« Et en même temps ! » : parle toujours ma cocote, ça ne mange pas de pain !

par j-p. bédol
lundi 4 juin 2018

La France parle, parle encore "et en même temps" fait de beaux discours… même en anglais. J'ai un plaisir réel à l'écouter, ça sonne bien, mais je n'y comprends rien. Par ailleurs, n'ayant pas de bons yeux, j'ai peine à lire la traduction. Bref, comme les enfants, les images semblent encore me suffire… celle du bulletin de vote me suffira.

Le Monde aussi l'écoute patiemment et acquiesce, le sourire en coin, mais in fine tout se passe comme si cela rentrait dans une oreille "et en même temps" sortait immédiatement par l'autre.

J'ai quand même tout simplement l'impression que l'Amérique de Trump, la Chine de Xi, la Russie de Poutine et même l'Allemagne de Merkel, tous "en même temps", se foutent de la France !

Pourquoi avoir le sentiment que finalement la Parole de France n'est pas prise au sérieux ? Sauf, bien sûr quand des "amis" de circonstance ont besoin d'elle pour aller bombarder tel ou tel pays. En fait, cela légitime tout simplement leur action ! Pas celle de la France, bien que cela lui permette, "en même temps" de pouvoir bomber le torse, surtout quand le pays bombardé n'a aucun moyen de riposter.

Quel poids pèse la France quand elle veut infléchir la position d'un Trump, d'un Xi ou d'une Merkel sur le plan économique ? Combien de divisions face à Poutine dans le Donbass, en Crimée, en Syrie où il est l'allié du féroce dictateur que la France combat ? À chaque fois la réponse est la même : zéro ! Remarquons qu'aucun d'eux n'est bercé par la philosophie. La France si !

Au fil des années la rhétorique de la France s'est embellie. Un ancien Président est grassement payé pour faire des conférences de partout. L'autre écrit tout seul son livre. "Et, en même temps" l'actuel s'exprime plus en anglais, qu'en français !

Bref, la France a le verbe haut, facile et brillant, mais elle s'en tient là ! J'ai l'impression qu'en coulisse on se moque d'elle.

France philosophe, parle toujours ma cocotte disent certains ! Dépêche-toi de finir ton long discours, car moi j'ai des choses sérieuses à faire à la maison ! À savoir :

- "America first !" ce n'est pas du bidon. De plus, je (Trump) dois gagner les élections de mi-mandat en brossant mes électeurs conservateurs, nationalistes, racistes et religieux dans le sens du poil.

- "Germany first !" c'est pourquoi nous sommes, de loin, la première puissance économique du continent européen et aussi la première exportatrice de la planète. De plus, j'ai (Merkel) une coalition à préserver et je dois contenir, en même temps, la poussée xénophobe de plusieurs millions d'électeurs qui veulent ma peau.

- "China first !", et "qu'importe que le chat soit noir ou blanc…" (Deng Xiao Ping, 1978) l'essentiel c'est que dans une décennie notre grand pays soit la première puissance économique mondiale (dixit Xi) !

- "Russia first !" fini de se moquer de nous (dixit Poutine) comme du temps d'Eltsine l'ivrogne. La Russie est un grand pays (oui, mais seulement en termes de superficie). La preuve qu'elle est redevenue grande : le Donbass, c'est elle. La Crimée, c'est elle. L'alliée du dictateur syrien, c'est elle. Qui ose dire le contraire ? La Russie est bien un grand pays, respecté de tous (oui, mais…).

"Et, en même temps !" on attend vainement le cri de "France first". First where ? Où ? ... dans ses discours de la méthode en anglais. Sûrement, mais je n'oublie pas que les mots n'ont jamais fait d'un pays une puissance économique, même du temps des Lumières ! Surtout les mots de la grenouille face à un bœuf américain, allemand ou chinois. Pour le bœuf militaire russe, c'est autre chose, car la vie compte très peu pour lui.

"Et, en même temps", difficile pour la France d'être au four de la dialectique internationale et au moulin de l'activité économique sur son territoire.

"France first !" ça n'existe pas ! Pourtant, elle aussi, aurait beaucoup de choses sérieuses à faire à la maison, "et en même temps" :

- son commerce extérieur est toujours endémiquement déficitaire.

- ses produits manufacturés peine à être qualitativement compétitifs.

- sa dette publique continue d'augmenter. Bientôt les 100% paraît-il.

- sa fiscalité change tous les ans, au gré des humeurs des uns et des autres.

- ses inégalités progressent,

- son management de la COP 21, s'essouffle et piétine.

- ses promesses environnementales (surtout agricoles) ne sont pas tenues.

- ses lobbies sont de plus en plus puissants "et en même temps" veulent ignorer la souffrance animale.

- son classement dans le Pisa est lamentable. Celui dans le Shanghai pas meilleur.

- etc. etc.

Je préférerais pour ma part que la France brille à l'intérieur plutôt que sur les brillantes estrades internationales. Le spectacle avec les grands de ce monde, c'est bien, mais "en même temps" cela ne fait pas progresser la France intérieurement. "Et en même temps" ça coûtent bonbon tous ses déplacements en avion de luxe, celui acheté en pleine crise par la France en 2010 : "Air bling-bling One !".

Donc, la France doit s'occuper d'abord d'elle-même "et, en même temps" passer moins d'heures sur les plateaux de TV étrangères bien qu'elle parle couramment anglais.

L'Allemagne parle aussi couramment anglais "et en même temps" elle parle parfaitement le russe (appris en RDA durant son enfance) "et en même temps" elle ne perd pas son temps à courir les plateaux pour montrer son trilinguisme. Elle bosse dure, et cela se voit dans sa puissance économique.

À bon entendeur… France ressaisis-toi ! Où est ta priorité ? Il te faut choisir : être à la maison ou en même temps sur les estrades internationales ?

 

Crédit photo : lesechos.fr


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