastructures nouvelles. Mais on préfère s’attaquer à Nutella plutôt qu’aux Alpes, candidater pour les Jeux Olympiques plutôt que reconstruire un des axes majeurs de circulation entre le Nord et le Sud de l’Europe.

Et puis, la Grave, Mizoën, le Chazelet, Le Freney, le Chambon, c’est loin, c’est quelle sortie sur le Périph ?

Nous vivons une e-poque formidable.

http://pierrethivolet.blogspot.fr/2015/06/entre-grenoble-et-briancon-la-montagne.html


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