Et si les Etats-Unis se retiraient de l’ONU ?

par Clark Kent
jeudi 21 juin 2018

Quand ça bouchonne sur l’autoroute, Trump double à droite, sur la voie de sécurité. Mais il met son gyrophare et sa sirène pour prévenir ! C’est ce qu’il vient de faire en décidant de se retirer du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies alors même que sa politique de séparation des familles à la frontière mexicaine provoque un tollé planétaire.

En fait, si cette simultanéité spectaculaire contribue à l’enfumage permanent en sons et lumière, paillettes et gogo-girls, le malaise américain concernant le CDH n’est pas vraiment un scoop. Quand l’institution a été créée en 2006, George W. Bush avait refusé de l’intégrer en pensant qu’il ne s’agissait que d’un copié-collé de la défunte Commission des droits de l'homme, morte pour avoir commis le sacrilège d’accueillir en son sein le diable lui-même : Kadhafi qui, comme chacun sait, était beaucoup plus incompatible avec les droits de l’homme que les saoudiens et Israël.

Quand Obama s’est joint à l'UNHRC (United Nations Human Rights Council ) en 2009, John Bolton, l’actuel conseiller à la sécurité nationale de Trump qui était alors l'ambassadeur des États-Unis à l'ONU, lui a reproché d’embarquer sur le Titanic, ce qui constitue sans doute sa seule déclaration pertinente. Mais le retrait de son pays du Conseil a beaucoup plus à voir avec un un choix idéologique hostile à l'engagement multilatéral qu'avec la conviction que le malade est incurable : Bolton a peut-être encouragé Trump sur ce dossier, mais le motif principal reste la mise en œuvre du mot d’ordre d' »America First », dans la droite ligne de la sortie de l’UNESCO, la caution culturelle, scientifique et éducative de l'ONU et de la sortie de l'accord de Paris sur le climat.

Cette tendance isolationniste est apparue également au récent sommet du G7. Nafta, l'accord de libre-échange nord-américain avec le Canada et le Mexique est sans doute la prochaine cible.

Le retrait du CDH va au-delà de la politique américaine concernant les migrants et du bilan opérationnel du Conseil ; c'est l'un des éléments d’un nouveau positionnement américain à l'égard de l'engagement mondial qui considère le multilatéralisme comme un piège et le nationalisme comme la clé du succès (pour le lion, évidemment, pas pour l’agneau).

Dire que l’ONU a pu fonctionner (avec des hauts et des bas) en tant que moyen de coopération internationale depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale parce que les membres clés, même critiques, sont restés à l'intérieur serait sans doute un truisme, mais en quittant l'Unesco, puis le CDH, et en menant des négociations séparées avec la Corée du Nord, Trump n’est-il pas en train de préparer le retrait de son pays de l'ONU, ce qui équivaudrait à un sabordage du navire amiral ?

Corsaires, pirates et forbans pourraient alors écumer les mers et faire régner ouvertement la règle du jeu qu’ils pratiquent encore en catimini : la loi du plus fort.


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